Actu BlogAfrique Australe Centrale

RDC: «On ne m’a pas donné l’ordre de faire quelque chose» (Gal. Leakey)

(B2)Le général Leakey, planchant devant la sous-commission défense du Parlement européen, le 3 novembre, a aussi évoqué l’éventualité d’une intervention militaire au Congo, davantage d’ailleurs pour en réfuter l’utilité que pour la justifier. « C’est uniquement une question de jugement et de volonté politique». Et de décrire tous les motifs qui ont pesé pour ne pas intervenir.

Des raisons internes aux Européens

1° Le peu d’enthousiasme des Européens. « Nous on fait notre travail : on a demandé qui souhaite y aller, certains souhaitent, d’autres pas du tout. Mais il n’y a pas eu beaucoup de manifestations d’intérêt, il faut donc faire preuve de réalisme. » Mais a-t-expliqué, « on ne m’a pas donné l’ordre de faire quelque chose ».

2° La difficulté d’intervention.
Comment intervenir « sans avoir un aéroport à proximité ». « Faire entrer une force dans la région suppose d’avoir un aéroport sur place, utilisable. Si on ne peut pas utiliser l’aéroport de Goma (qui ne peut recevoir d’ailleurs que des petits porteurs, pas des Antonov apparemment), il faut utiliser Kinshasa. Mais c’est trop loin». Cela supposerait avoir des hélicoptères et véhicules. Ce serait long et cher. Nous aurions des troupes au compte-goutte. Ce serait un gazoduc militaire. » (NB : utiliser Kigali au Rwanda ou Entebbe en Ouganda n’était pas possible pour des raisons politiques). «Et ensuite il fallait garder l’aéroport, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Avec 400 hommes, était-ce suffisant ». On le voit les questions opérationnelles paraissaient insurmontables pour une action rapide, avec un faible volant d’hommes.

L’évolution de la situation sur le terrain

3° La Monuc suffisante. «Au Congo, il y a 17 000 hommes de la Monuc, pas toutes dans l’Est. Et les Nations-Unies ont pu accompagner, ces jours-ci, sans danger, des convois humanitaires, vers Goma. C’est apparemment un bon signe, la Monuc se redéploie et répond aux besoins les plus urgents, les besoins humanitaires».

4° Les pressions diplomatiques, Nkenda sous influence est maîtrisable. «Le chef du mouvement rebelle congolais, Nkenda n’a pas pris Goma, alors que c’était possible s’il le voulait ;  les troupes gouvernementales s’étant enfuies. Ce qui me fait dire que Nkenda est influencé, peut être même contrôlé par d’autres forces de la région. Cela donne un signe pour la paix, pour la reprise du dialogue politique. S’il y a un accord politique, il faudra alors se poser la question de savoir si une nouvelle force est nécessaire. Si la politique reprend ses droits, on se retrouverait dans la situation des 4 mois, on serait dans la même position, avec la MONUC qui retrouverait son rôle».

5° La réalité du terrain. Aujourd’hui « il n’y a pas de combats mais des conséquences des combats. »

Commentaire : Finalement la voie diplomatique et politique semble avoir payer – au moins temporairement. On pourrait dire heureusement. Car à lire ce commentaire détaillé, pourquoi il était urgent d’attendre, on peut que se poser des questions sur l’utilité du concept de battlegroups, tel qu’il existe actuellement. J’y reviendrai.

(NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).