Défense UE (Doctrine)

L’approche globale, c’est comme le monoxyde de carbone…

ConfLituanieFrance 2013-07-12 10.46.23(BRUXELLES2) En ouvrant le séminaire franco-lituanien (*) consacré à la PSDC, Michel Miraillet n'a pas mâché ses mots. Pour ses dernières semaines à la tête de la direction des Affaires stratégiques du ministère de la Défense, celui qui a passé - comme il le dit - 15 ans de sa vie sur l'Europe de la défense - n'a pas fait dans la langue de bois. Sur la prévention de crises, l'action des Européens au Sahel ou l'approche globale, on a assisté à un petit feu d'artifice... loin, très loin de la langue de bois, habituellement pratiqué dans les séminaires et colloques de ce type. Il est vrai qu'on était à l'Ecole militaire, dans une enceinte composée de spécialistes. Et que c'était le début de l'été, ensoleillé...

L'action préventive de l'UE ... un rêve

« L'action préventive, pour le moment, c’est un rêve et un cauchemar pour la plupart des Etats membres. Nous avons beaucoup d’instruments pour agir, pour faire de la planification politique, surveiller l’environnement stratégique à la Commission et au SEAE. » Mais le résultat n'est pas à la hauteur. « Qu’a-t-on fait ? Nous avons une CMPD (la direction de la planification de gestion de crises) sous staffée, le SEAE se bat entre ses services...

L'exemple du Sahel : chacun a regardé le bout de ses chaussures

« J’ai passé six mois dans les réunions de directeurs de la politique de défense, en hurlant à table que ce qui se passe au Sahel est une menace. On a vu s’effondrer un État. Le ministre (de la Défense, J.-Y. Le Drian) a attiré l’attention de ses collègues, l’a signalé à Chypre (réunion informelle des ministres en septembre 2012) comme un « problème majeur ». La réaction de chacun a été de regarder le bout de leurs chaussures à travers leur table en marbre. » Certains agitaient le chiffon d'une « politique néocoloniale », d'autres « voulaient étendre avec un verre d’eau un incendie monstrueux ». « Nous sommes intervenus et avons cassé un mouvement. »

L'approche globale...

Et de de tirer la conclusion « Appelons un chat un chat, la prévention c’est un rêve. » « Et le militaire n’est pas encore inscrit dans les gênes de cette organisation » (Union européenne). Quant à « l’approche globale... c’est comme le monoxyde de carbone. Vous ne le voyez pas. Vous ne le sentez pas. Mais à la fin on en crève ! » « Nous devons laisser à l’instrument de défense une part croissante dans l’organisation. « Que l’Etat Major de l'UE cesse de regarder ses galons et qu’il commence à analyser et planifier. Que la CMPD soit staffée. Qu’on arrête les guerres (internes) et les gabegies »...

(*) coorganisé par la Fondation pour la recherche stratégique (FRS)

NB : Inutile de préciser que si cette intervention en a ravi certains, cela a jeté un petit "froid" parmi les différents responsables européens présents qui se battent tous les jours avec des difficultés propres. Mais le ministre de la Défense, JY Le Drian, en a rajouté une louche ensuite. A suivre ...

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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