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Entretien avec Jeff Bodart

Un véritable succès aux Francofolies de La Rochelle puis de Spa, son dernier album qui vient de sortir en France avec un titre « Boire, boire, boire » qui marche « du feu de Dieu » et Jeff est aux anges… Entretien.

Le show Belgomania aux francofolies de La Rochelle a été un vrai feu d’artifice. Surpris ?

Jeff Bodart – Pas seulement surpris, je ne l’ai pas vu venir. J’ai écrit pour Marka et Lafontaine. On a souvent joué l’un à coté de l’autre. Ils sont venus ainsi à « la grande fête à Bodart » que j’organisais ». Mais on n’avait pas vraiment joué ensemble. Tout le monde croit que c’est hyper fastoche de chanter ensemble. Mais il faut voir qu’il y a tout de même trois ego, et même quatre en comptant Carton, et derrière, des techniciens, du travail. Mais, sur scène, c’est vrai il y a une grande part d’improvisation et que ce genre de spectacle çà ne marche que quand il y a une magie, qu’une alchimie non seulement avec les chanteurs mais avec le public. A la Rochelle c’était un truc de fou. Du type qui vendait les places au mec qui accordait les guitares, tout le monde a été sidéré de la réaction du public. Les gens connaissent toutes nos chansons par cœur. Non seulement les refrains. Mais aussi les couplets. Non seulement les plus connues mais aussi les moins.

Se constituez en groupe nommé Belgomania ?

J.B. – Ce serait plutôt comme le proposait Marka « 4 5 6 la pluie » (NDLR : petit pied de nez au jeu des enfants « 1 2 3 soleil »). On pourrait effectivement créer ce groupe ; c’est excitant. Chacun ne va pas abandonner son solo. Mais si en plus de jouer tout seul, je pourrais jouer avec les autres ce serait génial, en tout ça me branche. Et il y a une grosse demande. Surtout en France.

Le nouvel album vient de sortir en France, çà marche ?

J.B. – Oui, de feu de Dieu. Ils en débarquent les kilos. Le morceau « Boire boire boire… » qui figure sur un single, qui n’est pas pour moi le meilleur de l’album. Mais ce qui est fou, c’est que çà marche. Comme quoi… (plaisantant) Il ne faut pas me confier les clés d’Universal, je pourrais la couler en 15 jours.

Comment le définirais-tu, différent ?

J.B. – Naturellement. Je déteste faire deux albums qui se ressemblent. C’est important pour moi. Une fois, dans un café j’ai entendu : « T’as le nouveau Bodart ? » L’autre répond : « non j’en ai déjà un. ». Ca m’a scié.  J’espère qu’il sera meilleur que le précédent et que le suivant sera encore meilleur.

Un autre album en vue ?

J.B. – Forcément. J’ai la chance d’avoir une maison de disque qui me permet d’enquiller album sur album. Je trouve que le consensus qui existe dans la chanson française : un an d’album, un an de promo, un an pour se ressourcer n’est pas suffisant. Il y a un projet de « live » éagelement. Mais j’ai tellement de nouvelles chansons. Je me vois mal rentrer maintenant en studio et me dire : alors, Jeff, on écoute ce qu’on a fait avant, on prend le meilleur et on vit sa vie avec. Non non, ce n’est pas possible. J’ai une chiée de chansons à sortir du cul. Bien sur tout le monde n’est pas d’accord sur çà. Mais j’ai une idée… chut (il va fermer la porte – nous sommes à la maison de disque). Moi ce que je veux c’est offrir l’album live soit scotché avec le nouvel album soit pour ceux qui viennent aux concerts. Logique ! Ca récompense ceux qui se déplacent. Ca évite des enregistrements pirates ou même merdiques. Je suis réaliste, Rome ne s’est pas construite en un jour. Déjà mon truc pour la TVA (Bodart a vendu son dernier album en franchise de TVA prenant la différence à sa charge), je pensais que ca passerait pas, que personne ne me suivrait, et la maison de disque a dit banco. Alors là aussi… peut-être

Tu continues d’écrire pour les autres ?

J.B. – Oui j’ai écrit pour Miossec, pour Enzo Enzo. Pour Kent, à mon grand dam, on ne fait pas grand chose. Nous sommes très amis, toujours d’accord pour aller boire un coup. Mais, coté travail, c’est vrai (rires), on est un peu fainéant. Cela presque deux ans qu’on n’a pas écrit ensemble. En fait, pour l’instant, j’écris beaucoup pour moi, égoïstement.

Tu es un fan de musique de film aussi ?

J.B. – Oui. Pour des longs métrages comme “Petite misère” avec Trintignant et Dupontel. J’ai aussi illustré fait deux ou trois téléfilms. Comme le « SOS 18 », une sorte de Navarro chez les Pompiers sur France 3 réalisé par Malater. C’est chouette. Tu te mets au service d’un autre ego. C’est une bonne leçon d’humilité. Cela te remet la tête sur les épaules. Je suis fan aussi de BD. On vient de me demander de faire Kiri le clown. Tu sais, çà fait comme çà (il chantonne l’air). Et bien (il trépigne), ils le refont. (Se parodiant) « ils ont appelé oncle Jeff et je crois qu’oncle Jeff va dire oui ».

Et pourquoi pas passer de l’autre coté, tu ferais un excellent acteur ?

J.B. – Pourquoi pas un jour si on me le propose. Mais, contrairement à l’adage je préfère mettre tous mes œufs dans le même panier, je préfère tout sacrifier à çà. C’est un risque, c’est la moindre de choses qu’on doive au public aussi.

Propos recueillis par Nicolas Gros-Verheyde, à Bruxelles pour RFi Musique

> L’album « T’es rien ou t’es quelqu’un » est dans les bacs des disquaires. Jeff Bodart sera en tournée en France à l’automne. A Paris, à la Maroquinerie, les 4 et 5 novembre

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).