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L'Europe politique et de la défense (par Nicolas Gros-Verheyde)

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[Dossier n°01] L’Europe face aux premiers soubresauts yougoslaves (1991-1992)

(B2) Quand arrivent les premiers évènements en Yougoslavie, l'Europe a la tête ailleurs. Le mur de Berlin vient de tomber. La réunification allemande est à l'ordre du jour. L'Europe s'approfondit : les accords de Schengen sont signés. Les fondements de l'Union économique monétaire sont posés lors d'une nouvelle Conférence intergouvernementale. Les États membres se divisent sur l'Europe politique. La crise du Golfe fait rage.

Jacques Delors (Commission européenne), G. de Michelis (présidence italienne), J. Poos (Luxembourg), H.D. Gensher (Allemagne), R. Dumas (France) à la réunion des ministres des affaires étrangères le 16 décembre 1991 (crédit : Commission européenne / Archives B2)

Les préliminaires

Les 5-6 octobre 1988. Incidents à Novi-Sad en Voïvodine, après une manifestation en faveur du resserrement des liens avec la Serbie. La direction politique de la province démissionne. Une équipe proche du pouvoir serbe de Milosevic est installée.

Les 8-9 octobre 1988. Violentes manifestations à Titograd, au Monténégro, contre la baisse du niveau de vie. Le gouvernement de la République démissionne dans la nuit du 25 au 26 octobre.

Du 17 au 21 novembre 1988. Manifestations au Kosovo.

Le 19 novembre 1988. Manifestation d’un million de Serbes à Belgrade pour soutenir la minorité serbe du Kosovo.

Le 11 janvier 1989. La direction du Monténégro démissionne sous la pression de manifestants. Un nouveau pouvoir s’installe proche du pouvoir serbe de Milosevic. Création en Slovénie de l’Union des démocrates slovènes qui milite pour une véritable démocratie parlementaire.

Le 19 janvier 1989. Nomination du Croate Ante Markovic comme Premier ministre yougoslave. Il plaide en faveur d’un socialisme nouveau et pour une économie de marché.

Le 28 juin 1989. Fête du nationalisme serbe pour le 600e anniversaire de la bataille du Champ des Merles contre les Turcs. Un million de Serbes, soit le cinquième de la population adulte, font un triomphe à Milosevic lorsqu'il annonce un programme de «reconquête» du Kosovo.

Les 8-9 décembre 1989. Le Conseil européen réuni à Strasbourg (présidence française de la CEE oblige) constate que la majorité nécessaire est réunie (le Royaume-Uni est contre) pour convoquer une conférence intergouvernementale pour modifier le Traité, avant la fin 1990, en vue des étapes finales de l'Union économique et monétaire. L'heure est à l'élargissement vers l'Est. Il déclare suivre « avec attention et intérêt les réformes importantes prévues en Yougoslavie et confirme l'engagement de la Communauté d'examiner - dès conclusion de l'accord avec le Fonds monétaire - les mesures supplémentaires de soutien du programme d'assainissement de la situation économique et financière du pays ».

La Yougoslavie vient plaider sa cause à Bruxelles

Le 8 mars 1990. Ante Markovic, premier ministre yougoslave, vient à Bruxelles, plaider auprès de Jacques Delors, pour une aide accrue de la CEE, selon le quotidien Le Monde.

Le 28 avril 1990. Le Conseil européen spécial de Dublin est le sommet de l’euphorie. Les avancées démocratiques en Europe centrale et l’unification allemande dominent. Les Douze décident d’étendre à cinq pays – dont la Yougoslavie (avec la RDA, la Tchécoslovaquie, la Roumanie et la Bulgarie) – les mesures prises par le groupe des 24 (groupe des ministres des finances de la CEE + AELE + USA, Canada, Turquie, Australie, Nouvelle-Zélande, Japon).

Le 13 mai 1990. Au stade Maksimir de Zagreb, des incidents violents éclatent entre supporters du Dynamo de Zagreb et de l’Étoile Rouge de Belgrade. Incidents sciemment provoqués.

Le 18 juin 1990. Le Conseil des Ministres des Affaires générales des CE prend acte de la communication de la Commission sur l’avenir des relations entre la Communauté et la Yougoslavie, présentée par le commissaire européen Abel Matutes.

Le 26 juin 1990. Suspension du gouvernement et du Parlement du Kosovo. Les députés du Kosovo continuent de se réunir clandestinement. Ils déclarent la « souveraineté » du Kosovo.

Le 2 juillet 1990. Les députés albanais du Kosovo (chassés du Parlement) publient une Déclaration constitutionnelle, faisant du Kosovo une République, à égalité avec les autres. La Slovénie adopte une déclaration de souveraineté.

Le 25 juillet 1990. L’Assemblée nationale croate proclame la souveraineté de Croatie. Le même jour, dans la localité de Srb en Croatie, un rassemblement des Serbes de Croatie adopte une Déclaration sur la souveraineté et l'autonomie du peuple serbe et un Conseil national serbe, chargé de représenter les Serbes de Croatie, est créé.

Le  2 août 1990. Crise du Golfe. Début de l'invasion du Koweït par l'Irak.

Le 17 août 1990. Le soulèvement serbe commence en Croatie, après une attaque des forces spéciales de la police croate sur le poste de police de Benkovac contrôlé par les Serbes, ces derniers saisissent des armes des policiers de réserve et élèvent des barricades sur les routes.

Du 19 août au 2 septembre 1990. Les Serbes se prononcent, peu après, à 99 % des voix (!) pour leur séparation de la Croatie.

Le 3 septembre 1990. Au Kosovo, c’est la grève générale et le début du renvoi de la plupart des Albanais des postes de l’administration (75.000 personnes seront chassées en un an de leur poste après cette grève).

Le 7 septembre 1990. Après un référendum clandestin, le Kosovo promulgué adopte, dans le cadre yougoslave, la Constitution de « sa République » promis à devenir la 7e République fédérative socialiste de Yougoslavie (non reconnue par les Serbes). Une proclamation symbolique.

Le 11-12 septembre 1990. En Bosnie-Herzégovine, commencent des troubles interethniques. L’état d’urgence est proclamé.

Le 28 septembre 1990. La Serbie abolit le statut d’autonomie de sa province du Kosovo. Le parlement de la province avait déjà été dissous début juillet.

Le mardi 2 octobre 1990. L'Union de l'Europe occidentale (UEO) réfléchit à la création d'une « force d'action rapide européenne » qui pourrait intervenir militairement hors de la zone d'opération de l'OTAN, indique, à Bruxelles, le Belge Armand De Decker, président de la commission politique de l'Assemblée de l'UEO.

Le vendredi 5 octobre 1990. Les présidents slovène et croate proposent la restructuration de la Yougoslavie sur un modèle « confédéral », composée de six Républiques souveraines, dotées d’une monnaie, d’une armée et d’une représentation diplomatique propres. L’armée fédérale yougoslave investit le quartier général de la défense territoriale de Slovénie, à Ljubljana, après le refus du gouvernement slovène de placer sa défense sous le commandement de l’armée yougoslave.

Les samedi/dimanche 6 et 7 octobre 1990. A Asolo / Venise (Italie), lors de leur réunion informelle, les ministres des Affaires étrangères parlent de politique étrangère commune. Ils établissent une liste de sujets d'intérêt commun.

Les samedi/dimanche 27 et 28 octobre 1990. Un Conseil européen spécial se réunit à Rome pour finaliser le lancement des deux conférences intergouvernementales (Union économique et monétaire et Union politique). Les Douze se prononcent pour le maintien de l’unité et de l’intégralité territoriale de la Yougoslavie. Mais c’est surtout la crise du Golfe et la guerre Irak-Koweit qui inquiètent.

Le 18 novembre 1990. Les premières élections libres en Bosnie-Herzégovine, sont marquées par la victoire des partis nationalistes. Alija Izetbegovic est nommé président de la Présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine.

Le 15 décembre 1990. Le Conseil européen de Rome lance les deux Conférences intergouvernementales (CIG).

Le 21 décembre 1990. La Krajina se déclare autonome. Le 22 décembre, le Parlement de Croatie proclame une nouvelle constitution, avec le droit de faire sécession et la la modification du statut de la communauté serbe en « minorité nationale ». Le 23 décembre, un référendum en Slovénie donne à une large majorité (95%) le retrait de la fédération yougoslave (RFSY). L'indépendance est proclamée le 26 décembre.

Février 1991. Une délégation du Parlement européen se rend en Yougoslavie et au Kosovo

Le 20 mars 1991. Les ministres des Affaires étrangères discutent informellement à Montdorf-les-bains de politique étrangère et de sécurité et notamment du rapport entre l'UEO et l'Union politique.

Le 31 mars 1991. Incident au parc national des lacs de Plitvice. Des policiers croates en bus tombent dans une embuscade tendue par les serbo-croates. 2 tués : un policier croate, un serbo-croate, et 20 blessés.

Avril 1991. La Troïka européenne se rend à Belgrade pour prôner la dialogue et le non recours à la force.

8-9 avril 1991 : Un Conseil européen extraordinaire est réuni à Luxembourg pour traiter des problèmes du Golfe et du Moyen-Orient. En marge de ce Conseil, les ministres des Affaires étrangères tiennent une réunion informelle de l'UEO.

17 avril 1991 : James Baker remet aux Douze une note en cinq points sur la défense de l'Europe.

27-28 avril 1991 : réunion des Ministres des affaires étrangères autour du processus de paix au Proche-Orient et la protection des populations kurdes d’Irak ; et de la mise en place d’une politique de défense commune.

Les clivages semblent bien rester entiers. Trois pays membres _ le Royaume-Uni, les Pays-Bas et le Portugal, _ sans nier l'opportunité de renforcer le pilier européen de l'Alliance et en se prononçant en faveur d'une force d'intervention européenne susceptible d'intervenir hors de la zone de l'OTAN, estiment que les principales décisions ayant trait à la défense de l'Europe doivent continuer à être prises au sein de l'OTAN et de sa structure de commandement intégrée. Cela correspond pour l'essentiel à ce que demande M. James Baker.

Huit Etats membres (l'Irlande en raison de sa neutralité se tient délibérément en marge de la discussion), en soulignant qu'ils ne cherchent d'aucune manière à affaiblir l'Alliance atlantique, revendiquent plus d'autonomie pour la Communauté ; la France, vite suspectée d'anti-américanisme par ses partenaires, le fait, c'est vrai, avec une particulière netteté.

Lors d'une précédente réunion, les ministres avaient chargé leurs directeurs politiques de réfléchir sur les liens établis entre l'UEO (Union de l'Europe occidentale) et la Communauté, d'une part, l'UEO et l'Alliance atlantique d'autre part. L'UEO devait-elle jouer le rôle d'une simple passerelle entre l'union politique des Douze et l'Alliance (position du Royaume-Uni, des Pays-Bas et du Portugal), ou bien, mettant en oeuvre les orientations du Conseil européen, apparaître davantage comme le porte-parole de la Communauté (position des huit autres Etats membres) ? Dans le rapport qu'ils ont présenté aux Douze, les directeurs politiques, en présence de ces deux thèses, se sont livrés à un exercice d'équilibre jugé apparemment par les ministres d'un intérêt limité, la principale originalité de leur document consistant à préconiser le déménagement d'un secrétariat de l'UEO de Londres à Bruxelles ! " Nous devons d'abord traiter le problème de fond : les Européens veulent-ils bâtir entre eux une communauté de défense ? Il faut recentrer notre discussion sur les contours que nous voulons donner à l'union politique. L'organisation des relations de l'UEO avec l'Alliance atlantique ne constitue pas le problème central ", a commenté M. Roland Dumas. Comme pour illustrer ce changement de tactique, les ministres ont chargé leurs représentants personnels, ceux-là mêmes qui rédigent le traité sur l'union politique, de reprendre en main l'examen du dossier " Sécurité ", lequel, selon M. Jacques Delors, apparaît d'ores et déjà comme un des principaux points de l'ordre du jour du Conseil européen de la fin juin.

Mai 1991

Le 2 mai 1991 : Conflit armé entre les habitants de Borovo Selo et des unités de la police croate. Une douzaine de policiers croates « tombent » dans une « embuscade » à Boroso Selo. Les cadavres seront retrouvés plus tard.

12 mai 1991 ? référendum en Krajina pour l’autonomie.

15 mai 1991 : le Croate Stipe Mesic n’est pas élu à la tête de la présidence collégiale. Les représentants de Serbie, Monténégro, Voïvodine, Kosovo refusent la rotation.

Le Premier ministre français Michel Rocard démissionne.

16 mai 1991 : l'Assemblée de la Région autonome serbe de Krajina proclame le rattachement de la Krajina à la République de Serbie.

19 mai 1991 : référendum en Croatie. Près de 95% des votes se prononcent pour un Etat souverain et indépendant. Si la participation atteint 70%, les Serbes de Croatie (environ 10% de la population) le boycottent.

21 mai 1991 : Contribution de la Commission européenne sur la PESC.

29 mai 1991 : proclamation de l’indépendance de la Croatie.

Juin 1991 : le début de la guerre

Lundi 3 juin 1991 : réunion des Ministres des affaires étrangères à Dresde consacrée au futur traité d’Union politique. Les « fédéralistes » s’opposent aux « unionistes ».

Les premiers, au nom de la cohérence et de l'efficacité de l'action collective, plaident pour un modèle communautaire unique. Il s'agit de la Commission européenne ainsi que six pays (Pays-Bas, Belgique, Italie, Portugal, Grèce et Allemagne dans une moindre mesure). Les seconds, réaliste, constatant que les Douze ne pourront traiter de la politique étrangère selon les mêmes procédures que pour la politique monétaire ou agricole, militent pour un nouveau traité plus " décentralisé " où, une fois les objectifs communs rappelés, seraient abordés séparément, selon leurs mérites propres et avec des règles pouvant varier, écrit Philippe Lemaitre pour Le Monde. La présidence luxembourgeoise propose un compromis entre ces deux visions : un traité avec trois " piliers " distincts : 1) le champ d'application traditionnel de la Communauté et l'union économique et monétaire ; 2) la coopération intergouvernementale en matière judiciaire et policière ; 3) la politique étrangère et de sécurité commune. NB : C'est ce plan qui donnera lieu au Traité de Maastricht accolé au Traité de Rome et qui perdurera jusqu'au Traité de Lisbonne.

Mardi 18 juin 1991 : la présidence luxembourgeoise rend public ses deux projets de Traité sur l'Union politique et sur l'Union économique et monétaire.

Mercredi 19 juin 1991 : Ouverture de la première session du conseil de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) à Berlin, en Allemagne.

Vendredi 21 juin 1991 : en visite à Belgrade, le secrétaire d'Etat américain, James Baker, " déconseille " aux républiques d'engager " toute action unilatérale ". Il annonce que les Etats-Unis « ne reconnaîtront pas la Slovénie en tant qu'Etat indépendant ».

Dimanche 23 juin 1991 : Réunis informellement à Dresde (Allemagne), les ministres des Affaires étrangères décident de ne pas reconnaître l’indépendance de la Slovénie et de la Croatie, si les deux républiques veulent quitter la Yougoslavie.

— Ils discutent de la structure et de la forme du Traité sur l'Union politique. Il est admis que le chapô de l'accord évoquera le but final de l'Union politique.

Lundi 24 juin 1991 : le Parlement fédéral yougoslave rejette la déclaration de " dissociation " de la Slovénie. Ante Markovic, premier ministre fédéral, propose aux six républiques de la fédération une déclaration garantissant les frontières extérieures et intérieures de la Yougoslavie.

— signature du troisième protocole financier (807 Mecus) avec la Yougoslavie. Il prévoit l'octroi, pendant une période expirant le 30 juin 1996, de prêts de la Banque Européenne d'Investissement pour un montant global de 730 Millions Ecus. La majeure partie de ces prêts (± 580 millions Ecus), sera utilisée pour le financement de projets concernant les infrastructures de transport, la partie restante (± 150 millions), sera utilisée pour le financement d'autres projets de développement, en particulier dans le secteur industriel, l'environnement, les télécommunications et l'énergie. La Communauté peut engager, sur ses ressources budgétaires, un montant de 77 millions d'ECUS, en vue de bonifier de deux points les prêts de la Banque destinés aux infrastructures de transport.

— un accord de transit est signé entre la Communauté européenne et la Yougoslavie qui comporte notamment un accroissement annuel de 5% des autorisations de transit pour les camions communautaires à travers la Yougoslavie et des dispositions permettant de simplifier les formalités de transit pour les transporteurs communautaires.

Mardi 25 juin 1991 : proclamation solennelle de l’indépendance de la Slovénie et de la Croatie (24 heures avant la date prévue). Le Parlement fédéral yougoslave demande au gouvernement et à l'armée d'" empêcher le dépeçage de la Yougoslavie et la modification de ses frontières. Dans la nuit, le gouvernement fédéral rejette la déclaration et décide que le contrôle des frontières de la Yougoslavie sera assurée par la police fédérale et l’armée yougoslave.

Mercredi 26 juin 1991 : heurts entre la police croate et des civils serbes armés à Glina (Croatie), au sud d'Osijek, ville peuplée en majorité (deux-tiers) de Serbes. Les conflits se poursuivent dans la journée de jeudi, l'armée fédérale intervient et prend le contrôle de la ville. Au moins 4 morts et une quinzaine de blessés.

- blocus de l'espace aérien slovène par les autorités de Belgrade. Les unités de l'armée fédérale stationnées en Slovénie sont placées en état d'alerte et prennent position le long des frontières de la république avec l'Italie, l'Autriche et la Hongrie.

- Washington, Londres, Paris, Bonn et de nombreuses capitales regrettent la proclamation d'indépendance des deux républiques.

• Jeu 27 juin 1991 (jusqu’au 30 juin) : Des affrontements armés éclatent entre l'Armée populaire yougoslave, et la Défense territoriale slovène à proximité des frontières de cette république. Début de l’intervention armée fédérale yougoslave en Slovénie, prise de contrôle de l’aéroport de Ljubljana-Brnik. Ante Markovic, propose à la Slovénie et à la Croatie de " suspendre " pour trois mois leur décision d'indépendance.

Dans la matinée du jeudi 27 juin, le commandant de la 5e région militaire, le général Konrad Kolsek, avait informé le gouvernement de Slovénie que l'armée yougoslave avait reçu l'ordre de reprendre par tous les moyens le contrôle des frontières qui séparent la Slovénie de l'Autriche, de l'Italie et de la Hongrie. Le ministère fédéral de la défense avait en effet annoncé que l'armée "exécutera ses obligations résolument et jusqu'au bout quels que soient l'envergure et le caractère des résistances possibles". Les forces fédérales avaient donc été autorisées, par le gouvernement, à passer aux actes et à forcer les barrages routiers établis mercredi par la population dans les zones frontalières. Dès l'aube, de nouvelles unités avaient été déployées à travers la Slovénie. Deux bataillons, quarante chars et blindés quittaient la caserne de Vrhnika, au sud de Ljubljana, pour se diriger vers l'aéroport de la capitale.

Vers 19 h 30, une forte explosion retentit dans Ljubljana. La défense territoriale slovène (qui compte au total environ 12 000 hommes) venait d'abattre un hélicoptère qui survolait un quartier résidentiel de la capitale, proche du Parlement. Au sol, des pains étaient mêlés aux débris de l'appareil qui, semble-t-il, était en mission de ravitaillement.

Selon les sources slovènes, l'armée fédérale contrôlait jeudi soir douze postes frontières, alors que les forces armées slovènes en gardaient toujours quinze. Les combats se sont poursuivis pendant la nuit faisant de nouvelles victimes notamment à Maribor et à Poljane, près de l'Autriche. Les affrontements restent concentrés aux zones frontalières. La population civile ne semble pas avoir été touchée. (Le Monde 29 juin, Flor. Hartmann).

Jeudi 27 juin 1991 : l'armée fédérale yougoslave occupe l'aéroport de Ljubljana-Brnikk à une trentaine de kilomètres et bloque les postes-frontière. Elle annonce qu'elle " ira jusqu'au bout " dans la défense de l'intégrité territoriale de la Yougoslavie. Le premier ministre fédéral, Ante Markovic, propose à la Slovénie et à la Croatie de " suspendre " pour trois mois leur décision d'indépendance. Le gouvernement estime que la situation est extrêmement critique et risque de dégénérer. Les combats entre l'armée yougoslave et la défense territoriale slovène ont fait " plus de cent morts et blessés ", selon le ministre slovène de la défense, Janez Jansa, qui précise que six hélicoptères de l'armée yougoslave ont été abattus (deux selon le gouvernement fédéral) et 15 chars détruits. (Le Monde 30 juin, Flor. Hartmann).

Jeudi 27 juin 1991 : la commission politique du Parlement européen réclame la tenue immédiate d'une réunion des Ministres des affaires étrangères des trente-cinq pays de la Conférence pour la sécurité et la coopération en Europe (CSCE), pour discuter de la crise en Yougoslavie.

Vendredi 28 et 29 juin 1991 : Conseil européen de Luxembourg. Envoi de la Troïka de trois Ministres (Italie, Luxembourg, Pays-Bas). Les Douze décident de geler toute coopération financière, communautaire et bilatérale, avec la Yougoslavie et de saisir le mécanisme de consultation d'urgence de la CSCE en cas de crise en Europe.

— Mise au point lors du sommet de Berlin, cette procédure permet à la CSCE d'enquêter sur les affaires intérieures d'un pays membre si au moins treize pays participants sont d'accord. Première fois que le mécanisme est mis en œuvre. Seul problème : la présidence revient à la Yougoslavie, Belgrade devrait alors passer son tour, au profit de l'Albanie.

— L'Union de l'Europe occidentale (UEO) fait savoir dans un communiqué, après une réunion de ses ministres de la défense et des affaires étrangères jeudi, qu'elle regrette les proclamations d'indépendance de la Croatie et de la Slovénie.

— L'OTAN se déclare " vivement préoccupée " par les événements en Yougoslavie. La commission politique de l'OTAN, composée de hauts responsables et de diplomates des seize pays membres, s'est réunie en session extraordinaire pour évoquer cette question.

Sur la Slovénie et la Croatie, le secrétaire général de l'ONU, M. Javier Perez de Cuellar, a répondu : " Vous devez savoir que, pour les Nations unies, il s'agit d'une affaire intérieure et qu'à ce titre je ne peux la commenter. ".

Les Etats-Unis demandent jeudi à toutes les parties d'éviter les violences. " Nous sommes préoccupés ", a déclaré le porte-parole de la Maison Blanche, M. Marlin Fitzwater. " Le danger d'un affrontement d'envergure s'est accru de façon importante, la Yougoslavie est un baril de poudre ", a précisé Mme Margaret Tutwiler. (AFP, Reuters cité par Le Monde) >>.

Conclusions (extraits) « Le Conseil européen a examiné l'évolution de la situation en Yougoslavie. Il a entendu le rapport de la Troïka ministérielle à son retour de Belgrade et de Zagreb et a marqué sa satisfaction sur les résultats de cette mission. Le Conseil européen demeure cependant préoccupé par la situation dans ce pays et souhaite que les instances européennes restent saisies et suivent attentivement l'évolution de la situation. Il a pris note de ce que le Luxembourg a déclenché le mécanisme d'urgence dans le cadre de la CSCE au regard de l'extrême gravité de la situation en Yougoslavie. ».

Les Douze confirment la nécessité de poursuivre en parallèle les travaux des deux conférences intergouvernementales, portant, l'une, sur l'union économique et monétaire et, l'autre, sur les aspects de l'union politique, sur la base du projet de traité élaboré par la présidence. Le Conseil européen de Luxembourg dégage des orientations générales pour la conférence intergouvernementale sur l'Union politique (politique étrangère et de sécurité commune, légitimité démocratique, politique sociale, cohésion économique et sociale). Il marque aussi son accord "sur les objectifs qui sont à la base" d'une proposition allemande sur les affaires intérieures et judiciaires. Le Conseil européen constate par ailleurs "de larges plages d'accord sur les éléments fondamentaux de l'UEM" et souligne la nécessité "de réaliser dès à présent des progrès satisfaisants et durables dans la convergence économique et monétaire".

Ven 28 juin. Le gouvernement fédéral exige " la cessation immédiate de l'usage des armes " sur tout le territoire. De violents combats se poursuivent néanmoins.

Les aéroports de Ljubljana et de Maribor sont bombardés dans la matinée. Les raids aériens se poursuivent pendant la journée. Le bombardement d'une colonne de véhicules sur l'autoroute de Ljubljana-Zagreb aurait provoqué la mort de huit camionneurs roumains et bulgares dont les véhicules avaient été bloqués dans les barrages. Selon un bilan officiel publié à Belgrade, cinq officiers et cinq soldats de l'armée fédérale ont été tués et vingt-sept autres blessés au cours des combats avec la défense territoriale slovène. (Le Monde 30 juin).

Les ministres slovènes de l'intérieur et de la défense, annoncent que la journée de vendredi avait été sanglante et que nombreux de bâtiments et de routes avaient été touchés. " Le gouvernement slovène a désigné une commission pour évaluer les dégâts. Nous comptons demander des dommages de guerre ", ont-il déclaré.

Ils ont aussi également précisé que l'armée slovène avait fait prisonniers plus de cinq cents soldats et policiers fédéraux et que quelque quatre cents recrues, dont vingt officiers, avaient déserté l'armée yougoslave et s'étaient rendus aux autorités slovènes. Janez Jansa, ministre de la défense, a indiqué que la jeune armée slovène avait été " très efficace ". Equipée d'engins antichars, elle aurait détruit un grand nombre de tanks yougoslaves. " Puisque l'agresseur s'est attaqué à des objectifs civils, nous avons entrepris une nouvelle offensive. L'armée slovène s'est emparé d'entrepôts militaires, se procurant ainsi des armes ", a ajouté M. Jansa.

A 16 heures, un communiqué officiel émanant des autorités militaires de Belgrade annonçait un cessez-le-feu immédiat. Les combats se poursuivaient néanmoins avec la même violence. A Murska-Sobota, près de la frontière hongroise, l'aviation fédérale bombardait les barricades qui bloquaient l'accès à la caserne. A Medvedjek, à une trentaine de kilomètres à l'est de Ljubljana, alors que l'armée fédérale tentait de détruire les barrages routiers, une maison a explosé et plusieurs blindés ont été anéantis par les unités slovènes. A Ig, l'armée fédérale s'est emparée du centre d'entraînement militaire slovène.

En fin de soirée, un accord de cessez-le-feu intervient entre la Slovénie et l'armée yougoslave. Le président slovène, M. Milan Kucan, et le ministre yougoslave de la défense, le général Veljko Kadijevic, annoncent un arrêt des hostilités à partir de vendredi 21 heures. (Le Monde 30 juin, Flor. Hartmann).

• Vendredi 28 - Dim 30 juin 1991 : délégation de la Troïka (Poos, de Michelis et Van den Broek) et de la Commission européenne à Zagreb et Belgrade.

Samedi 29 juin 1991 : Accord de cessez-le-feu entre la Présidence et le gouvernement slovènes d'une part, et le gouvernement fédéral d'autre part ; et suspension pour trois mois des déclarations d’indépendance croate et slovène.

La situation se détend sur le terrain rapporte le Monde. Les affrontements entre l'armée yougoslave et les forces slovènes se sont poursuivis dans la nuit de vendredi à samedi, malgré l'accord de cessez-le-feu annoncé dans la soirée, faisant trois morts et une quinzaine de blessés au poste frontière avec l'Italie de Rozna Dolina.

Selon un communiqué du ministère yougoslave de la défense, l'armée a cessé d'intervenir à 13 heures GMT " après avoir pris le contrôle " des frontières et avoir confié celles-ci à la police et aux douaniers fédéraux.

" Nous avons rempli notre mission " en stoppant le " processus de crise " s'est félicité le chef de la diplomatie luxembourgeoise M. Jacques Poos. La Troïka affirme également avoir obtenu un accord de toutes les parties sur un retour à la rotation normale de la présidence fédérale à Belgrade, toujours bloquée par un véto serbe qui empêche le représentant de la Croatie M. Stipe Mecic d'assurer cette fonction. M. Slobodan Milosevic a en tout cas promis de " reconsidérer sa position ", selon M. Poos. Cet accord global est effectif depuis samedi matin. _ (AFP, Reuter, AP. LM 30/6/1991).

Le 30 juin, elle obtient la nomination de Stipe Mesic à la présidence collégiale. Le Premier Ministre yougoslave, Ante Markovic présent à Ljubljana le dimanche après-midi 30 juin pour négocier un dénouement pacifique de la crise avec le chef du gouvernement slovène, Lojze Peterle.

A l’issue de 4 heures d’entretien, un compromis sur quatre des cinq questions controversées. Le chef du gouvernement slovène a précisé que " les frontières de la Slovénie étaient celles d'un Etat souverain " et que cela n'était pas négociable. Il a ensuite souligné qu'il était heureux de savoir que M. Markovic reconnaissait désormais la souveraineté des Républiques yougoslaves. En ce qui concerne l'armée fédérale, M. Peterle a affirmé qu' " il était évident que le gouvernement yougoslave avait laissé le génie s'échapper de la bouteille et qu'il ne pouvait plus le contrôler ".

M. Markovic a affirmé ne pas avoir été informé en temps voulu de toutes les décisions de l'armée fédérale. Prenant connaissance, samedi 29 juin, des intentions de l'armée, et notamment, de l'ordre de mobilisation de nouvelles troupes, il a immédiatement agi pour empêcher un nouveau bain de sang. Il a laissé entendre qu'il serait intervenu en mettant en garde l'armée sur les conséquences dramatiques de telles mesures " qui provoqueraient la libanisation de la Yougoslavie ". Il aurait alors proposé aux autorités slovènes de venir à Ljubljana pour négocier (LM 2 juillet, Florence Hartmann).

Le compromis intervenu porte sur quatre points : l'interruption des hostilités, le moratoire de trois mois (sans préciser s'il porte sur l'ensemble de la déclaration d'indépendance de la Slovénie ou seulement sur la poursuite du processus d'" émancipation ") et l'élection de M. Stipe Mesic à la tête de la présidence collégiale. De plus, à la demande de la Slovénie, les troupes fédérales devaient se retirer, dès lundi, dans les casernes. Reste un cinquième point de divergence concerne le problème des frontières.

Les Européens (Poos, De Michelis, Van Den Broek) obtiennent, dans la nuit du 28 au 29 juin, l’accord de Markovic et Milosevic sur trois points :

- l’acceptation d'un cessez-le-feu accompagné d'un retour des forces armées dans les casernes ;

- la suspension de la mise en œuvre des déclarations d'indépendance pour une période de trois mois ;

- la restauration de l'ordre constitutionnel par la désignation à bref délai d'un Président et d'un Vice-Président à la tête de la Présidence collégiale. (Lettre de Poos à Markovic).

voir Marie Pierre Subtil « Pour un coup d’essai, ce fut un coup de maître » « Pour la première fois, vendredi 28 juin, les Douze ont montré qu’ils pouvaient réagir vite et de manière efficace » (Le Monde 1er juillet 1991).

Dimanche 30 juin 1991 : lettre de Poos à Ante Markovic, Slobodan Milosevic, Milan Kucan et Franjo Tudjman menaçant en cas de non-respect des trois mesures prévues lors de la rencontre de la troïka le 28 juin, du « gel immédiat de l'ensemble des aides de la communauté et de ses Etats membres destinées à la Yougoslavie ».

Juillet 1991

Lundi 1er juillet 1991 : présidence néerlandaise de l’UE.

Mardi 2 juillet 1991 : reprise des combats en Slovénie entre armée fédérale yougoslave et unités de défense territoriale slovènes.

Mercredi 3 juillet 1991 : les Américains s’en remettent aux Européens pour la gestion de crise et alignent leur position sur ceux-ci. (LM 5/07/1991).

Le secrétaire d'Etat américain, M. James Baker, confirme implicitement l'évolution de l'attitude de Washington sur la question Yougoslave, en proposant que les Etats-Unis et la CEE suspendent leur aide à la Yougoslavie et adoptent un embargo sur les ventes d'armes à Belgrade si l'armée échappait au contrôle des autorités civiles. Le maintien de l'intégrité territoriale a en effet cessé d'être la première préoccupation de Washington, qui craint à présent une intervention d'envergure de l'armée yougoslave échappant au contrôle de l'autorité de Belgrade.

Les Etats-Unis semblent s'en remettre, pour l'instant, aux initiatives européennes pour tenter de trouver une solution à la crise yougoslave. Dans sa lettre adressée, mercredi 3 juillet, au président yougoslave M. Stipe Mesic, le président Bush ne faisait déjà plus mention de la nécessité de défendre l'unité du pays, mais insistait sur l'obligation de rétablir le contrôle des civils sur les militaires. Plus tard le département d'Etat indiquait que les Etats-Unis pourraient accepter l'indépendance des Républiques sécessionnistes si elle résultait d'une négociation pacifique.

Ces déclarations étaient différentes tant dans la forme que sur le fond des propos tenus à Belgrade, le 21 juin, par M. Baker, qui alors soulignait les dangers d'une désintégration de la Yougoslavie, et prenait pratiquement parti pour le gouvernement de Belgrade. Ces déclarations avaient été vigoureusement critiquées par les éléments de l'aile droite républicaine, favorables à la sécession de la Croatie et de la Slovénie. Ils accusaient le secrétaire d'Etat d'avoir encouragé Belgrade à s'engager dans une action armée.

M. Baker, entouré de MM. Van Den Broek et Andriessen, représentants de la Communauté européenne, a vigoureusement rejeté mercredi cette accusation. Son adjoint, M. Eagleburger déclarait en privé que la position américaine ne s'écartait pas de celle prise par la France et la Grande-Bretagne. Dans leur déclaration conjointe M. Baker et les représentants de la Communauté ont souligné que les Etats-Unis et les Européens doivent faire un effort pour convaincre les forces yougoslaves de rentrer dans leurs casernes. " Nous condamnons l'emploi de la force et le rejet du contrôle civil par les militaires ", indiquait le document. M. Baker a en outre précisé que les Etats-Unis et les Douze envisageaient un embargo sur les livraisons d'armes et l'arrêt de l'assistance à la Yougoslavie.

Quant à l'éventuelle initiative de l'Allemagne et de l'Autriche pour une commission nationale des Nations unies, les dirigeants américains déclarent ne pas s'y opposer. Néanmoins, ils estiment que saisir les Nations unies avant que la CSCE n'ait eu la possibilité de démontrer ce qu'elle pouvait faire dans cette crise compliquerait, sinon empêcherait, la recherche d'une solution. " Les Etats-Unis n'ont aucun rôle à jouer en Yougoslavie, sauf si les efforts des Européens échouaient ", a déclaré M. Pickering, ambassadeur américain auprès des Nations unies. (Le Monde 5 juillet Pierre Henri).

Vendredi 5 juillet 1991 : la CE, réunie à la Haye, décide d’un embargo sur le matériel militaire et la suspension de leur aide économique à l’ensemble de la Yougoslavie.

Dimanche 7 juillet 1991 ? : retrait de l’armée fédérale yougoslave de Slovénie.

Lundi 8 juillet 1991 accord de Brioni sous le patronage de la CE, prévoyant le départ de Slovénie des troupes fédérales. Déclaration commune sur le règlement pacifique de la crise yougoslave.

Il prévoit un accord de cessez-le-feu, le moratoire de trois mois sur les déclarations d’indépendance, l’élection de Stipe Mesic (croate) la présidence yougoslave et la formation d’une commission européenne chargée de surveiller le respect des engagements. Jacques Delors déclare que la CE « n’exclut pas la notion d’indépendance pour la Slovénie et la Croatie » mais souhaite avant tout l’extension de la violence dans la région. (source Le Monde).

Mercredi 10 juillet 1991 : vote d’une résolution au Parlement européen condamnant le recours à la force de l’armée yougoslave.

« les Républiques constitutives et les provinces autonomes de Yougoslavie ont le droit de déterminer leur avenir (...) mais chacune a le devoir absolu de n'user que des moyens pacifiques et démocratiques pour parvenir à des changements constitutionnels »

• 10 juillet 1991 : réunion des Ministres des affaires étrangères à La Haye arrête le mandat de la mission de surveillance du cessez-le-feu (observateurs).

La mission sera composée de trente à cinquante personnes. Ce sera une mission civile — en aucun cas une force de maintien de la paix, — même si certains de ses membres, compte tenu du travail à accomplir, auront une expérience militaire. Au départ, seuls y participeront des représentants de la CEE. ….

Les Douze entendent apparemment interpréter largement leur tâche de médiation, de manière que l'ensemble des acteurs, y compris l'armée fédérale, se sentent liés par les accords de Brioni. Parrains de la future négociation sur l'avenir du pays, ils veulent encourager son lancement puis aider son déroulement par tous les moyens disponibles.

Ils ont aussi décidé de créer un groupe permanent, une "task force " rassemblant juristes, économistes, experts des questions de sécurité, qui serait mise à la disposition des Yougoslaves. M. Jacques Delors, le président de la Commission européenne, a également indiqué son intention de créer sous sa responsabilité une cellule spécialement chargée d'assister le gouvernement yougoslave dans cette phase de la négociation. (source Le Monde 12 juillet Philippe Lemaitre).

15-17 juillet 1991 : le sommet du G7 à Londres prend acte des initiatives européennes. Et lui apporte son plein soutien. Preuve que la CE est, dans ce domaine, totalement maître des initiatives. Mais l’attention des grands est davantage tournée vers le Golfe, l’Iraq et le Moyen-Orient que la Yougoslavie. Les participants décident d'organiser une rencontre annuelle avec l'Union soviétique et définissent un plan de soutien à ce pays. Ils s'engagent aussi à ouvrir leurs marchés aux produits et aux services en provenance des pays d'Europe orientale et se déclarent résolus à faire aboutir les négociations du cycle de l'Uruguay.

18 juillet 1991 : la présidence fédérale yougoslave annonce le retrait de l’armée de Slovénie dans les trois mois. La tension s’accroît en Croatie. Les incidents se multiplient (ils feront 400 morts environ en six semaines). Exode des Serbes vivant dans des zones à majorité croate et des Croates vivant dans des zones à majorité serbe.

Lundi 22 juillet 1991 : le Conseil octroie une assistance financière en faveur d'Israël et des populations palestiniennes des Territoires occupés.

Mercredi 24 juillet 1991 à Erdut (Slavonie) et vendredi 26 juillet en Banija : incidents au cours desquels plus d'une centaine de policiers et de civils croates auraient trouvé la mort. L’armée nationale yougoslave et les forces croates se sont, pour la première fois, directement affrontées en Slavonie de l’est.

24 et … juillet ? 1991 : tournée de l’ambassadeur Henry Wynaendts dans les capitales des républiques.

Lundi 29 juillet 1991 : réunion exceptionnelle des ministres des affaires étrangères. Ils décident d’envoyer à nouveau la troïka (pour la quatrième fois). Celle-ci doit proposer, à toutes les parties en conflit, l'extension à la Croatie de l'actuelle mission de contrôle de la CEE, chargée de veiller au respect du cessez-le-feu en Slovénie. Ils précisent l’inviolabilité des frontières internes de la Fédération.

Les Britanniques insistent sur la condition d’un « cessez-le-feu effectif », prudents à cause de leurs expériences en Irlande du Nord. Ces derniers sont actuellement une cinquantaine, exerçant leur activité en Slovénie. Leur nombre serait porté à " 100, 150, 200 ou plus ", pour reprendre la formule de M. Hans van den Broek, le ministre néerlandais des affaires étrangères, qui préside les travaux des Douze. Ils seraient déployés dans les zones sensibles de Croatie, là où les Serbes sont nombreux et les accrochages fréquents (Slavonie, Krajina), leur mission consistant à superviser les interventions de patrouilles mixtes, composées de membres de l'armée fédérale et de la garde nationale croate. " La priorité numéro un, c'est la possibilité de consolider le cessez-le-feu ; si l'on ne met pas fin aux hostilités et à la violence, cela ne sert pas à grand-chose de discuter de l'avenir du pays ", a souligné M. van den Broek. Participaient à cette réunion des ministres des affaires étrangères de la CEE : MM. Ante Markovic et Budimir Loncar, premier ministre et ministre des affaires étrangères du gouvernement yougoslave, MM. Vasil Tupurkovski et Bogic Bogisevic, les membres macédonien et bosniaque de la présidence collégiale. La troïka vérifiera également si elles acceptent de donner des garanties concernant la sécurité des observateurs européens ; si elles ratifient le principe de patrouilles mixtes et le retour dans les casernes des forces armées qui n'y participeront pas. " Nous avons besoin de l'appui de tout le monde, de l'ensemble du gouvernement yougoslave, y compris du ministre de la défense, du gouvernement croate et du gouvernement serbe ", a souligné M. van den Broek (Le Monde).

Dans l'état actuel de la réflexion des Douze, les observateurs de la CEE ne seront pas armés, mais le débat sur l'opportunité de les doter d'une arme de poing (revolver) pour permettre un minimum de légitime défense sera repris. Il faudra, en outre, préciser si l'un des objectifs des patrouilles mixtes sera de désarmer les milices d'activistes en Croatie, n'appartenant ni à l'armée fédérale ni à la garde croate. Une commission fédérale du cessez-le-feu devrait être mise en place à l'initiative de la présidence collégiale yougoslave mardi ou mercredi.

La majorité des participants a estimé prématuré d'envisager à ce stade l'envoi d'une force européenne d'interposition ; la Communauté n'est guère préparée pour ce type d'intervention dont, du côté français, on n'exclut cependant pas l'éventualité.

Le corps des observateurs communautaires pourra comprendre des éléments extérieurs aux Douze, provenant d'autres pays de la CSCE ; on parle du Canada, de la Pologne, de la Suède, de la Tchécoslovaquie. Mais les quatre dirigeants yougoslaves présents à Bruxelles ont insisté pour que ce soit la Communauté, et elle seule, qui continue à piloter et coordonner l'opération.

M. van den Broek a enfin indiqué que la Communauté pourrait reprendre son aide économique, actuellement gelée, et même l'accroître si des signes tangibles de retour à la paix civile devenaient perceptibles. A première vue, la conférence sur l'avenir constitutionnel du pays, qui devrait s'ouvrir le 1 août, est ajournée. Mais les Douze restent prêts à apporter leur soutien dans ce domaine qu'ils jugent primordial, au-delà des efforts de pacification actuelle. C'est en particulier le point de vue de la France. (Le Monde 31 juillet Ph Lemaitre).

Mardi 30 juillet 1991 : la réunion prévue des présidents des six Républiques de la Fédération ainsi que les représentants du gouvernement et du Parlement fédéraux, pour poursuivre le sommet commencé lundi 22 juillet à Ohrid, est reportée sine die, le dirigeant croate Tudjman boycottant la réunion.

Le débat n'a pas été entamé, le président de la Croatie, M. Franjo Tudjman, ayant refusé d'y participer, en raison, a-t-il dit, de " l'escalade du terrorisme tchetnik soutenu par les autorités officielles serbes et une partie de l'armée fédérale ". M. Tudjman posait comme préalable à la reprise du dialogue la tenue d'une session extraordinaire de la direction collégiale pour déterminer les responsabilités et identifier les coupables dans les affrontements du mercredi 24 juillet à Erdut (Slavonie), et ceux du vendredi 26 juillet en Banija, au cours desquels plus d'une centaine de policiers et de civils croates auraient trouvé la mort. (Le Monde 1er aout Florence Hartmann).

Août 1991

Vendredi 2 - Dim 4 août 1991 : 4e visite de la troïka ministérielle, composée des ministres des affaires étrangères néerlandais, luxembourgeois et portugais, en Yougoslavie.

Commencé vendredi à Zagreb, où elle a rencontré le président croate, M. Franjo Tudjman, elle s’est poursuivie à Ljubljana, où elle s'était entretenue avec le président slovène, M. Milan Kucan. Samedi soir, elle est arrivée, toujours optimiste, à Belgrade où elle avait eu une longue discussion avec le président serbe. Slobodan Milosevic souhaitait la " bienvenue à tous les représentants de la CEE en tant qu'hommes politiques, hommes d'affaires, diplomates ou touristes, mais jamais en tant que membres d'une armée étrangère ". Le message était clair et laissait déjà entendre que la Serbie s'opposerait à l'élargissement du mandat des observateurs communautaires à la Croatie. Dimanche matin, les débats reprenaient à Belgrade avec les membres de la présidence collégiale et avec le président de la Macédoine, M. Gligorov. Fiasco total ou répétition de la réunion de Brioni _ le 7 juillet, lors de la troisième visite de la troïka, _ la Serbie était absente au moment de la session plénière qui devait aboutir à la signature du mémorandum. La Yougoslavie restait, avec un accord de cessez-le-feu précaire, déjà violé à plusieurs reprises samedi matin, libre de choisir seule entre la paix et la guerre. sans la surveillance des observateurs européens. (LM 6 août 1991 Florence Hartman).

Dim 4 août 1991 : la troïka commente son échec.

« La Yougoslavie est au bord de la tragédie et de la catastrophe. Notre mission a échoué. Nous avons pourtant tout fait pour aider le pays à aller de l'avant, pour que les tueries cessent et pour que le dialogue sur l'avenir du pays reprenne. » C'est en ces termes que le ministre néerlandais des affaires étrangères a fait le bilan, dimanche 4 août à Belgrade, de la quatrième visite de la " troïka " européenne en Yougoslavie. « Nous ne pouvons plus rien faire, si ce n'est lancer un appel à la raison », a indiqué Hans Van den Broek. Le président en exercice de la CEE a précisé que la mission européenne avait proposé un certain nombre de mesures pour que le cessez-le-feu ordonné par la présidence yougoslave dans la nuit de vendredi à samedi de la semaine dernière devienne effectif. Le mémorandum qui devait être soumis à la signature des dirigeants yougoslaves proposait que la commission de contrôle du cessez-le-feu soit mixte et composée de représentants de l'armée fédérale, des autorités croates et des Serbes de Croatie, et travaille en collaboration avec la mission d'observateurs européens dont le mandat aurait été élargi à la Croatie. " Une des parties concernées s'y est opposée et les débats ont été bloqués ", a souligné le ministre néerlandais. " Nous avons offert une assistance technique tout en ne voulant pas nous ingérer dans les affaires intérieures du pays. Nous avons voulu être des partenaires objectifs et proposer une collaboration impartiale. Mais nous ne sommes pas en mesure de prendre des décisions à leur place, ils doivent prendre leurs propres responsabilités ", a expliqué M. Van den Broek. Soulignant le manque de volonté politique dans le rétablissement de la paix, il a ajouté : " Nous plaignons le peuple qui a de tels dirigeants. Il ne reste plus qu'à attendre la suite de l'évolution de la situation actuelle. et à espérer que les parties concernées empêcheront l'escalade des conflits armés. " Le chef de l'Etat yougoslave, le Croate Stipe Mesic, accusait lui aussi la Serbie : " Elle a bloqué le dialogue avec la mission européenne. Nous voulions que la troïka engage des observateurs en Croatie. Il est clair que ceux qui s'opposent à la surveillance internationale ont d'autres ambitions. La Serbie ne se bat pas pour les droits des Serbes hors de sa République, mais pour les territoires où vivent les Serbes ", a précisé M. Mesic, ajoutant que la Croatie était prête à signer le mémorandum de la mission européenne.

Dans les milieux proches de la troïka, on admet que l'Europe est désemparée face à la crise yougoslave. Elle estime avoir fait le maximum en acceptant le rôle de médiateur et en envoyant une mission de surveillance composée d'observateurs. " Nos possibilités d'intervention sont réduites car nous ne pouvons pas risquer la paix sur tout le continent à cause d'une guerre entre villages ", explique-t-on. L'intervention d'une force d'interposition européenne est exclue, car elle reviendrait à engager toute l'Europe dans une véritable guerre. Les Soviétiques s'y opposent car ils y voient les signes d'une hégémonie européenne et la main de l'OTAN. L'armée soviétique a même fait savoir qu'elle avait des armes et qu'elle saurait s'en servir.

Si les Douze proposaient à l'URSS de participer à une telle force, Moscou refuserait, de crainte de voir l'Ukraine ou bien l'Ossétie revendiquer à leur tour une force d'interposition étrangère. D'autre part, la Serbie s'oppose à toute intervention européenne et voit dans l'uniforme blanc des observateurs celui de la Wehrmacht. Que doit faire l'Europe ? Faut-il reconnaître la Slovénie et la Croatie ? " Notre position est très délicate ", admettent les négociateurs. (Le Monde 6 août 1991 Florence Hartman).

6 août 1991 : réunion exceptionnelle du conseil des Ministres des affaires étrangères sur la situation en Yougoslavie. Les ministres se rendent compte qu’ils sont dépassés et examinent la proposition franco-allemande de saisir le Conseil de sécurité de l’Onu. Ils envisagent la tenue d’une conférence internationale (celle-ci commence à la Haye, sous la présidence de Lord Carrington, le 7 septembre).

Les ministres des affaires étrangères de la CEE ont constaté, mardi, leur impuissance et appelé toutes les instances internationales à se mobiliser. La réunion extraordinaire des ministres des affaires étrangères de la CEE, à La Haye, s'est conclue sur une déclaration finale ambiguë. Les Douze y réaffirment leur volonté de " rechercher une solution pacifique et négociée à la crise " yougoslave et demandent " à la troïka de poursuivre ses efforts ". Mais ils n'annoncent aucune nouvelle initiative, demandant au contraire le soutien de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) et envisageant que l'ONU " prenne les mesures qui lui semblerait appropriées ".

L'URSS a mis en garde les Occidentaux contre les risques d'une " ingérence " dans ce conflit. La France s'est déclarée favorable, mercredi, à une " consultation rapide des populations " en Yougoslavie, sous contrôle international.

A l'ouverture de la réunion de La Haye, les pays européens balançaient entre le volontarisme de la France et de l'Allemagne _ respectivement prêtes à saisir le Conseil de sécurité des Nations unies et à prononcer des sanctions économiques et financières contre la Serbie _ et le fatalisme des Pays-Bas, président en exercice de la CEE. Après avoir estimé que " la Communauté [était] allée à la limite de ses possibilités ", le chef de la diplomatie néerlandaise, M. Hans Van den Broek, considérait les suggestions de ses collègues français et allemand comme " prématurées " et " inapplicables ". La déclaration de La Haye se présente finalement comme un compromis entre ces deux lignes, élaboré non sans mal puisque la discussion des ministres a duré quatre heures au lieu des deux initialement prévues.

Prenant le contre-pied des propos désabusés tenus à leur retour de Belgrade, dimanche soir, par les membres luxembourgeois et néerlandais de la troïka, les pays de la Communauté se déclarent toujours prêts à jouer les médiateurs et " à poursuivre leurs efforts conformément à la déclaration de Brioni du 7 juillet " (1). Ils pressent par ailleurs la présidence fédérale yougoslave d'organiser " sur-le-champ " une conférence sur l'avenir de la Yougoslavie. Elément nouveau : les Douze s'affirment " prêts à convoquer eux-mêmes, si nécessaire, une telle conférence ".

En attendant, les Douze souhaitent avoir " le renfort d'autres instances " : c'est ainsi que M. Van den Broek a justifié l'appel qu'ils lancent à leurs partenaires de la CSCE, y compris donc les Etats-Unis et l'Union soviétique, " pour soutenir leurs dernières initiatives afin d'établir un cessez-le-feu et promouvoir un dialogue pacifique ". Le chef de la diplomatie néerlandaise a précisé que la CEE attendait de la prochaine réunion à Prague des hauts fonctionnaires des pays membres de la CSCE, jeudi, " un engagement clair ".

La volonté des Européens d'accroître la pression sur la Yougoslavie se traduit encore par l'accueil " unanime ", selon M. Dumas, qu'ils ont réservé à " l'intention de la France et du Royaume-Uni de tenir le Conseil de sécurité des Nations unies informé des actions de la Communauté afin que le Conseil de sécurité prenne les mesures qu'il estimerait appropriées ". Le ministre français a évoqué l'hypothèse d'une mission d'information menée en Yougoslavie par le secrétaire général de l'ONU.

La Communauté ne jette donc pas l'éponge, mais elle admet à mots couverts qu'elle a besoin d'aide pour étouffer l'incendie yougoslave par la voie diplomatique. Les moyens de pression économique, quant à eux, font l'objet d'une étude confiée à la Commission européenne. Celle-ci est en effet invitée à informer les Douze sur les mesures qu'ils pourraient prendre non seulement contre celles des Républiques yougoslaves refusant le cessez-le-feu, mais aussi en faveur de celles respectant le double principe du non-recours à la force et du respect du droit des minorités.

Le chef de la diplomatie allemande, M. Hans-Dietrich Genscher, s'est dit satisfait de cette décision, qui reste en deçà de sa proposition mais qui ouvre de façon implicite la question de la reconnaissance de l'indépendance de la Slovénie et de la Croatie. Ce sujet n'a, semble-t-il, pas été abordé par les Douze. Le ministre allemand a toutefois montré qu'il y tenait en déclarant qu'en cas de détérioration de la situation, l'Allemagne proposerait à ses partenaires de l'examiner.

Il n'en fallait pas plus à M. Van den Broek pour reprocher, de façon feutrée, devant les caméras de la télévision néerlandaise, à son homologue allemand de semer la confusion. Le ministre néerlandais replaçait ainsi la réunion de La Haye dans le cadre plus vaste du débat sur l'union politique européenne. La difficile question de l'intégration éventuelle de l'Union de l'Europe occidentale à la CEE a d'ailleurs plané comme une ombre sur les travaux des ministres : ils ont simplement " pris note " du fait que les neuf pays membres de l'UEO avaient décidé d'examiner quelle contribution celle-ci pourrait apporter au contrôle du respect d'un éventuel cessez-le-feu. (Le Monde 08.08.91 Christian Chartier).

7 août 1991 : Ordonné par la présidence fédérale yougoslave, un nouveau cessez-le-feu entre en vigueur en Croatie. Il semblait à peu près respecté, après les violents affrontements en Slavonie.

Le Canard Enchainé titre « Les médiateurs de la CEE : Tant qu'il y a de la Yougoslavie. il y a de l'espoir ».

8 août 1991 : réunion du comité de crise de la CSCE et demande à la Yougoslavie de réunir une conférence de paix.

$ ?? mi-août 1991, une proposition franco-allemande est avancée pour déployer une force d'interposition entre Serbes et Croates, en Croatie même, dans le cadre de l'UEO. Elle se heurte à l'opposition immédiate des Britanniques qui connaissent d'expérience, et plus que d'autres, la complexité des engagements militaires dans les Balkans mais qui, surtout, tirent des exemples irlandais et chypriote une leçon d'extrême réserve devant les opérations d'interposition, sans parler des divergences traditionnelles franco-britanniques sur le rôle de l'UEO comme embryon d'une défense européenne. (source : étude UEO 1994).

16 août 1991 : les Serbes de Slavonie (Croatie) proclament leur autonomie.

22 août 1991 : Coup d'État manqué en Union soviétique contre Michael Gorbatchev.

Mardi 27 août 1991 : Conseil des ministres des affaires étrangères. Les Douze mettent au point un plan de paix. Réunis à Bruxelles, les Douze décident d’imposer leur médiation en organisant une Conférence de paix, créant une commission d’arbitrage et en exigeant le cessez-le-feu pour le 1er septembre. La CEE accuse pour la première fois l’armée fédérale de faire cause commune avec la Serbie.

Le lendemain (28 août ?), M. François Mitterrand recevait à l'Elysée le président croate, M. Franjo Tudjman, qui lui donnait immédiatement son accord à la proposition européenne, puis le président serbe, M. Milosevic, à qui l'on avait envoyé un avion de Paris.

Jeudi 29 août 1991 : les heurts continuent. La ville frontalière de Topusko et le village d’Osijek sont attaqués par les autonomistes serbes soutenus par l’armée. Des heurts opposent les deux communautés à Vukovar et à Kostajnica, dans l’est de la Croatie. De nouvelles unités de chars se dirigent vers la Croatie. Selon la télévision croate, les combats auraient fait 50 morts.

Vendredi 30 août 1991 : le gouvernement fédéral accepte le plan de paix européen, suivi le 2 septembre par la Serbie et le Monténégro. En six semaines, les incidents en Croatie ont fait près de 400 morts.

Vuk Draskovic, président du plus important parti d’opposition serbe, le Mouvement du renouveau serbe approuve les propositions de la CEE. L’écrivain, qui s’adressait à la presse, estime qu’une conférence internationale « est susceptible de résoudre le conflit serbo-croate et de mettre fin aux conflits » en Croatie. (Le Monde 1er sept 91).

Août - novembre 1991 : la ville de Vukovar, près de la frontière avec la Serbie, est assiégée par les Serbes et bombardée. Des milices de nationalistes serbes venant de Belgrade, organisées par l'ultranationaliste Vojislav Seselj, participent à l'assaut de la ville. La plupart des habitants croates sont expulsés par les Serbes, qui ont fini par prendre le contrôle d'une ville presque entièrement détruite par les bombardements. Certains bilans font état de plus de 10 000 morts.

Septembre 1991

• Nuit du dim 1er au 2 septembre 1991 : signature du plan de paix proposé la semaine précédente par la Communauté européenne.

Ce plan prévoit un cessez-le-feu en Croatie, contrôlé par des observateurs internationaux, la mise sur pied d'une conférence internationale sur la Yougoslavie et la désignation d'une commission d'arbitrage sur le différend entre Serbes et Croates. (…) Le plus important à présent est de parvenir à un cessez-le-feu effectif en Croatie ", a déclaré M. Hans Van den Broek Le président de Serbie, M. Slobodan Milosevic, a estimé pour sa part que cet accord était " meilleur que ceux conclus auparavant ", en ajoutant toutefois : " Si les Croates continuent de nous attaquer, il n'y aura pas de paix. " Samedi soir, on annonçait que la Serbie acceptait la venue d'observateurs européens dans les régions troublées de Croatie, moyennant certaines conditions, notamment qu'il ne s'agisse pas de militaires mais de civils. M. Hans Van den Broek décidait immédiatement de se rendre dimanche à Belgrade, porteur du mémorandum qu'il entendait faire signer aux instances fédérales et aux présidents des six Républiques. Il y parvint finalement dans la nuit, après de longues heures de discussions.

Le président yougoslave, Stipe Mesic, a précisé que les entretiens avaient été sur le point d'échouer lorsque la Serbie avait demandé le retrait des forces croates des zones de combat, ce qui " était inacceptable, alors que vingt cités croates sont attaquées ". Le gouvernement serbe a finalement fait machine arrière lorsque M. Mesic a menacé d'organiser un nouveau vote " pour voir qui signera et qui ne signera pas, et laisser la CEE en tirer ses propres conclusions ".

300 observateurs seront dépêchés en Croatie. Cette proposition avait été présentée comme celle de la dernière chance par les Européens qui, la semaine dernière, avaient menacé la Serbie d'une " action internationale ". (source Le Monde 3 sept 1991, Claire Tréan).

Mardi 3 septembre 1991 : les Douze réunis à la Haye décident du début de la conférence de la paix, après acceptation par les six République du plan de paix de la CE.

Mercredi 4 septembre 1991 : date prévue d’arrivée du premier contingent de 30 observateurs à Zagreb.

• L'Allemagne menace de reconnaître « bientôt » les républiques sécessionnistes de Slovénie et de Croatie si les affrontements ne cessent pas en Yougoslavie, déclare le ministre allemand des affaires étrangères. " Nous ne pourrons pas regarder sans rien faire ", dit Hans-Dietrich Genscher devant le Parlement allemand (AFP).

Les 35 pays membres de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) approuvent, lors d'une réunion à Prague, la décision de la CEE de convoquer une conférence de paix sur la Yougoslavie, samedi 7 septembre, à La Haye. Ils réclament l'arrêt de toutes les opérations militaires.

A la demande de la Pologne, les délégués condamnent " tout usage de la force à des fins politiques " et décrété un embargo sur les livraisons d'armes et d'équipements militaires " à toutes les parties yougoslaves tant que durera la crise ". A Paris, le ministre des affaires étrangères, M. Roland Dumas, a déclaré, mercredi, que la conférence de La Haye constituait probablement " la dernière chance pour la Yougoslavie d'échapper à ce qui pourrait être véritablement une guerre civile ".

Vendredi 6 sept 1991 : nouvelle réunion des Douze à Bruxelles consacrée, normalement, à la question balte.

Les Albanais s’estiment oubliés, rapporte Le Monde. « L’Europe a, jusqu’ici, ignoré tous les appels «  en faveur d’une véritable représentation albanaise » dit Rugova.

Président du principal parti de la région, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK), M. Ibrahim Rugova,: «  Si aucune solution n’est trouvée à La Haye au problème du Kosovo, la seule issue sera pour nous la réunification avec l’Albanie. «  Bien qu’il assure garder l’espoir de voir les Albanais représentés à La Haye autrement que par le représentant du Kosovo à la présidence collégiale yougoslave _ considéré comme une «  marionnette «  des Serbes _ M. Rugova déplore qu’elle se cantonne dans une «  diplomatie secrète «.

Selon l’ex-chef du PC du Kosovo, M. Bakalli «  il n’y aura jamais d’Europe stable sans solution au problème albanais «. «  Unification «  ou «  rattachement «.

M. Rugova souligne que «  Tirana pense aussi à l’unification «  avec le Kosovo, il assure que l’Albanie «  ne fournit aucune aide matérielle «  aux Kosovars en raison «  des énormes problèmes «  politiques et économiques auxquels elle est confrontée. Quant à M. Bakalli, il admet qu’ » il y a plus de partisans de l’unification au Kosovo qu’en Albanie «. Il privilégie le maintien de sa région dans une Yougoslavie confédérale, car il reconnaît les limites de l’hypothèse d’une «  unification unilatérale par la force «. D’un autre côté, il ne peut envisager un tel maintien si le Kosovo n’obtient pas le statut de République, si la Yougoslavie se limite à «  une mini-fédération _ sans la Croatie et la Slovénie _ sous domination serbe «. Dans ce dernier cas, «  il n’est plus question de vivre avec les Serbes. (Le Monde 8 sept).

• Samedi 7 sept 1991 : la conférence de paix sur la Yougoslavie s’ouvre à La Haye. Elle est présidée par Lord Carrington. « Son expérience et son impartialité s'imposeront aux parties yougoslaves », estime le ministre néerlandais des affaires étrangères, Hans Van den Broek. Robert Badinter présidant la commission d’arbitrage.

Les Douze ont accepté de ne pas faire une condition d’un cessez-le-feu total « Ce ne serait pas la première fois qu'une conférence de paix commence alors que les combats ne sont pas encore terminés », devait noter M. Jacques Delors (Source Le Monde 6 août 1991)

L’Autriche critique la position de la CEE, rapporte un article du Monde. Le Chancelier, social-démocrate, Vranitzky, freine ses collègues de la coalition qui veulent une reconnaissance immédiate de la Croatie et Slovénie. les médias autrichiens ont vivement critiqué l’ » incompétence «  des diplomates de Bruxelles. Ils leur reprochent d’avoir voulu régler le conflit yougoslave «  avec la mentalité de juristes de droit économique fixant des normes à respecter pour la culture de concombres «  _ comme l’écrivait cyniquement l’éditorialiste du quotidien viennois Kurier. Bruxelles et la CEE se voient accusés d’agir «  sans tenir compte des réalités «  et d’avoir, par leur ignorance, laissé passer la chance de contribuer _ alors qu’il était encore temps _ à régler les problèmes de manière pacifique. «  Si l’Autriche avait été déjà membre de la CEE, la politique de Bruxelles aurait changé plus tôt «, assurent des diplomates autrichiens.

Le chancelier a eu du mal à freiner l’euphorie des principaux dirigeants du Parti conservateur (ses partenaires au sein de la coalition gouvernementale) et de l’opposition qui réclamaient une reconnaissance immédiate de la Slovénie et de la Croatie afin de faire respecter le cessez-le-feu. M. Vranitzky, le chancelier, a carrément refusé, mardi dernier, de doter son ministre des affaires étrangères des pleins pouvoirs que celui-ci avait exigés, et qui l’auraient autorisé à reconnaître la Slovénie et la Croatie quand bon lui semblerait, sans consulter au préalable le conseil des ministres. M. Mock avait notamment invoqué les «  responsabilités morales «  de Vienne à l’égard de Ljubljana et de Zagreb. (source Le Monde 7 sept Baryli Waltraud).

Dimanche 8 septembre 1991 : lors d’un référendum en Macédoine, 95,9% des électeurs se prononcent en faveur de l’indépendance de la république. Le taux de participation au scrutin a été de l’ordre de 75 %. Les dirigeants de Skopje n’excluent pas d’adhérer à un nouveau modèle yougoslave qui serait une «  alliance d’Etats souverains.

Le président, Kiro Gligorov aspire, dans la mesure du possible, à sauvegarder la Yougoslavie parce qu’il est l’auteur, avec le président de la Bosnie-Herzégovine, M. Izetbegovic, de la «  plate-forme «  prônant une alliance d’Etats souverains avec une politique monétaire, étrangère et de défense commune. En d’autres termes, un compromis entre l’union souple proposée par les Républiques du Nord-Ouest et le modèle centraliste de la Serbie.

Les résultats du référendum ont soulevé la colère des 45 000 Serbes qui vivent en Macédoine. Le président du Parlement de Serbie, M. Pavic Obradovic, a déclaré notamment lundi : «  Si la Macédoine quitte la Yougoslavie, elle devra envisager un redécoupage des frontières avec la Serbie, car la Serbie compte défendre les intérêts des Serbes de cette République, en particulier dans la région de Kumanovo. «  Cette mise en garde d’un homme très actif dans la défense des Serbes de Croatie pourrait présager l’ouverture d’un nouveau front en Yougoslavie. (LM 11 sept Harmann).

Dimanche 8 septembre 1991 : Cinq observateurs de la Communauté européenne arrivent à Osijek, dans l’ouest de la Croatie, pour superviser le cessez-le-feu, qui n’est toujours pas respecté (source Le Monde 10 sept).

Mer 11 septembre 1991 : débat au Parlement européen sur la Yougoslavie. Jacques Delors estime que trouver à brefs délais des solutions aux crises actuelles relève de «  la quadrature du cercle ». Pour lui, la Communauté dispose de deux armes essentielles : les sanctions économiques et la menace d’une reconnaissance de l’indépendance de la Croatie et de la Slovénie qui reste une carte maîtresse dans les négociations de La Haye.

Répondant à l’appel de nombre de parlementaires en faveur de la création rapide d’une force d’interposition européenne en Yougoslavie, le président de l’exécutif communautaire a précisé que les Douze travaillaient sur cette hypothèse mais qu’elle soulevait une difficulté de taille : «  Comment prendre cette décision, s’est-il interrogé, sans l’aval des Nations unies ? «  Dans la résolution votée à une forte majorité (209 voix pour, 10 contre et 70 abstentions), l’Assemblée _ qui n’hésite pas à parler «  de processus de dissolution en cours de l’Etat yougoslave «  _ ne retient pas cette éventualité mais demande que les parlements du Kosovo et de la Vojvodine (les deux provinces sous contrôle serbe) soient représentés à la conférence de paix (Le Monde 13 sept).

— Un hélicoptère Mi 8 transportant l’ambassadeur Winaents est touché par tirs (provenant sans doute de l’armée yougoslave).

— Séance inaugurale de la Commission d’arbitrage « Badinter ».

Les ministres de la Communauté avaient décidé qu’elle serait formée de cinq membres, trois nommés par la CEE et deux par les Yougoslaves. Ces derniers n’étant pas parvenus à se mettre d’accord sur deux noms, ce sont les trois membres désignés par la CEE, MM. Robert Badinter (France), Roman Herzog (Allemagne) et Aldo Corasaniti (Italie), qui ont finalement coopté leurs deux collègues manquants. Ils ont choisi Mme Irène Petry (Belgique) et M. Francisco Tomas Valiente (Espagne). Les cinq ont élu M. Badinter président.

La commission est donc au complet et prête à travailler. Le choix des deux derniers membres, dû à la nécessité, n’a pas été fait sans arrière pensées. L’Espagne et plus encore la Belgique sont des pays qui ont une certaine expérience en matière d’affrontements culturels et ethniques. Ces cinq personnalités sont à la tête, dans leurs pays respectifs, de l’autorité constitutionnelle suprême.

La commission doit fonctionner parallèlement à la conférence de paix de La Haye. Elle examine les différends qui lui sont soumis par les parties en conflit et rend ses décisions dans les deux mois. Son «  lieu principal de réunion «  a été fixé à Paris. La commission, réunie au Palais-Royal, dans les locaux du Conseil constitutionnel français. «  Il s’agit d’une démarche très originale, nous a déclaré mercredi soir M. Badinter. Si une telle juridiction avait existé dès le début de la crise yougoslave, les Croates auraient pu par exemple la saisir d’emblée de leurs griefs. Pour M. Badinter, la création d’un tel organisme de recours est nécessaire pour combler un vide juridique : «  On oublie parfois à quel point la Cour de justice européenne de Luxembourg a été utile à la construction européenne. Or, les parties en présence en Yougoslavie n’ont aucune instance à laquelle elles puissent demander de dire le droit dans les conflits qui les opposent. «  (Le Monde 13 septembre Dhombres dominique).

• Conférence de presse du président français, François Mitterand consacrée, pour l’essentiel, à la remise en perspective de la politique européenne de la France et à sa vision de l’avenir des pays de l’Est.

Saluant «  la naissance d’une nouvelle Europe «, le chef de l’Etat indique que la «  géopolitique » du continent avait désormais «  grand besoin d’une théorie des ensembles «. Il a notamment proposé une réunion des quatre puissances détentrices de charges atomiques en Europe afin d’aboutir à «  un strict contrôle «  des armes nucléaires. Il a repris à son compte, après avoir parlé de la Yougoslavie et de l’indépendance probable de la Slovénie et de la Croatie, l’idée de forces d’interposition de l’ONU «  sur les lieux contestés «. (LM 13 sept / Afp).

Jeudi 12 septembre 1991 : lord Carrington doit rencontrer les Ministres des affaires étrangères de l’ex-Yougoslavie.

— Conférence de presse de François Mitterand qui évoque dix-sept «  situations »  où des nationalités aspirent à inscrire leur identité dans le cadre d’un Etat souverain.

Vendredi 13 septembre 1991 : la Bulgarie décide de reconnaître l'Etat de Macédoine, annonce le président de la commission parlementaire de politique étrangère, M. Filip Ichpekov.

Sam 14 et Dim 15 septembre 1991 : réunis à Venise, les Ministres des affaires étrangères italien et allemand évoquent la possibilité d’une reconnaissance séparée de la Slovénie et de la Croatie.

Dimanche 15 septembre 1991 : proclamation de l’indépendance de la Macédoine.

Lundi 16 septembre 1991 : Assurant la présidence tournante de l'UEO, l'Allemagne entreprend de consulter ses huit partenaires, à la demande expresse, du ministre néerlandais des affaires étrangères, Hans Van den Broek. Celui-ci a proposé de dépêcher en Yougoslavie une force européenne d’interposition sous bannière de l’UEO.

Mardi 17 septembre 1991 : accord de cessez-le-feu, non respecté, comme les précédents. L’armée fédérale, désormais ouvertement dans le camp serbe, poursuit son offensive dans certaines régions de Croatie. Les forces croates multiplient les opérations de blocus des casernes. Les combats s’étendent et gagnent la capitale, Zagreb. La marine yougoslave annonce le blocus de plusieurs ports croates de l'Adriatique.

• Lord Carrington se rend à Igalo (côte monténégrine) pour rencontrer Tudjman, Milosevic, Kadijevic. Ils conviennent d’un nouveau cessez-le-feu : retrait de l’armée dans les casernes et démobilisation des unités de réserve de la garde nationale. L’accord d’Igalo ne sera pas plus respecté que les autres (l’ambassadeur Henry Wynaendts P.100).

• Lord Carrington informe par téléphone la présidence néerlandaise de l’accord de cessez-le-feu entre les présidents serbe, croate et le ministre fédéral yougoslave de la défense dans l’optique néerlandaise, le cessez-le-feu ne rend pas inutile l’envoi de militaires neutres ; au contraire : il en est même la «  première condition «, la seconde étant l’agrément de toutes les parties au conflit.

Le porte-parole néerlandais a toutefois admis que l’accord obtenu par lord Carrington pouvait générer une situation nouvelle, d’ici à la décision formelle des Douze et des pays membres de l’UEO : «  D’ici à jeudi, le cessez-le-feu peut s’avérer effectif et l’accalmie peut permettre aux observateurs civils de commencer leur mission. «  Les raisons qui avaient amené la présidence néerlandaise de la CEE à programmer le déploiement de contrôleurs militaires _ à savoir «  la détérioration de la situation et l’impossibilité pour les observateurs civils d’accomplir leur tâche «  _ tomberaient alors d’elles-mêmes. Mais le porte-parole a prudemment laissé l’alternative ouverte : «  La décision [des Européens] peut aller dans les deux sens. «  La Yougoslavie est morte. ».

Interrogé sur l’influence qu’a pu avoir la proposition des Pays-Bas, le ministère des affaires étrangères est resté dans l’expectative : «  C’est difficile à dire ; mais il est également impossible de prouver le contraire. Peut-être les Serbes ont-ils pris au sérieux la détermination européenne ? Peut-être les Croates ont-ils finalement réalisé que l’escalade de la violence n’entraînera pas la reconnaissance de leur indépendance ? La Yougoslavie est morte, mais il faut que les parties négocient «  pour organiser de nouvelles formes de coexistence. Dans l’esprit des Néerlandais, le déploiement d’une force d’interposition militaire «  renforcerait le processus de la conférence de paix «  en rétablissant notamment l’ordre des priorités établi par les Européens : d’abord, un cessez-le-feu effectif ; ensuite son maintien par des contrôleurs internationaux ; enfin, la conférence de paix. «  L’idée de déployer une force d’interposition dans le cadre de l’union de l’Europe occidentale n’est pas nouvelle «, a encore affirmé le porte-parole de M. Van den Broek. «  Elle a déjà été étudiée depuis le début de la crise yougoslave. «  C’est sans doute avec ces travaux préparatoires à l’esprit que le secrétaire général de l’UEO a estimé que le nombre de militaires à déployer devrait avoisiner les 40 000. Mais La Haye juge cette évaluation prématurée : «  Tout dépend de la mission de la force de paix, qui pourrait couvrir l’ensemble du territoire yougoslave mais aussi se limiter à la Croatie. «  La présidence néerlandaise de la CEE n’exclut pas que les Douze décident, jeudi prochain, d’étendre «  par précaution «  à la Bosnie-Herzégovine la mission des actuels observateurs civils. Cela signifie que l’éventuel déploiement de «  soldats de la paix «  pourrait aller de pair avec le maintien des «  casques blancs «  civils. (Le Monde 19/09/1991 Chartier Christian).

• Le Premier ministre hongrois, Jozsef Antall, demande aux Etats occidentaux d’imposer des sanctions économiques contre la Serbie. «  C’est la seule façon, dit-il, d’isoler les nationalistes serbes et les communistes, qui continuent d’ignorer les cessez-le-feu.

L’espace aérien hongrois a été violé à quatre reprises dans la seule matinée de lundi par des avions de l’armée fédérale. Pis : deux des cinq appareils ont tiré des missiles vers la Croatie durant cette opération. L’armée a aussitôt été placée en état d’alerte à la frontière.

La Hongrie ferme l’un de ses trois postes-frontières avec la Croatie, dans la nuit de dimanche à lundi. Motif : certains des affrontements les plus violents en Slavonie ce week-end se sont déroulés à une dizaine de kilomètres seulement du territoire magyar. + le pays accueille déjà 20 000 réfugiés.

Le ministre de la défense yougoslave accuse la Hongrie de fournir des armes aux Croates (Le Monde 19/09/1991Yves-Michel Riols).

Mercredi 18 septembre 1991 : violents combats entre forces croates et unités de l’armée fédérale yougoslave dans plusieurs régions de la Croatie, en dépit de la trêve acceptée la veille par les belligérants.

Jeudi 19 septembre 1991 : en visite à Berlin François Mitterand propose l’envoi d’une force européenne (ou de confier le problème à l’Onu). A Weimar, le 20 septembre, il infléchit sa position sur l’indépendance des républiques. Il avait toujours défendu le « principe d’autodétermination des peuples ». Mais il ajoute cette fois « Si la Croatie veut faire sécession, je ne vois pas pourquoi la Yougoslavie le lui interdirait » $$ retrouver le discours.

En fait, l'échec de cette proposition était déjà envisagé dans ce discours où M. Mitterrand évoquait une solution de rechange (confier le problème à l'ONU), et on peut penser que ni la France, qui n'y croyait pas, ni l'Allemagne, qui a peur de son ombre dès qu'il est question d'intervention militaire à l'étranger, n'ont plaidé avec beaucoup d'ardeur pour l'envoi d'une force européenne en Yougoslavie.

La mission commune de MM. Dumas et Genscher n'était déjà plus très claire quand ils ont quitté l'Allemagne pour rejoindre leurs homologues européens à La Haye. La " déclaration franco-allemande ", dont ils partaient armés, avait un objectif plus politique qu'opérationnel : il s'agissait de montrer que Paris et Bonn ont la volonté d'agir ensemble plutôt que de dire comment. (Le Monde 22/09/1991, Claire Tréan).

— Réunion des Ministre des affaires étrangères à la Haye + Réunion de l’UEO. A l'initiative des Pays-Bas, les neuf pays membres de l'Union de l'Europe occidentale (les Douze moins le Danemark, la Grèce et l'Irlande), se réunissent, à La Haye pour décider de l'envoi éventuel d'une force de maintien de la paix en Yougoslavie. Le chef de la diplomatie néerlandaise, Hans Van den Broek, a proposé que l’UEO déploie en Croatie une force de maintien de la paix.

Assurant la présidence tournante de l’UEO, l’Allemagne a entrepris de consulter ses huit partenaires, à la demande expresse, lundi 16 septembre, du ministre néerlandais des affaires étrangères, M. Hans Van den Broek, qui est également président en exercice de la CEE. La décision des Neuf sera préparée par les Douze, dont les ministres des affaires étrangères sont convoqués, également jeudi, à La Haye, pour évaluer la situation en Yougoslavie, à l’aide notamment du bilan que Lord Carrington dressera de ses entretiens, lundi 16 et mardi 17 septembre, avec les dirigeants croates et serbes. Les ministres européens feront ensuite le point sur le déroulement de la Conférence de paix, dont la deuxième séance de travail sera alors tout juste achevée, avant de se réunir avec leurs collègues de la défense concernés, dans le cadre de l’UEO. Dans l’esprit de M. Van den Broek, la force d’interposition de l’UEO serait calquée sur le modèle des «  casques bleus «  de l’ONU : «  Il ne s’agira pas d’une force d’intervention à des fins offensives mais d’une force de maintien de la paix, composée de militaires légèrement armés et ayant une mission strictement défensive. «  Selon le porte-parole du ministre néerlandais, les capitales européennes doivent répondre d’ici à jeudi à deux questions principales : «  Est-il possible «  de constituer une telle force et, si oui, «  comment faire en pratique «  ? Il est entendu à La Haye que le déploiement effectif de soldats de la paix ne pourra pas avoir lieu «  sans l’accord de la Yougoslavie «.(Le Monde 18 sept 1991 Ch Chartier).

La demande d’intervention tourne court : le Conseil demanda simplement à l'UEO d'élaborer des plans pour une éventuelle opération de maintien de la paix et se tourna vers les Nations unies pour gérer le conflit. (source étude UEO 1994).

• Le Canada demande la réunion d’urgence du Conseil de sécurité, estimant que la détérioration de la situation représentait un risque pour la paix et la sécurité des autres pays. L’Allemagne est favorable à cette convocation.

• ?? sommet tripartite sur la situation dans les Balkans à Athènes avec les premiers ministres bulgare et grec, MM. Mitsotakis et Popov, ainsi que le président serbe, M. Slobodan Milosevic (à l’ordre du jour la question macédonienne ?).

• Vuk Draskovic, leader du Mouvement du renouveau serbe, défend la paix, rapporte le Monde le 19 septembre

«  Mieux vaut négocier pendant deux ans que faire la guerre, ne serait-ce que deux minutes » dit-il. Ses aspirations pacifiques lui valent d’ailleurs d’être qualifié par le pouvoir serbe de «  traître et d’oustachi «.

Accusant directement le président serbe, Slobodan Milosevic, d’avoir entraîné les Serbes de Croatie dans «  une guerre absurde et sale «, Vuk Draskovic estime que la crise yougoslave peut être réglée par le dialogue. Selon lui, les présidents des six Républiques, l’opposition et l’intelligentsia, mais aussi des représentants européens et internationaux, devraient prendre part à la négociation. Il insiste pour que les puissances étrangères, qui ont participé à la création de la «  première Yougoslavie «  (le royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes) de 1918, puis de la «  seconde Yougoslavie «, après la seconde guerre mondiale, jouent un rôle particulier dans les négociations _ c’est-à-dire la France, la Grande-Bretagne, la Russie et les Etats-Unis.

Il avait commencé sa carrière politique en prônant une «  Serbie qui s’étendrait sur tous les territoires où se trouvent des cimetières serbes «. Mais dans cette folie nationaliste qui a envahi la Serbie, M. Draskovic a mûri et a opté pour la raison. «  Que faire de territoires sans Serbes ? «, demande-t-il. Il propose donc comme base de futures négociations une solution qui pourrait satisfaire les deux parties. «  Le redécoupage des frontières entre Serbes et Croates est inévitable. Mon projet n’est pas parfait, mais il a le mérite de respecter une réalité, celle de la carte ethnique de la Yougoslavie. «  Il ajoute : «  Après tout ce qui s’est passé, je ne vois pas comment la Krajina de Knin ou les villages serbes de Slavonie pourraient rester en Croatie. «  La Yougoslavie de Draskovic garde six entités : la Macédoine, le Monténégro et la Slovénie restent dans leurs frontières actuelles ; la Serbie traverse le Danube et intègre une partie de la Slavonie de l’Est. La Bosnie-Herzégovine est morcelée. Les deux Krajinas serbes _ celle de Knin (en Croatie) et celle de Bosnie sont regroupées. En échange, la Bosnie perd le sud-ouest de son territoire où les Croates sont majoritaires. La Croatie de M. Draskovic est remodelée, mais ne perd pas de sa superficie. Selon lui, la Bosnie, les deux Krajinas, le Monténégro, la Macédoine et la Serbie resteront unis dans une formule fédérale. La Slovénie et la Croatie, indépendantes, pourraient se séparer totalement du reste de la Yougoslavie ou avoir, si elles le désirent, des relations confédérales avec les quatre autres Républiques yougoslaves. (Le Monde 19 sept).

Vendredi 20 septembre 1991 : suite de la réunion de la Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe (CSCE) à Moscou - jusqu'au 4 octobre.

—  réunion spéciale des ambassadeurs de l'OTAN à Bruxellessur la question yougoslave.

— A New-York, à la demande du Canada, le Conseil de sécurité de l’ONU débat, pour la première fois, de la question yougoslave.

Selon des participants, la réunion s'est " mal déroulée ". Ces diplomates soulignent que la Chine s'est montrée pour le moins " très réticente ", et que l'Union soviétique, " évidemment inquiète ", a proposé que le secrétaire général, M. Perez de Cuellar, fasse appel à toutes les parties en Yougoslavie et se rende sur place. Les Britanniques ont demandé, avec beaucoup de circonspection, que les consultations continuent. Quant aux Etats-Unis, ils " se contentent de suivre les débats ". " Si on devait voter ce soir, l'idée française de l'envoi d'une force d'interposition ne recueillerait que deux, peut-être trois voix favorables ", observait un diplomate.

Le représentant de la Roumanie a déclaré quant à lui qu' " il est hors de question pour l'ONU d'intervenir en Yougoslavie " ; celui de l'Inde a ajouté : " On n'est pas là pour innover ". L'Inde s'est fortement " opposée à toute décision du Conseil pour des raisons de principe ", de même que la Chine, membre permanent, l'Equateur et Cuba. Ni les trois membres africains du conseil, ni le Yémen ne se sont prononcés. Les diplomates français insistent sur le fait que pour le moment les pourparlers ne sont que des " consultations préliminaires ".

C'est le Canada qui avait déposé dans la nuit de jeudi à vendredi la première demande d'une réunion formelle du Conseil. Dans une lettre adressée au Conseil de sécurité, l'ambassadeur canadien, M. Yves Fortier, observait que " la situation en Yougoslavie pourrait compromettre la paix et la sécurité internationale ".

Le représentant de l'Autriche _ également membre du Conseil de sécurité _ avait pour sa part demandé des consultations informelles, en rappelant " le principe selon lequel toute modification des frontières par la force est inacceptable et que toute solution devrait garantir les droits de toutes les parties dans toutes les Républiques ". Il y a quelques jours, le président de la fédération yougoslave, M. Stipe Mesic _ un Croate, _ avait écrit une lettre aux Nations unies demandant une intervention de l'organisation. Une réunion formelle du conseil sur la Yougoslavie est prévue pour jeudi " au plus tard ".

(Question de la base juridique) Quelle peut être la base juridique d'une action de l'ONU ? Le chapitre 8 de la Charte autorise des organismes " régionaux " à régler les affaires qui " touchent au maintien de la paix et de la sécurité internationale ". Mais ce chapitre, qui permettrait à la Communauté européenne d'envoyer une force d'interposition en Yougo- slavie, n'a aucun caractère contraignant, à la différence du chapitre 7, qui permet une application des décisions de l'ONU " par tous les moyens, y compris la force ". (Le Monde 22 sept).

Vendredi 20 septembre 1991 : Après avoir fait circuler un premier projet, la présidence néerlandaise de la CE soumet à la conférence intergouvernementale sur l'Union politique un projet révisé de Traité qui rétablit notamment l'unicité et la cohérence du projet.

— conférence de presse de François Mitterrand et Weizsacker, président de la République fédérale. F. Mitterand souhaite que l'Europe se dote de ces moyens, notamment de la possibilité de constituer des forces d'interposition, en ajoutant cependant que, selon lui, " les forces d'interposition doivent avoir surtout un rôle de prévention ".

Cette visite s’inscrit dans un voyage trois jours en Allemagne de l’est, avec visite de trois des nouveaux Lander à un programme chargé en discours, rencontres, visites d'entreprises et des hauts lieux culturels de Saxe et de Thuringe, hommage rendu aussi à la mémoire des victimes du nazisme au camp de Buchenwald, à deux pas de la ville de Goethe et de Schiller.

Il participe de la volonté « d'apurer le climat des relations franco-allemandes qui commençait à s'alourdir gravement. Il s'agissait non seulement de répéter la volonté commune de Paris et de Bonn de conclure dans trois mois, au conseil européen de Maastricht, les négociations sur l'union monétaire et l'union politique, ce qui fut fait, mais aussi pour M. Mitterrand d'effacer par cette tournée en Allemagne orientale l'idée, répandue dans les deux pays, qu'il avait assisté avec quelque répulsion à la réunification ».

Ce voyage a été l'occasion d'une série de mises au point des deux côtés. Côté allemand, ce fut essentiellement l'engagement de ne pas faire cavalier seul à propos de la Yougoslavie, de ne pas saisir l'occasion de cette crise pour rompre les amarres européennes.

Côté français, les mises au point apparaîtront sans doute à certains comme des mises à jour tardives d'une politique étrangère contestée, à laquelle il était reproché de rester trop statique dans un monde en plein bouleversement. M. Mitterrand s'est clairement déclaré favorable au principe de l'élargissement de la Communauté européenne et a invité les Douze à en examiner sans plus attendre l'ampleur, les conditions et le calendrier. Cela ne contredit pas formellement ses propos précédents sur les risques de dilution de la Communauté et " les dizaines et dizaines d'années " nécessaires pour parachever son élargissement, mais cela donne une inflexion positive à une approche qui était perçue jusque-là comme conservatrice. (LM 22 sept, Claire Tréan).

Mardi 24 septembre 1991 : visite à la Commission européenne du président de la Commission d'arbitrage pour la Yougoslavie, M. Robert Badinter.

30 septembre 1991 : la présidence néerlandaise présente un nouveau projet de traité, plus « supranational » sur certains points mais qui réduit les ambitions en matière de politique étrangère et de sécurité communes.

" Ils (les Néerlandais) sont responsables d'une belle pagaille. Le passage sur la défense apparaît comme une véritable provocation à l'égard des Français ", estimait voici quelques jours un diplomate espagnol. Le texte néerlandais stipule en effet que les actions communes en matière de sécurité devront être " complémentaires " de celles conduites dans le cadre de l'OTAN et de l'UEO, organisations qui, à l'évidence, selon les Pays-Bas, doivent jusqu'à nouvel ordre rester les piliers de toute défense européenne. Les autorités de La Haye ont oublié que l'idée d'instaurer une union politique trouvait son origine dans une initiative franco-allemande d'avril 1990 ; elles en ont en tout cas complètement négligé l'esprit.

D'autre part, l'obsession des Pays-Bas, partagée à des degrés divers par plusieurs Etats membres, en particulier la Belgique et l'Italie, et encouragée par la Commission européenne, semble être de faire ainsi barrage à une montée en puissance du " Conseil européen " rassemblant les chefs d'Etat et de gouvernement, auquel les Français et les Allemands souhaitent voir jouer un rôle central dans la définition de la future politique étrangère et de sécurité commune.

Tout en recommandant une " structure unique ", le projet néerlandais prévoit le maintien de filières différentes les unes des autres, et cloisonnées, notamment celle de la coopération politique (qui fonctionne en matière de politique étrangère, en dehors des institutions communautaires). " La PESC serait de la sorte complètement éclatée ", déplore-t-on du côté français.

Quels étaient les objectifs des Néerlandais ? Obéir à la pression exercée par le Parlement européen. Apporter au moins formellement un appui à la Commission qui craint, en matière de politique étrangère, une dérive à son préjudice et au profit du Conseil européen. Rassurer les Anglais que l'ensemble de l'opération laisse tout à fait circonspects en faisant ressortir plus clairement que jamais que les velléités européennes en matière de sécurité et de défense ne visent d'aucune manière à prendre le pas sur l'alliance américaine.

S'agissant au moins de ce troisième point, l'erreur d'appréciation est totale. Londres a bien davantage relevé dans le projet néerlandais ce qui continue de lui déplaire _ renforcement des institutions supranationales, mise en oeuvre d'actions diplomatiques communes _ plutôt que les points favorables à ses thèses.

Au reste, la mauvaise humeur manifestée par les Britanniques ne les empêche probablement pas de se réjouir du désordre suscité par la démarche hollandaise. Sans compter qu'un échec des négociations sur l'union politique pourrait compromettre la signature du traité instaurant une union économique et monétaire. L'Allemagne, on s'en souvient, a constamment fait valoir qu'elle subordonnait son feu vert au programme d'UEM à des progrès sur le plan de l'intégration politique. Voilà une perspective seconde qui peut-être ne déplaira pas aux Britanniques dont l'adhésion en cours au projet d'UEM est dépourvue d'enthousiasme. " Il faut très vite sortir de cette impasse de procédure. Si elle se transforme en impasse sur les questions de fond, la conférence intergouvernementale sera compromise ", souligne-t-on du côté français. Il reste à savoir si la présidence néerlandaise, qui conduit les débats, et détient donc de ce fait une marge de manoeuvre appréciable, se prêtera à l'exercice de sauvetage ; comme M. Wim Kok l'a fait voilà dix jours sur le terrain de l'UEM. Le fait que la Commission, présidée par M. Delors, considère avec bienveillance l'initiative néerlandaise n'est peut-être pas de nature à faciliter ce changement de cap. (LM 30 sept, Ph Lemaitre).

Entrée en scène de l’Onu

Mercredi 25 sept 1991 : convoi d'une quinzaine d'autobus "la Caravane pour la paix", a pénétré en Yougoslavie par Trieste (Italie) pour gagner Ljubjana, Zagreb, Belgrade, Sarajevo dimanche. / Le président croate Franjo Tudjman et le ministre fédéral de la Défense, le général Veljko Kadijevic, doivent se rencontrer mercredi. / L'émissaire de la CEE sur la Yougoslavie — l'ambassadeur des Pays-Bas en France, M. Henri Wijnaendts —, est parti mercredi ou jeudi en Croatie et en Slovénie, puis en Bosnie-Herzégovine et en Macédoine.

— Le Conseil de sécurité de l’ONU vote une résolution 713 qui réaffirme son plein soutien à l’action de la Communauté européenne et décrète un embargo sur les ventes d’armes à destination de la Yougoslavie et des États qui en sont issus. Mais il refuse l’envoi d’une force d’urgence proposé par la France. (première ? erreur).

fin septembre ? : référendum clandestin au Kosovo sur la « souveraineté de la République ».

30 septembre 1991, le groupe ad hoc de l’UEO, chargé d’établir un plan d’action pour arrêter le conflit dans l’ex-Yougoslavie, alors limité à la Croatie, présente quatre options d'intervention pour la mise en oeuvre de la première force de maintien de la paix des Nations unies (FORPRONU).

Ces plans seront finalement retenus par l'ONU de préférence à ceux de l'OTAN jugés inadaptés, par leur ampleur, à la spécificité politique et aux finalités de l'opération. Le Conseil ministériel de l'UEO du 18 novembre suivant décide de mettre "à la disposition de l'ONU les détails des plans de circonstance déjà mis au point par les experts de l'UEO. (source : étude UEO 1994).

Il présente une option de force de maintien de la paix de 20 000 soldats, soutenus par 10 000 autres à titre de personnel supplémentaire d’appui. Il s’agissait alors d’une projection limitée à des contingents des Etats de l’UEO (10) et de l’OTAN (14 pays européens).

Lundi 30 septembre / 1er octobre 1991 : Conseil des ministres des affaires étrangères pour tenter de relancer l’Europe politique. La conférence intergouvernementale s'interroge sur le projet néerlandais qui divise les Européens. > (la rupture ?).

Octobre 1991

Mardi 1er octobre 1991 : encerclement de Dubrovnik (côte croate) par les forces fédérales et blocus des principaux ports de Croatie.

Jeu 3 octobre 1991 : A Belgrade, réunion de la présidence collégiale yougoslave avec des responsables de l'armée. Les Serbes s’emparent du pouvoir en décrétant le « danger de guerre imminent ». Ils excluent les représentants de la Macédoine et de Bosnie-Herzégovine du présidium.

Vendredi 4 octobre 1991 : le Royaume-Uni et l'Italie rendent publique une déclaration commune sur la défense. Ils proposent que l’UEO développe le pilier européen de l’OTAN (Mais non qu’elle devienne un pilier autonome comme le défendent l’Allemagne et la France).

Lun 7 octobre 1991 : Stipe Mesic démissionne de la présidence de la Fédération yougoslave.

Lun 7 et 8 octobre 1991 : appel de Barcelone, lors d’un colloque organisé par La Fondation Bertelsmann sur le « défi méditerranéen et l’Europe », de personnalités européennes aux gouvernements de la CEE pour qu'ils : « reconnaissent l'indépendance de la Slovénie et de la Croatie ».

Texte signé notamment par Joseph Rovan, professeur émérite à la Sorbonne, Werner Maihofer, ancien ministre de l'intérieur de RFA, Luigi Vittorio Ferraris, ambassadeur d'Italie, Eduardo Fonsillas, ambassadeur d'Espagne, et Karl Heinz Narjes, ancien vice-président de la Commission de Bruxelles. (source Le monde).

Mardi 8 octobre 1991 : Déclaration d'indépendance de la Croatie et de la Slovénie (expiration du moratoire de trois mois accepté le 7 juillet)- Accord de cessez le feu, pas respecté.

• réunion des groupes de travail de la Conférence sur la Yougoslavie, à La Haye, en présence de représentants des minorités serbes en Croatie.

• Cyrus Vance émissaire de l’Onu pour favoriser le déploiement des casques bleus.

Jeu 10 octobre 1991 : Visite en Bulgarie du premier ministre croate, Franjo Greguric, visite du ministre français des Affaires étrangères Roland Dumas en Albanie (Tirana).

Ven 11 octobre 1991 : le chancelier Helmut Kohl et le président François Mitterrand présentent un projet de traité sur la politique étrangère et la sécurité commune.

Sam 12 octobre 1991 : les Douze décident de faire appel au Conseil de sécurité de l’Onu, la Croatie et la Serbie sont d’accord à l’envoi de casques bleus.

15 octobre 1991 : le Parlement bosniaque proclame la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine, son retrait éventuel de la Fédération yougoslave ; départ des députés serbes du SDS.

Le déploiement des forces européennes d'interposition à la frontière des deux républiques sera accepté avec enthousiasme par la Croatie, mais difficilement toléré par la Serbie. Placer ces forces entre les combattants signifierait reconnaître de facto l'occupation serbe d'une partie vitale pour la survie de la Croatie. L'histoire récente nous enseigne qu'on ne peut assurer la paix en cherchant le compromis avec l'agresseur et en payant des primes politiques à la violence et au non-respect des accords. Si l'on accepte l'annexion des territoires croates à la Serbie, le conflit se déplacera en Bosnie, puis en Macédoine, et se transformera en une lutte de partisans contre l'occupant.

Appliquer strictement le principe de non-ingérence, comme cela s'est fait jusqu'à présent, est une hypocrisie, car cette politique avantage le plus fort et revient ici condamner les démocraties nouvelles désarmées face à l'ancien appareil militaire communiste.

Si le monde libre veut vraiment aider les jeunes démocraties et arrêter les ambitions des dirigeants d'un national-communisme qui est le dernier avatar du stalinisme, il ne lui reste qu'un seul moyen : la reconnaissance immédiate de la souveraineté des républiques yougoslaves qui le demandent (Slovénie et Croatie) ou qui le demanderont, reconnaissance assortie, en vertu des accords d'Helsinki, de la garantie des frontières républicaines existantes.

Reconnues comme Etats souverains, la Croatie et la Slovénie seront sujets de droit international et comme tels pourront être aidés sans que soit enfreint le principe de non-ingérence. La garantie internationale de leurs frontières rendra sans objet l'actuelle guerre de conquête. La Yougoslavie actuelle n'est pas " eurocompatible " ; enchaînées par la force les unes aux autres, les républiques yougoslaves forment aujourd'hui, après le réveil des haines, un mélange tellement explosif que ses conflagrations peuvent être différées mais non évitées. La reconnaissance de la souveraineté étant inévitable, pourquoi attendre qu'elle soit payée par une prix encore plus élevé en vies humaines ?.

18 octobre au 5 novembre 1991 : les Douze proposent trois plans de paix, légèrement différents, visant à transformer la Yougoslave en une « Confédération de républiques indépendantes et souveraines » (projet assez proche de ce qu’avaient proposé les Slovènes et Croates en octobre 1990) (source H. Stark).

21 octobre 1991 : les Albanais du Kovoso se dotent d’un « chef de gouvernement de la République du Kosovo souveraine ».

21 octobre 1991 : le Conseil parvient à un accord sur la création de l'Espace économique européen (EEE).

Jeu 22 octobre 1991 : la présidence yougoslave annonce la nécessité d'intensifier la mobilisation dans les territoires qui choisiraient avec la Serbie de rester. (source LM 29 octobre).

Jeu 25 octobre 1991 : ultimatum de l’armée fédérale yougoslave aux Croates retranchés dans Dubrovnik pour qu’ils se rendent. Le gouvernement croate rejette l'ultimatum, dans la nuit du samedi au dimanche 27 octobre. (source LM 29 octobre).

• 7e session de la conférence de Paix.

Vendredi 25 octobre 1991 ? : Constitution de l'Assemblée du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine.

Vendredi 25 au Dimanche 27 octobre 1991 : référendum sur " l'entière autonomie politique et territoriale " de l'enclave musulmane du Sandjak, qui comprend six districts de Serbie et trois districts du Monténégro.

Sam 26 octobre 1991 : la Kninska-Krajina, enclave serbe de Croatie qui, après la tenue d'un référendum en août 1990, s'était proclamée région autonome serbe, décrète la mobilisation générale sur son territoire et exigé que tous les hommes aptes au combat ayant quitté la région rejoignent immédiatement leurs unités.

Par ailleurs, les autorités de la " province autonome serbe de Slavonie " (est de la Croatie), qui avaient appelé à maintes reprises tous les hommes entre seize et soixante ans à rentrer chez eux pour défendre leurs " foyers ", ont demandé vendredi aux entreprises de Serbie employant des réfugiés de Slavonie de les licencier (source Le Monde 29 octobre).

Dim 27 octobre 1991 : Invité du " Grand Jury RTL-le Monde, Bernard Kouchner dénonce l'abjection " du comportement des différentes factions dans la guerre civile yougoslave, qui empêchent le travail des équipes de secours aux blessés. Mais estime désormais " très difficile " d'envoyer une force d'interposition en Yougoslavie, " à moins de faire la guerre.

M. Kouchner a estimé que ce comportement constituait " une régression totale de l'action humanitaire ". Il a vivement critiqué le " chantage " exercé pour permettre l'accès aux blessés, et le rôle des milices, qui s'opposent selon lui à tout véritable cessez-le-feu. " Je vois des hommes qui veulent en découdre et qui me rappellent les pires images du Liban (.). Même au Liban, les Croix-Rouge n'ont jamais éclaté, elles sont toujours restées unies. La Serbie et la Croatie ont déjà fait éclater leurs Croix-Rouge, c'est infect. (LM 29 octobre).

Dim 27 octobre 1991 : A Dubrovnik, les autorités militaires entament des négociations avec le maire local et la mission d'observateurs européens dans le petit port de Cavtat, contrôlé depuis une semaine par les fédéraux. Selon l'un des membres de la Commission européenne, " toutes les questions sont restées au point mort (.) et l'armée n'a pas précisé ce qu'il adviendrait si ses conditions n'étaient pas acceptées ". (source LM 29 octobre).

28 octobre 1991 : Projet de Traité de la présidence néerlandaise sur l'Union économique et monétaire.

— Rencontre des Ministres des Affaires étrangères des Douze. Ils exigent que la Serbie lève sa réserve sur le plan Carrington.

Si elle ne le fait pas d’ici à la prochaine session, la conférence poursuivra les travaux sans elle. La Serbie devra alors s’attendre que des mesures restrictives soient prises à son encontre. Pour la première fois les ministres évoquent même la possibilité d’un embargo sur le pétrole et un gel des avoirs yougoslaves à l’étranger. « Les Douze avaient déjà rappelé maintes fois que la solution politique qu’ils envisageaient prévoyait la reconnaissance dans le cadre d’un règlement général de l’indépendance des républiques qui le désiraient ». La Grèce s’impatiente. Samaras, le Ministre des affaires étrangères prévint ses collègues que son pays n’accepterait jamais que la république de Macédoine fût reconnue sous ce nom. L’utilisation abusive par le gouvernement de Skopje du nom de « Macédoine » qui appartenait exclusivement au patrimoine hellène impliquait une revendication territoriale à l’égard de territoires grecs. Une démarche de la dernière chance de l’ambassadeur Winaendts auprès de Milosevic est décidée. « Milosevic comme c’estsvt le cas lorsqu’il se sent acculé, fut plutôt coopératif. Après le froid, il soufflait le chaud » (source Winaendts p.129).

— Rejet par les Serbes de l’ultimatum de cesser de bloquer le processus de paix.

Jeudi 30 octobre – 14 novembre 1991 : Conférence de paix sur le Proche-Orient à Madrid, en Espagne. La Communauté se voit confier un rôle de chef de file dans le cadre des négociations multilatérales devant se dérouler ultérieurement.

Novembre 1991.

Vendredi 1er novembre 1991 : l’ambassadeur Henry Wynaendts à Sarajevo « Il nous parut que la situation devenait de plus en plus tendue et dangereuse en Bosnie-Herzégovine. Le président Izetbegovic me dit combien il appréciait dans ces conditions la présence des observateurs européens.

Dim 3 novembre 1991 : Visite du ministre grec des Affaires étrangères, Antonis Samaras à Belgrade. Visite du président macédonien Kiro Gligorov en Lybie, entretien avec Khadafi.

Mardi 5 novembre 1991 : expiration de l'ultimatum que la CEE a lancé à la Serbie.

Les Serbes repoussent définitivement les plans de paix proposés par les Douze, acceptées par l’ensemble des autres républiques yougoslaves. Les Serbes insistent sur le droit de la minorité serbe en Croatie à disposer d’eux-mêmes (source : H. Stark).

- 8e session de la Conférence CEE sur la paix en Yougoslavie (La Haye).

Mer 6 novembre 1991 : la Commission décide la création d'un Office européen de l'aide humanitaire.

Jeu 7-8 novembre 1991 : Un nouveau concept stratégique de l'Alliance (Otan) est approuvé à Rome par les chefs d'Etat et de gouvernement au Conseil de l'Atlantique Nord.

• Vendredi 8 novembre 1991 : les Ministres des affaires étrangères réunis à Rome, en marge du Sommet de l’Otan, décident : 1) la dénonciation de « l’accord de coopération et de commerce », 2) des « mesures positives compensatoires » pour les républiques qui coopéreront, 3) demandent au conseil de sécurité de l’Onu la mise en place d’un embargo sur le pétrole (seul compétent.

Mais il faudra attendre plus six mois pour qu’un embargo soit décidé, le 30 mai 1992). le principe de sanctions économiques contre la Yougoslavie après le rejet par les Serbes de l’ultimatum. Le ton est alarmiste.

Le processus de négociation a « été mis en danger » par le refus serbe d’accepter les « éléments fondamentaux » du plan Carrington. La demande allemande d’une reconnaissance immédiate a été rejetée.

« La perspective d'une reconnaissance de l'indépendance des républiques qui souhaitent y accéder ne peut s'envisager que dans le contexte d'un règlement global comportant des garanties adéquates pour la sauvegarde des droits de l'homme et des droits des groupes nationaux ou ethniques ».

(Genscher à son retour en Allemagne est soumis à une forte pression, vivement critiqué notamment dans le FAZ, reprenant le lobby procroate).

En Croatie, de nombreuses installations de l’armée restent soumises au blocus. Vukovar, assiégée depuis plus de deux mois par l’armée et les irréguliers serbes est sur le point de tomber. Autour de Dubrovnik, les combats font rage. L’Allemagne menace de reconnaître sans plus tarder la Croatie. Le Saint-Siège y pousse aussi (l’ambassadeur Henry Wynaendts, p. 132).

Dim 10 novembre 1991 : Plébiscite des Serbes de Bosnie-Herzégovine sur leur maintien dans la Yougoslavie.

Mar 12-13 novembre 1991 : Conclave sur l'Union politique.

Ven 15 novembre 1991 : une des chambres du Parlement serbe décide de limoger Ante Markevic, Premier Ministre fédéral.

Dim 17 novembre – 23 novembre 1991 : mission de Vance en Yougoslavie.

« Vance est un homme de bien, croyant, membre pratiquant de l’Eglise épicopalienne. Il croit aux vertus de la négocaition et du compromis. Pour lui Milosevic est un partenaire incontournable dans toute négociation, dont il doit s’assurer le concours. Lorsque l’occasion se présente, il n’hésite pas à lui décerner marques d’estime et de reconnaissance. En janvier 1993, il le remercie publiquement pour sa « grande contribution » à la cause de la paix, pour avoir obligé les Serbes de Bosnie-Herzégovine à dire un « oui » des plus ambigus à son plan de paix. (…) Sûr de ses vérités Vance n’aime pas être contredit. Dans la discussion, il interrompt souvent ses interlocuteurs d’un ton péremptoire : « can I interrupt you … Can I a ask you a question » (…) (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 138).

Lun 18 - 19 novembre 1991 : prise de contrôle total de Vukovar (Slavonie occidentale, Croatie) par l’armée fédérale yougoslave et l’armée serbe. La ville était assiégée depuis trois mois. C’est le symbole de la résistance croate qui tombe. Selon GM Chenu.

On estime les seules victimes croates de Vukovar à 2 000 morts, 2 500 invalides et 2 700 disparus et à 50 000 personnes déplacées pour tout le district.

jeudi 21 novembre 1991 : Nomination du nouveau premier ministre yougoslave.

Ven 22 novembre 1991 : Rencontre des ministres italien et allemand des affaires étrangères, Gianni de Michelis et Hans Dietrich Genscher, à Venise.

Sam 23 novembre 1991 : fin de la mission Vance en Yougoslavie.

26 novembre 1991 : Milosevic suggère à Vance, représentaant personnel du Secrétaire général que l’ONU envoie une force maintien de la paix. Il écrit au président du Conseil de sécurité pour demander au nom du gouvernement yougoslave « l’établissement d’une opération de maintien de la paix en Yougoslavie ».

« Milosevic n’avait jamais le rôle que la Communauté européenne jouait en Yougoslavie. Avec les Nations-Unies il se sentait plus à l’aise. La Yougoslavie y avait joui, grâce au leadership du mouvement des non alignés, d’une certaine influence. De plus les Nations-Unies avaient une tradition de non ingérence et de maintien du statu quo, dont le président serbe entendait pouvoir tirer profit. (…) Milo et Kadijevic veulent que les forces des Nations-Unies soient déployées en Croatie sur la ligne de front, créant ainsi une zone tampon entre les forces qui s’opposent » (et protégant ainsi les acquis territoriaux serbes). « Vance en discute avec Van den Broek. Ils se rencontrent à l’aéroport d’Amsterdam. Il faut éviter à tout prix – lui dit le ministre néerlandais – de répéter la faute commise à Chypre, où déployées comme elles le sont, sur la « ligne verte », les forces des Nations-Unies y protègent en fait les acquis territoriaux turcs. Cela a rendu toute solution du problème chypriote encore plus ardue. » (l’ambassadeur Henry Wynaendts, p. 136).

27 novembre 1991 : le Conseil de sécurité de l’Onu adopte à l’unanimité une résolution soutenant les efforts de Cyrus Vance pour favoriser le déploiement de casques bleus.

Jeudi 28 novembre 1991 : en visite à Paris, Le ministre polonais des Affaires étrangères Krzysztof Skubiszewski est convaincu "on va finir par trouver un nombre d'Etats suffisant pour reconnaître la Croatie".

Selon lui, la Pologne "ne veut pas se singulariser" mais elle fait partie des Etats qui envisagent de reconnaître les Républiques sécessionnistes de Slovénie et de Croatie. "Nous donnons la priorité au processus de consultation des Douze dans le cadre de la conférence de la Haye. Il n'y aura pas d'initiative isolée", s'est-il toutefois empressé de préciser (source AFP).

A Bonn, consultation entre le chancelier allemand Helmut Kohl et les chefs de gouvernement britannique John Major, italien Giulio Andreotti et néerlandais Ruud Lubbers afin de préparer le sommet européen de Maastricht.

Premier avis de la Commission Badinter d’arbitrage. Il reconnaît que la république de Yougoslavie est engagée « dans un processus de dissolution ». Et il appartient aux républiques de régler « conformément aux principes et aux usages internationaux » les nombreux problèmes de succession d’Etat qui en découlent (respect des droits de l’homme et de minorités, liens entre les républiques, partage des avoirs et des dettes). (l’ambassadeur Henry Wynaendts p.150).

Décembre 1991

1-2-3 décembre 1991 : Conclave sur l'Union économique et monétaire.

2-3 décembre 1991 : Conférence intergouvernementale sur l'Union politique.

2 décembre 1991 : élections en Bosnie-Herzégovine, défaite des communistes, victoire des nationalistes.

6 décembre 1991 : les Etats-Unis imposent des sanctions à l’ensemble des républiques yougoslaves après les bombardements d’Osijek et Dubrovnik.

7 décembre 1991 : Avis de la Commission Badinter sur l’éventuelle reconnaissance des républiques issues de la fédération yougoslave.

8 décembre 1991 : Visite du président croate, Franjo Tudjman à Bonn (Allemagne).

9-10 décembre 1991 : Conseil européen de Maastricht. Approbation des nouveaux Traités (CIG coopération politique et CIG union économique et monétaire). La situation critique en matière d’approvisionnement alimentaire à Moscou et Saint-Petersbourg fait l’objet de mesures spécifiques. Plus généralement l’évolution de la situation en Union soviétique attire son attention (une déclaration est faite). Rien sur la Yougoslavie. ??.

9 décembre 1991 : lord Carrington réunit, de façon informelle, les six présidents des Républiques (les sessions plénières sont toujours ajournées).

« Tudjman et Kucan poussèrent à la reconnaissance. Alija Izetbegovic et Gligorov furent d’une extrême prudence. Il fallait qu’intervienne un règlement général de la crise yougoslave. Izetbegovic estimait que l’on courait droit au drame si l’on reconnaissait la Bosnie-Herzégovine avant que des forces des Nations-Unies n’y soient déployées. (…) Le forcing allemand pour amener les Douze à reconnaître la Slovénie et la Croatie ne se relâchait pas et le chancelier Kohl avait même déclaré que l’Allemagne le ferait avant Noël » (…) Carrington fit remarquer aux Douze que si l’on rompait le lien entre ces questions (notamment droits de l’homme et minorités, voir avis n°1 comm arbitrage) et la reconnaissance des Républiques, on mettait la conférence elle-même en péril. Les Croates, ayant obtenu ce qu’ils voulaient n’auraient plus de raison de faire des concessions sur le point épineux du statut à accorder aux Serbes de Croatie. Quant à la Serbie, quel intérêt aurait-elle de rechercher une solution dans le cadre de la conférence puisque l’affaire aurait été jugée ? Carrington rappela aux Douze que Milosevic avait été très net sur la Bosnie-Herzégovine : si son indépendance était reconnue avant qu’un accord entre les trois communautés ait été préalablement conclu, une guerre civile devenait inévitable. (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 149 et 150).

10 décembre 1991 : le Secrétaire général des Nations-Unies, Perez de Cuellar, écrit aux Douze une lettre dans lesquels il les met en garde contre une reconnaissance « prématurée de certaines républiques yougoslaves ». Un tel développement « pourrait mettre le feu aux poudres, notamment en Bosnie-Herzégovine ». (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 151).

11 décembre 1991 : le Secrétaire général des Nations-Unies soumet le plan « Vance » au Conseil de sécurité. Territoires démilitarisées, envoi de 10.000 hommes des Nations-Unies dans les « régions de Croatie, où les Serbes constituent une majorité ou une minorité substantielle ». Zones protégées et policiers pour s’assurer qu’il n’y a ni discrimination ni violation des droits de l’homme.

Il attire l’attention des membres du Conseil sur les risques qu’une reconnaissance prématurée de certaines républiques ferait encourir au processus de Paix.

15 décembre 1991 : le Conseil de sécurité de l’Onu adopte la résolution 724 qui donne l’accord au plan Vance, prévoit l’envoi en Yougoslavie d’une vingtaine d’observateurs militaires et renforce l'embargo sur les armes.

• 16 décembre 1991 : le conseil des Ministres Affaires générales à Bruxelles, présidé par le Néerlandais Hans Van Den Broek, définit une procédure de reconnaissance de l'indépendance des républiques yougoslaves. La reconnaissance est soumise à des critères (respect des « lignes directrices » + projet de Convention en examen à la Conférence de Yougoslavie), les républiques souhaitant quitter la fédération yougoslave doivent adresser une demande, avant le 23 décembre, soumise à la Commission d’arbitrage Badinter, la reconnaissance pouvant intervenir le 15 janvier 1992. Les Douze ont fixé des critères pour examiner les demandes de reconnaissance (NB : lignes précises, anticipatives, l’Europe reprendrait-elle le dessus).

Le Conseil adopte « des lignes directrices sur la reconnaissance de nouveaux Etats en Europe orientale et en Union soviétique » (résultat de la demande du Conseil européen). Attachement au « principe d’autodétermination », « tenant compte des réalités politiques dans chaque cas concret ». Critères: constitués sur une « base démocratique », ont « accepté des obligations internationales », « engagés de bonne foi dans un processus pacifique et négocié ». Respect des dispositions de la Charte des Nations unies et engagements de l’acte final d’Helsinki et de la Charte de Paris, notamment en ce qui concerne l’Etat de droit, la démocratie et les droits de l’homme ; la garantie des droits des groupes ethniques et nationaux et des minorités (engagements CSCE) ; respect de l’inviolabilité des limites territoriales qui ne peuvent être modifiées que par des moyens pacifiques et d’un commun accord; reprise de tous les engagements pertinents relatifs au désarmement et à la non-prolifération nucléaire ainsi qu’à la sécurité et à la stabilité régionale ; engagement à régler par accord, notamment le cas échéant par recours à l’arbitrage, toues les questions afférentes à la succession d’Etats et aux différents régionaux. La Communauté affirme ensuite ne pas vouloir reconnaître les « entités qui seraient le résultat d’une agression » et vouloir prendre « en considération les effets de la reconnaissance sur les Etats voisins ».

« L’atmosphère est tendue. Les discussions durent jusqu’aux petites heures du matin. Le traité de Maastricht vient d’être conclu cinq jours plus tôt. Cela pèsera lourd dans les débats. Il est en effet impensable que les Douze n’arrivent pas à une position commune. L’Allemagne est déterminée à ce que la Slovénie et la Croatie soient reconnues. La Serbie doit savoir, expliquer Genscher, qu’elle ne peut agir impunément. Qu’a-t-elle fait depuis la dernière réunion des Douze du 8 novembre à Rome. Elle a fini de réduire Vukovar en cendres et continue de s’en prendre même au centre historique de Dubrovnik. L’argument porte. En fin de compte, les Douze décident de reconnaître l’indépendance de « toutes » les républiques qui le désiraient (sans distinction). (…) Les ministres avaient presque terminé le 16 décembre avec leurs délibérations lorsque Antonis Samaras, l’élégant et fougueux ministre grec, souleva le problème de la Macédoine. Tout le monde était épuisé et l’on ne voulait pas rouvrir le débat sur la reconnaissance. Samaras n’eut donc pas grand mal à faire ajouter à la déclaration ministérielle « un pays devait s’engager à s’abstenir de tout acte de propagande hstile envers un pays voisin appartenant à la Communauté européenne, y compris l’utilisation d’un nom qui impliquerait une revendication territoriale ». (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 151).

18 ou 19 décembre 1991 : Signature au 13e étage du batiment Charlemagne des "accords européens" avec la Pologne, la Hongrie et la Tchécoslovaquie.

18 ou 19 décembre 1991 : Carrington se rend en Yougoslavie pour expliquer aux présidents des six républiques la décision européenne.

Tudjman est particulièrement loquace. Milosevoc fulmine : la Communauté européenne n’avait nullement reçu mandat pour abolir la Yougoslavie. Bulatovic redit en termes plus aimables ce que Milosevic avait déjà expliqué. Izetbegovic est très inquiet. (…) Carrington repartir pessimiste. Sa visite avait confirmé ses pires appréhensions. La décision des Douze de reconnaître les Républiques, avant la conclusion d’un accord global, avait « sapé » les bases même de la conférence de la paix. Il n’avait plus de moyens de pression et serait désormais tributaire du bon vouloir des parties. La décision de demander à la Bosnie-Herzégovine si elle voulait être indépendante était une « erreur tragique ». Un tel scénario était inacceptable pour les Serbes et il ne pouvait, à moins d’un déploiement rapide « d’une importante présence des Nations-Unies en Bosnie-Herzégovine » que déboucher sur une guerre civile. Or Vance ne voulait pas envisager l’envoi de casques bleus dans cette République. (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 154).

19 décembre 1991 : l’Allemagne décide de reconnaitre, sans attendre l’avis de la Commission d’arbitrage la Slovénie et la Croatie (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 154).

— le Parlement de Krajina (serbes de Croatie) proclame la « République de Krajina Serbe », dont Milan Babic devient président.

20 décembre 1991 : la Bosnie-Herzégovine présente sa demande de reconnaissance à la Communauté européenne. Alija Izetbegovic est élu président de la république après les élections du 2 décembre.

21 décembre 1991 : les présidents des républiques de l'Union soviétique, à l'exception de la Géorgie, signent, à Alma-Ata, au Kazakhstan, un accord créant la Communauté des États indépendants (CEI).

23 décembre 1991 : le conseil des Ministres des Affaires générales (CEE) décide de l’extension de l’aide économique (Phare) à l’Albanie et aux Etats Baltes, ainsi que d’une aide alimentaire d’urgence. Rien sur Yougoslavie.

23 décembre 1991 : l’Allemagne reconnaît officiellement la Croatie et la Slovénie.

25 décembre 1991 : M. Gorbatchev démissionne de ses fonctions de président de l'Union soviétique.

31 décembre 1991 : le présidium serbe-monténégrin (ex-Yougoslavie) donne son aval au plan de paix de l’Onu, de Cyrus Vance.

Bilan 1991 : Au cours de la seule année 1991, quelque 20.000 personnes sont tuées, plus de 200.000 personnes s'enfuient du pays, et 350 000 deviennent des déplacés internes. (source : Documentation française). De source croate : en six mois, plus de 10 000 morts, et exode de 500.000 personnes.

1992

Janvier 1992

Le Portugal prend la présidence de la CE. C’est la première fois.

1992 ? : mise en place d'institutions parallèles au Kovoso. Ibrahim Rugova est élu à la «présidence». Le scrutin est jugé illégal par les Serbes.

? 1992 : création d’ECHO, l’Office d’aide humanitaire de la CE.

1992 : pourparlers à Lisbonne, sous direction de la communauté internationale, entre Bosniaques, Croates et Serbes qui aboutirent au traité de partage de la Bosnie-Herzégovine en trois cantons.

Ce traité voit deux jours plus tard le retrait de la signature du président de la république de Bosnie-Herzégovine, le Bosniaque (musulman) Alija Izetbegovic.

1er janvier 1992 : l’émissaire de l’Onu, Cyrus Vance obtient l’accord de Belgrade et Zagreb pour un cessez-le-feu (le quinzième depuis le début de la guerre civile) et le déploiement de casques bleus en Croatie. Il parvient à un accord sur le plan des opérations de paix en Yougoslavie, avec les présidents croate, serbe et le ministre yougoslave de la défense : Franjo Tudjman, Slobodan Milosevic et Veljko Kadijevic.

3 janvier 1992 : Entrée en vigueur du quinzième cessez-le-feu en Croatie.

Lun 6 Janvier 1992 : en visite à Sarajevo, Lord Carrington propose l’ouverture dans le cadre de la conférence de la paix, des négociations sur l’avenir de la Bosnie-Herzégovine. Ces négociations sont confiées à Cutileiro, diplomate portugais. Boutros Boutros-Ghali, doit présenter au Conseil de sécurité à New-York, un rapport sur la situation en Yougoslavie. Une nouvelle réunion de la conférence de paix est programmée pour le 9 janvier.

Mar 7 janvier 1992 : la destruction en vol, d'un hélicoptère de la CEE par l'armée de l'air yougoslave, provoque la mort de cinq observateurs, due à des « erreurs » de l'armée yougoslave, des observateurs européens et « un malheureux concours de circonstances » lié à la "situation extrêmement difficile régnant dans l'espace aérien", selon le Ministère yougoslave de la Défense.

l'incident condamné par le Conseil de sécurité, après une réunion informelle sous la forme d'une déclaration de son président, l'ambassadeur de Grande-Bretagne, Sir David Hannay. Le Conseil demande des assurances aux autorités yougoslaves pour que de tels incidents ne se reproduisent plus et prend note du fait que ces dernières s'engagent à prendre " toutes les mesures nécessaires " après cette " violation flagrante " du cessez-le-feu.Sir David Hannay précise que cet épisode n’aura pas de conséquences négatives sur la décision d'envoyer 56 observateurs onusiens en Yougoslavie, figurant dans une résolution qui doit être adoptée mercredi après-midi.

Mer 8 janvier 1992 : Une nouvelle résolution du Conseil de sécurité (721), approuvée à l'unanimité, demande à toutes les parties du conflit yougoslave d'honorer les engagements pris à Genève et à Sarajevo " et " réaffirme la décision d'embargo sur les armes déjà en place depuis septembre dernier ".

Jeu 9 janvier 1992 : réunion plénière de la conférence de la paix. « rien de nouveau » (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 155).

Ven 10 janvier 1992 : démission du représentant de la Macédoine, Vasil Tupurkovski, au gouvernement fédéral.

Sam 11 janvier 1992 : la Commission Badinter rend ses conclusions sur la reconnaissance des républiques de l'ex-Fédération (avis numéro 2). Elle rejette le droit à l’autodétermination des Serbes de Bosnie-Herzégovine et de Croatie, ils ne peuvent faire sécession et doivent se contenter de bénéficier à l’intérieur des républiques, de tous « les droits reconnus aux minorités ». Sur les frontières, elle estime que « les lignes de démarcation internes acquièrent le caractère de frontières protégées par le droit international ».

Sur les républiques, la Slovénie et la Macédoine satisfont à toutes les conditions. Pour la Macédoine, elle constate qu’elle a renoncé à toute revendication territoriale et, dès lors que l’utilisation du nom « Macédoine » ne saurait impliquer aucune revendication territoriale à l’égard d’un autre Etat ».

Sur la Croatie, elle estime que la loi constitutionnelle du 4 décembre 1991 « ne recouvre pas intégralement toutes les dispositions » du projet Carrington. La République doit compléter la loi. « Sous cette réserve, la Croatie satisfait aux conditions requises ».

Sur la Bosnie, elle estime que si les Serbes ne peuvent y faire sécession, « l’expression de la volonté des populations de Bosnie-Herzégovine de constituer cette république en Etat souverain et indépendant ne peut être considérée comme pleinement établie ». Elle suggère « la tenue d’un référendum auquel seraient appelés à participer tous les citoyens, sans distinction aucune et sous contrôle international ». (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 156).

La Communauté européenne, suivie bientôt par les Etats-Unis et l'ONU elle-même, ne suit pas ses avis : elle reconnaît la Slovénie et la Croatie, mais pas la Macédoine.

Sam 11 et 12 janvier 1992 : référendum sur l'autonomie politique et territoriale, prévu par les Albanais de souche de Macédoine.

Mar 14 janvier 1992 : le premier détachement de Casques bleus arrive en Croatie. Mais les dirigeants serbes de cette République s’opposent à leur déploiement.

Mer 15 janvier 1992 : la Communauté européenne demande à la Bosnie- Herzégovine d’organiser un référendum d’autodétermination. (erreur ?) Les Douze reconnaissent l’indépendance de la Slovénie et de la Croatie (et de la Macédoine $VERIFIER). L’acte entérinant la fin de la Fédération est signé à Zagreb.

Février 1992

2 février 1992 : Mate Boban remplace Stjepan Kljujic à la tête du HDZ (Communauté démocratique croate) de Bosnie.

• 3 février 1992 : rétablissement des relations économiques (sauf avec la Serbie). le Conseil des Ministres des Affaires générales décide de mesures « positives » pour les produits originaires de Croatie, la Slovénie, la Bosnie, la Macédoine et le Monténégro (NB : il y a là une différenciation déjà entre la Serbie et les autres républiques yougoslaves).

Ces « règlements ont pour objet de restaurer en faveur des ces Républiques qui coopèrent au processus de paix la totalité des concessions commerciales dont bénéficiait antérieurement la Yougoslavie et qui avaient été partiellement rétablies en leur faveur le 15 novembre 1991 ». Le Conseil prend bien soin de préciser que les dénominations utilisées est de « nature uniquement géographique et ne préjuge pas les futurs statut politique et dénominations de ces entités ».

5-6 février 1992 : Peter Carrington se rend en Yougoslavie pour tenter de désamorcer la crise qui s’annonce en Bosnie-Herzégovine. « J’ai le sombre pressentiment que tout est en place pour le drame qui s’annonce et que, telle une tragédie grecque, il ira inexorablement à son terme ».

7 février 1992 : signature du traité de Maastricht.

• 21 février 1992 : décision unanime du Conseil de sécurité de l’ONU pour l’envoi d’une force de protection (Forpronu) dotée de 14 000 hommes, civils et militaires (résolution 743).

(Nicolas Gros-Verheyde)

Lire aussi les dossiers

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[Dossier n°01] L’Europe face aux premiers soubresauts yougoslaves

(B2) Quand arrivent les premiers évènements en Yougoslavie, l'Europe a la tête ailleurs. Le mur de Berlin vient de tomber. La réunification allemande est à l'ordre du jour. L'Europe s'approfondit : les accords de Schengen sont signés. Les fondements de l'Union économique monétaire sont posés lors d'une nouvelle Conférence intergouvernementale. Les États membres se divisent sur l'Europe politique. La crise du Golfe fait rage.

Jacques Delors (Commission européenne), G. de Michelis (présidence italienne), J. Poos (Luxembourg), H.D. Gensher (Allemagne), R. Dumas (France) à la réunion des ministres des affaires étrangères le 16 décembre 1991 (crédit : Commission européenne / Archives B2)

Les préliminaires

Les 5-6 octobre 1988. Incidents à Novi-Sad en Voïvodine, après une manifestation en faveur du resserrement des liens avec la Serbie. La direction politique de la province démissionne. Une équipe proche du pouvoir serbe de Milosevic est installée.

Les 8-9 octobre 1988. Violentes manifestations à Titograd, au Monténégro, contre la baisse du niveau de vie. Le gouvernement de la République démissionne dans la nuit du 25 au 26 octobre.

Du 17 au 21 novembre 1988. Manifestations au Kosovo.

Le 19 novembre 1988. Manifestation d’un million de Serbes à Belgrade pour soutenir la minorité serbe du Kosovo.

Le 11 janvier 1989. La direction du Monténégro démissionne sous la pression de manifestants. Un nouveau pouvoir s’installe proche du pouvoir serbe de Milosevic. Création en Slovénie de l’Union des démocrates slovènes qui milite pour une véritable démocratie parlementaire.

Le 19 janvier 1989. Nomination du Croate Ante Markovic comme Premier ministre yougoslave. Il plaide en faveur d’un socialisme nouveau et pour une économie de marché.

Le 28 juin 1989. Fête du nationalisme serbe pour le 600e anniversaire de la bataille du Champ des Merles contre les Turcs. Un million de Serbes, soit le cinquième de la population adulte, font un triomphe à Milosevic lorsqu'il annonce un programme de «reconquête» du Kosovo.

Les 8-9 décembre 1989. Le Conseil européen réuni à Strasbourg (présidence française de la CEE oblige) constate que la majorité nécessaire est réunie (le Royaume-Uni est contre) pour convoquer une conférence intergouvernementale pour modifier le Traité, avant la fin 1990, en vue des étapes finales de l'Union économique et monétaire. L'heure est à l'élargissement vers l'Est. Il déclare suivre « avec attention et intérêt les réformes importantes prévues en Yougoslavie et confirme l'engagement de la Communauté d'examiner - dès conclusion de l'accord avec le Fonds monétaire - les mesures supplémentaires de soutien du programme d'assainissement de la situation économique et financière du pays ».

La Yougoslavie vient plaider sa cause à Bruxelles

Le 8 mars 1990. Ante Markovic, premier ministre yougoslave, vient à Bruxelles, plaider auprès de Jacques Delors, pour une aide accrue de la CEE, selon le quotidien Le Monde.

Le 28 avril 1990. Le Conseil européen spécial de Dublin est le sommet de l’euphorie. Les avancées démocratiques en Europe centrale et l’unification allemande dominent. Les Douze décident d’étendre à cinq pays – dont la Yougoslavie (avec la RDA, la Tchécoslovaquie, la Roumanie et la Bulgarie) – les mesures prises par le groupe des 24 (groupe des ministres des finances de la CEE + AELE + USA, Canada, Turquie, Australie, Nouvelle-Zélande, Japon).

Le 13 mai 1990. Au stade Maksimir de Zagreb, des incidents violents éclatent entre supporters du Dynamo de Zagreb et de l’Étoile Rouge de Belgrade. Incidents sciemment provoqués.

Le 18 juin 1990. Le Conseil des Ministres des Affaires générales des CE prend acte de la communication de la Commission sur l’avenir des relations entre la Communauté et la Yougoslavie, présentée par le commissaire européen Abel Matutes.

Le 26 juin 1990. Suspension du gouvernement et du Parlement du Kosovo. Les députés du Kosovo continuent de se réunir clandestinement. Ils déclarent la « souveraineté » du Kosovo.

Le 2 juillet 1990. Les députés albanais du Kosovo (chassés du Parlement) publient une Déclaration constitutionnelle, faisant du Kosovo une République, à égalité avec les autres. La Slovénie adopte une déclaration de souveraineté.

Le 25 juillet 1990. L’Assemblée nationale croate proclame la souveraineté de Croatie. Le même jour, dans la localité de Srb en Croatie, un rassemblement des Serbes de Croatie adopte une Déclaration sur la souveraineté et l'autonomie du peuple serbe et un Conseil national serbe, chargé de représenter les Serbes de Croatie, est créé.

Le  2 août 1990. Crise du Golfe. Début de l'invasion du Koweït par l'Irak.

Le 17 août 1990. Le soulèvement serbe commence en Croatie, après une attaque des forces spéciales de la police croate sur le poste de police de Benkovac contrôlé par les Serbes, ces derniers saisissent des armes des policiers de réserve et élèvent des barricades sur les routes.

Du 19 août au 2 septembre 1990. Les Serbes se prononcent, peu après, à 99 % des voix (!) pour leur séparation de la Croatie.

Le 3 septembre 1990. Au Kosovo, c’est la grève générale et le début du renvoi de la plupart des Albanais des postes de l’administration (75.000 personnes seront chassées en un an de leur poste après cette grève).

Le 7 septembre 1990. Après un référendum clandestin, le Kosovo promulgué adopte, dans le cadre yougoslave, la Constitution de « sa République » promis à devenir la 7e République fédérative socialiste de Yougoslavie (non reconnue par les Serbes). Une proclamation symbolique.

Le 11-12 septembre 1990. En Bosnie-Herzégovine, commencent des troubles interethniques. L’état d’urgence est proclamé.

Le 28 septembre 1990. La Serbie abolit le statut d’autonomie de sa province du Kosovo. Le parlement de la province avait déjà été dissous début juillet.

Le mardi 2 octobre 1990. L'Union de l'Europe occidentale (UEO) réfléchit à la création d'une « force d'action rapide européenne » qui pourrait intervenir militairement hors de la zone d'opération de l'OTAN, indique, à Bruxelles, le Belge Armand De Decker, président de la commission politique de l'Assemblée de l'UEO.

Le vendredi 5 octobre 1990. Les présidents slovène et croate proposent la restructuration de la Yougoslavie sur un modèle « confédéral », composée de six Républiques souveraines, dotées d’une monnaie, d’une armée et d’une représentation diplomatique propres. L’armée fédérale yougoslave investit le quartier général de la défense territoriale de Slovénie, à Ljubljana, après le refus du gouvernement slovène de placer sa défense sous le commandement de l’armée yougoslave.

Les samedi/dimanche 6 et 7 octobre 1990. A Asolo / Venise (Italie), lors de leur réunion informelle, les ministres des Affaires étrangères parlent de politique étrangère commune. Ils établissent une liste de sujets d'intérêt commun.

Les samedi/dimanche 27 et 28 octobre 1990. Un Conseil européen spécial se réunit à Rome pour finaliser le lancement des deux conférences intergouvernementales (Union économique et monétaire et Union politique). Les Douze se prononcent pour le maintien de l’unité et de l’intégralité territoriale de la Yougoslavie. Mais c’est surtout la crise du Golfe et la guerre Irak-Koweit qui inquiètent.

Le 18 novembre 1990. Les premières élections libres en Bosnie-Herzégovine, sont marquées par la victoire des partis nationalistes. Alija Izetbegovic est nommé président de la Présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine.

Le 15 décembre 1990. Le Conseil européen de Rome lance les deux Conférences intergouvernementales (CIG).

Le 21 décembre 1990. La Krajina se déclare autonome. Le 22 décembre, le Parlement de Croatie proclame une nouvelle constitution, avec le droit de faire sécession et la la modification du statut de la communauté serbe en « minorité nationale ». Le 23 décembre, un référendum en Slovénie donne à une large majorité (95%) le retrait de la fédération yougoslave (RFSY). L'indépendance est proclamée le 26 décembre.

Février 1991. Une délégation du Parlement européen se rend en Yougoslavie et au Kosovo

Le 20 mars 1991. Les ministres des Affaires étrangères discutent informellement à Montdorf-les-bains de politique étrangère et de sécurité et notamment du rapport entre l'UEO et l'Union politique.

Le 31 mars 1991. Incident au parc national des lacs de Plitvice. Des policiers croates en bus tombent dans une embuscade tendue par les serbo-croates. 2 tués : un policier croate, un serbo-croate, et 20 blessés.

Avril 1991. La Troïka européenne se rend à Belgrade pour prôner la dialogue et le non recours à la force.

8-9 avril 1991 : Un Conseil européen extraordinaire est réuni à Luxembourg pour traiter des problèmes du Golfe et du Moyen-Orient. En marge de ce Conseil, les ministres des Affaires étrangères tiennent une réunion informelle de l'UEO.

17 avril 1991 : James Baker remet aux Douze une note en cinq points sur la défense de l'Europe.

XXX A FAIRE XX + Dossier défense

27-28 avril 1991 : réunion des Ministres des affaires étrangères autour du processus de paix au Proche-Orient et la protection des populations kurdes d’Irak ; et de la mise en place d’une politique de défense commune.

Les clivages semblent bien rester entiers. Trois pays membres _ le Royaume-Uni, les Pays-Bas et le Portugal, _ sans nier l'opportunité de renforcer le pilier européen de l'Alliance et en se prononçant en faveur d'une force d'intervention européenne susceptible d'intervenir hors de la zone de l'OTAN, estiment que les principales décisions ayant trait à la défense de l'Europe doivent continuer à être prises au sein de l'OTAN et de sa structure de commandement intégrée. Cela correspond pour l'essentiel à ce que demande M. James Baker.

Huit Etats membres (l'Irlande en raison de sa neutralité se tient délibérément en marge de la discussion), en soulignant qu'ils ne cherchent d'aucune manière à affaiblir l'Alliance atlantique, revendiquent plus d'autonomie pour la Communauté ; la France, vite suspectée d'anti-américanisme par ses partenaires, le fait, c'est vrai, avec une particulière netteté.

Lors d'une précédente réunion, les ministres avaient chargé leurs directeurs politiques de réfléchir sur les liens établis entre l'UEO (Union de l'Europe occidentale) et la Communauté, d'une part, l'UEO et l'Alliance atlantique d'autre part. L'UEO devait-elle jouer le rôle d'une simple passerelle entre l'union politique des Douze et l'Alliance (position du Royaume-Uni, des Pays-Bas et du Portugal), ou bien, mettant en oeuvre les orientations du Conseil européen, apparaître davantage comme le porte-parole de la Communauté (position des huit autres Etats membres) ? Dans le rapport qu'ils ont présenté aux Douze, les directeurs politiques, en présence de ces deux thèses, se sont livrés à un exercice d'équilibre jugé apparemment par les ministres d'un intérêt limité, la principale originalité de leur document consistant à préconiser le déménagement d'un secrétariat de l'UEO de Londres à Bruxelles ! " Nous devons d'abord traiter le problème de fond : les Européens veulent-ils bâtir entre eux une communauté de défense ? Il faut recentrer notre discussion sur les contours que nous voulons donner à l'union politique. L'organisation des relations de l'UEO avec l'Alliance atlantique ne constitue pas le problème central ", a commenté M. Roland Dumas. Comme pour illustrer ce changement de tactique, les ministres ont chargé leurs représentants personnels, ceux-là mêmes qui rédigent le traité sur l'union politique, de reprendre en main l'examen du dossier " Sécurité ", lequel, selon M. Jacques Delors, apparaît d'ores et déjà comme un des principaux points de l'ordre du jour du Conseil européen de la fin juin.

Mai 1991

Le 2 mai 1991 : Conflit armé entre les habitants de Borovo Selo et des unités de la police croate. Une douzaine de policiers croates « tombent » dans une « embuscade » à Boroso Selo. Les cadavres seront retrouvés plus tard.

12 mai 1991 ? référendum en Krajina pour l’autonomie.

15 mai 1991 : le Croate Stipe Mesic n’est pas élu à la tête de la présidence collégiale. Les représentants de Serbie, Monténégro, Voïvodine, Kosovo refusent la rotation.

Le Premier ministre français Michel Rocard démissionne.

16 mai 1991 : l'Assemblée de la Région autonome serbe de Krajina proclame le rattachement de la Krajina à la République de Serbie.

19 mai 1991 : référendum en Croatie. Près de 95% des votes se prononcent pour un Etat souverain et indépendant. Si la participation atteint 70%, les Serbes de Croatie (environ 10% de la population) le boycottent.

21 mai 1991 : Contribution de la Commission européenne sur la PESC.

29 mai 1991 : proclamation de l’indépendance de la Croatie.

Juin 1991 : le début de la guerre

Lundi 3 juin 1991 : réunion des Ministres des affaires étrangères à Dresde consacrée au futur traité d’Union politique. Les « fédéralistes » s’opposent aux « unionistes ».

Les premiers, au nom de la cohérence et de l'efficacité de l'action collective, plaident pour un modèle communautaire unique. Il s'agit de la Commission européenne ainsi que six pays (Pays-Bas, Belgique, Italie, Portugal, Grèce et Allemagne dans une moindre mesure). Les seconds, réaliste, constatant que les Douze ne pourront traiter de la politique étrangère selon les mêmes procédures que pour la politique monétaire ou agricole, militent pour un nouveau traité plus " décentralisé " où, une fois les objectifs communs rappelés, seraient abordés séparément, selon leurs mérites propres et avec des règles pouvant varier, écrit Philippe Lemaitre pour Le Monde. La présidence luxembourgeoise propose un compromis entre ces deux visions : un traité avec trois " piliers " distincts : 1) le champ d'application traditionnel de la Communauté et l'union économique et monétaire ; 2) la coopération intergouvernementale en matière judiciaire et policière ; 3) la politique étrangère et de sécurité commune. NB : C'est ce plan qui donnera lieu au Traité de Maastricht accolé au Traité de Rome et qui perdurera jusqu'au Traité de Lisbonne.

Mardi 18 juin 1991 : la présidence luxembourgeoise rend public ses deux projets de Traité sur l'Union politique et sur l'Union économique et monétaire.

Mercredi 19 juin 1991 : Ouverture de la première session du conseil de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) à Berlin, en Allemagne.

Vendredi 21 juin 1991 : en visite à Belgrade, le secrétaire d'Etat américain, James Baker, " déconseille " aux républiques d'engager " toute action unilatérale ". Il annonce que les Etats-Unis « ne reconnaîtront pas la Slovénie en tant qu'Etat indépendant ».

Dimanche 23 juin 1991 : Réunis informellement à Dresde (Allemagne), les ministres des Affaires étrangères décident de ne pas reconnaître l’indépendance de la Slovénie et de la Croatie, si les deux républiques veulent quitter la Yougoslavie.

— Ils discutent de la structure et de la forme du Traité sur l'Union politique. Il est admis que le chapô de l'accord évoquera le but final de l'Union politique.

Lundi 24 juin 1991 : le Parlement fédéral yougoslave rejette la déclaration de " dissociation " de la Slovénie. Ante Markovic, premier ministre fédéral, propose aux six républiques de la fédération une déclaration garantissant les frontières extérieures et intérieures de la Yougoslavie.

— signature du troisième protocole financier (807 Mecus) avec la Yougoslavie. Il prévoit l'octroi, pendant une période expirant le 30 juin 1996, de prêts de la Banque Européenne d'Investissement pour un montant global de 730 Millions Ecus. La majeure partie de ces prêts (± 580 millions Ecus), sera utilisée pour le financement de projets concernant les infrastructures de transport, la partie restante (± 150 millions), sera utilisée pour le financement d'autres projets de développement, en particulier dans le secteur industriel, l'environnement, les télécommunications et l'énergie. La Communauté peut engager, sur ses ressources budgétaires, un montant de 77 millions d'ECUS, en vue de bonifier de deux points les prêts de la Banque destinés aux infrastructures de transport.

— un accord de transit est signé entre la Communauté européenne et la Yougoslavie qui comporte notamment un accroissement annuel de 5% des autorisations de transit pour les camions communautaires à travers la Yougoslavie et des dispositions permettant de simplifier les formalités de transit pour les transporteurs communautaires.

Mardi 25 juin 1991 : proclamation solennelle de l’indépendance de la Slovénie et de la Croatie (24 heures avant la date prévue). Le Parlement fédéral yougoslave demande au gouvernement et à l'armée d'" empêcher le dépeçage de la Yougoslavie et la modification de ses frontières. Dans la nuit, le gouvernement fédéral rejette la déclaration et décide que le contrôle des frontières de la Yougoslavie sera assurée par la police fédérale et l’armée yougoslave.

Mercredi 26 juin 1991 : heurts entre la police croate et des civils serbes armés à Glina (Croatie), au sud d'Osijek, ville peuplée en majorité (deux-tiers) de Serbes. Les conflits se poursuivent dans la journée de jeudi, l'armée fédérale intervient et prend le contrôle de la ville. Au moins 4 morts et une quinzaine de blessés.

- blocus de l'espace aérien slovène par les autorités de Belgrade. Les unités de l'armée fédérale stationnées en Slovénie sont placées en état d'alerte et prennent position le long des frontières de la république avec l'Italie, l'Autriche et la Hongrie.

- Washington, Londres, Paris, Bonn et de nombreuses capitales regrettent la proclamation d'indépendance des deux républiques.

• Jeu 27 juin 1991 (jusqu’au 30 juin) : Des affrontements armés éclatent entre l'Armée populaire yougoslave, et la Défense territoriale slovène à proximité des frontières de cette république. Début de l’intervention armée fédérale yougoslave en Slovénie, prise de contrôle de l’aéroport de Ljubljana-Brnik. Ante Markovic, propose à la Slovénie et à la Croatie de " suspendre " pour trois mois leur décision d'indépendance.

Dans la matinée du jeudi 27 juin, le commandant de la 5e région militaire, le général Konrad Kolsek, avait informé le gouvernement de Slovénie que l'armée yougoslave avait reçu l'ordre de reprendre par tous les moyens le contrôle des frontières qui séparent la Slovénie de l'Autriche, de l'Italie et de la Hongrie. Le ministère fédéral de la défense avait en effet annoncé que l'armée "exécutera ses obligations résolument et jusqu'au bout quels que soient l'envergure et le caractère des résistances possibles". Les forces fédérales avaient donc été autorisées, par le gouvernement, à passer aux actes et à forcer les barrages routiers établis mercredi par la population dans les zones frontalières. Dès l'aube, de nouvelles unités avaient été déployées à travers la Slovénie. Deux bataillons, quarante chars et blindés quittaient la caserne de Vrhnika, au sud de Ljubljana, pour se diriger vers l'aéroport de la capitale.

Vers 19 h 30, une forte explosion retentit dans Ljubljana. La défense territoriale slovène (qui compte au total environ 12 000 hommes) venait d'abattre un hélicoptère qui survolait un quartier résidentiel de la capitale, proche du Parlement. Au sol, des pains étaient mêlés aux débris de l'appareil qui, semble-t-il, était en mission de ravitaillement.

Selon les sources slovènes, l'armée fédérale contrôlait jeudi soir douze postes frontières, alors que les forces armées slovènes en gardaient toujours quinze. Les combats se sont poursuivis pendant la nuit faisant de nouvelles victimes notamment à Maribor et à Poljane, près de l'Autriche. Les affrontements restent concentrés aux zones frontalières. La population civile ne semble pas avoir été touchée. (Le Monde 29 juin, Flor. Hartmann).

Jeudi 27 juin 1991 : l'armée fédérale yougoslave occupe l'aéroport de Ljubljana-Brnikk à une trentaine de kilomètres et bloque les postes-frontière. Elle annonce qu'elle " ira jusqu'au bout " dans la défense de l'intégrité territoriale de la Yougoslavie. Le premier ministre fédéral, Ante Markovic, propose à la Slovénie et à la Croatie de " suspendre " pour trois mois leur décision d'indépendance. Le gouvernement estime que la situation est extrêmement critique et risque de dégénérer. Les combats entre l'armée yougoslave et la défense territoriale slovène ont fait " plus de cent morts et blessés ", selon le ministre slovène de la défense, Janez Jansa, qui précise que six hélicoptères de l'armée yougoslave ont été abattus (deux selon le gouvernement fédéral) et 15 chars détruits. (Le Monde 30 juin, Flor. Hartmann).

Jeudi 27 juin 1991 : la commission politique du Parlement européen réclame la tenue immédiate d'une réunion des Ministres des affaires étrangères des trente-cinq pays de la Conférence pour la sécurité et la coopération en Europe (CSCE), pour discuter de la crise en Yougoslavie.

Vendredi 28 et 29 juin 1991 : Conseil européen de Luxembourg. Envoi de la Troïka de trois Ministres (Italie, Luxembourg, Pays-Bas). Les Douze décident de geler toute coopération financière, communautaire et bilatérale, avec la Yougoslavie et de saisir le mécanisme de consultation d'urgence de la CSCE en cas de crise en Europe.

— Mise au point lors du sommet de Berlin, cette procédure permet à la CSCE d'enquêter sur les affaires intérieures d'un pays membre si au moins treize pays participants sont d'accord. Première fois que le mécanisme est mis en œuvre. Seul problème : la présidence revient à la Yougoslavie, Belgrade devrait alors passer son tour, au profit de l'Albanie.

— L'Union de l'Europe occidentale (UEO) fait savoir dans un communiqué, après une réunion de ses ministres de la défense et des affaires étrangères jeudi, qu'elle regrette les proclamations d'indépendance de la Croatie et de la Slovénie.

— L'OTAN se déclare " vivement préoccupée " par les événements en Yougoslavie. La commission politique de l'OTAN, composée de hauts responsables et de diplomates des seize pays membres, s'est réunie en session extraordinaire pour évoquer cette question.

Sur la Slovénie et la Croatie, le secrétaire général de l'ONU, M. Javier Perez de Cuellar, a répondu : " Vous devez savoir que, pour les Nations unies, il s'agit d'une affaire intérieure et qu'à ce titre je ne peux la commenter. ".

Les Etats-Unis demandent jeudi à toutes les parties d'éviter les violences. " Nous sommes préoccupés ", a déclaré le porte-parole de la Maison Blanche, M. Marlin Fitzwater. " Le danger d'un affrontement d'envergure s'est accru de façon importante, la Yougoslavie est un baril de poudre ", a précisé Mme Margaret Tutwiler. (AFP, Reuters cité par Le Monde) >>.

Conclusions (extraits) « Le Conseil européen a examiné l'évolution de la situation en Yougoslavie. Il a entendu le rapport de la Troïka ministérielle à son retour de Belgrade et de Zagreb et a marqué sa satisfaction sur les résultats de cette mission. Le Conseil européen demeure cependant préoccupé par la situation dans ce pays et souhaite que les instances européennes restent saisies et suivent attentivement l'évolution de la situation. Il a pris note de ce que le Luxembourg a déclenché le mécanisme d'urgence dans le cadre de la CSCE au regard de l'extrême gravité de la situation en Yougoslavie. ».

Les Douze confirment la nécessité de poursuivre en parallèle les travaux des deux conférences intergouvernementales, portant, l'une, sur l'union économique et monétaire et, l'autre, sur les aspects de l'union politique, sur la base du projet de traité élaboré par la présidence. Le Conseil européen de Luxembourg dégage des orientations générales pour la conférence intergouvernementale sur l'Union politique (politique étrangère et de sécurité commune, légitimité démocratique, politique sociale, cohésion économique et sociale). Il marque aussi son accord "sur les objectifs qui sont à la base" d'une proposition allemande sur les affaires intérieures et judiciaires. Le Conseil européen constate par ailleurs "de larges plages d'accord sur les éléments fondamentaux de l'UEM" et souligne la nécessité "de réaliser dès à présent des progrès satisfaisants et durables dans la convergence économique et monétaire".

Ven 28 juin. Le gouvernement fédéral exige " la cessation immédiate de l'usage des armes " sur tout le territoire. De violents combats se poursuivent néanmoins.

Les aéroports de Ljubljana et de Maribor sont bombardés dans la matinée. Les raids aériens se poursuivent pendant la journée. Le bombardement d'une colonne de véhicules sur l'autoroute de Ljubljana-Zagreb aurait provoqué la mort de huit camionneurs roumains et bulgares dont les véhicules avaient été bloqués dans les barrages. Selon un bilan officiel publié à Belgrade, cinq officiers et cinq soldats de l'armée fédérale ont été tués et vingt-sept autres blessés au cours des combats avec la défense territoriale slovène. (Le Monde 30 juin).

Les ministres slovènes de l'intérieur et de la défense, annoncent que la journée de vendredi avait été sanglante et que nombreux de bâtiments et de routes avaient été touchés. " Le gouvernement slovène a désigné une commission pour évaluer les dégâts. Nous comptons demander des dommages de guerre ", ont-il déclaré.

Ils ont aussi également précisé que l'armée slovène avait fait prisonniers plus de cinq cents soldats et policiers fédéraux et que quelque quatre cents recrues, dont vingt officiers, avaient déserté l'armée yougoslave et s'étaient rendus aux autorités slovènes. Janez Jansa, ministre de la défense, a indiqué que la jeune armée slovène avait été " très efficace ". Equipée d'engins antichars, elle aurait détruit un grand nombre de tanks yougoslaves. " Puisque l'agresseur s'est attaqué à des objectifs civils, nous avons entrepris une nouvelle offensive. L'armée slovène s'est emparé d'entrepôts militaires, se procurant ainsi des armes ", a ajouté M. Jansa.

A 16 heures, un communiqué officiel émanant des autorités militaires de Belgrade annonçait un cessez-le-feu immédiat. Les combats se poursuivaient néanmoins avec la même violence. A Murska-Sobota, près de la frontière hongroise, l'aviation fédérale bombardait les barricades qui bloquaient l'accès à la caserne. A Medvedjek, à une trentaine de kilomètres à l'est de Ljubljana, alors que l'armée fédérale tentait de détruire les barrages routiers, une maison a explosé et plusieurs blindés ont été anéantis par les unités slovènes. A Ig, l'armée fédérale s'est emparée du centre d'entraînement militaire slovène.

En fin de soirée, un accord de cessez-le-feu intervient entre la Slovénie et l'armée yougoslave. Le président slovène, M. Milan Kucan, et le ministre yougoslave de la défense, le général Veljko Kadijevic, annoncent un arrêt des hostilités à partir de vendredi 21 heures. (Le Monde 30 juin, Flor. Hartmann).

• Vendredi 28 - Dim 30 juin 1991 : délégation de la Troïka (Poos, de Michelis et Van den Broek) et de la Commission européenne à Zagreb et Belgrade.

Samedi 29 juin 1991 : Accord de cessez-le-feu entre la Présidence et le gouvernement slovènes d'une part, et le gouvernement fédéral d'autre part ; et suspension pour trois mois des déclarations d’indépendance croate et slovène.

La situation se détend sur le terrain rapporte le Monde. Les affrontements entre l'armée yougoslave et les forces slovènes se sont poursuivis dans la nuit de vendredi à samedi, malgré l'accord de cessez-le-feu annoncé dans la soirée, faisant trois morts et une quinzaine de blessés au poste frontière avec l'Italie de Rozna Dolina.

Selon un communiqué du ministère yougoslave de la défense, l'armée a cessé d'intervenir à 13 heures GMT " après avoir pris le contrôle " des frontières et avoir confié celles-ci à la police et aux douaniers fédéraux.

" Nous avons rempli notre mission " en stoppant le " processus de crise " s'est félicité le chef de la diplomatie luxembourgeoise M. Jacques Poos. La Troïka affirme également avoir obtenu un accord de toutes les parties sur un retour à la rotation normale de la présidence fédérale à Belgrade, toujours bloquée par un véto serbe qui empêche le représentant de la Croatie M. Stipe Mecic d'assurer cette fonction. M. Slobodan Milosevic a en tout cas promis de " reconsidérer sa position ", selon M. Poos. Cet accord global est effectif depuis samedi matin. _ (AFP, Reuter, AP. LM 30/6/1991).

Le 30 juin, elle obtient la nomination de Stipe Mesic à la présidence collégiale. Le Premier Ministre yougoslave, Ante Markovic présent à Ljubljana le dimanche après-midi 30 juin pour négocier un dénouement pacifique de la crise avec le chef du gouvernement slovène, Lojze Peterle.

A l’issue de 4 heures d’entretien, un compromis sur quatre des cinq questions controversées. Le chef du gouvernement slovène a précisé que " les frontières de la Slovénie étaient celles d'un Etat souverain " et que cela n'était pas négociable. Il a ensuite souligné qu'il était heureux de savoir que M. Markovic reconnaissait désormais la souveraineté des Républiques yougoslaves. En ce qui concerne l'armée fédérale, M. Peterle a affirmé qu' " il était évident que le gouvernement yougoslave avait laissé le génie s'échapper de la bouteille et qu'il ne pouvait plus le contrôler ".

M. Markovic a affirmé ne pas avoir été informé en temps voulu de toutes les décisions de l'armée fédérale. Prenant connaissance, samedi 29 juin, des intentions de l'armée, et notamment, de l'ordre de mobilisation de nouvelles troupes, il a immédiatement agi pour empêcher un nouveau bain de sang. Il a laissé entendre qu'il serait intervenu en mettant en garde l'armée sur les conséquences dramatiques de telles mesures " qui provoqueraient la libanisation de la Yougoslavie ". Il aurait alors proposé aux autorités slovènes de venir à Ljubljana pour négocier (LM 2 juillet, Florence Hartmann).

Le compromis intervenu porte sur quatre points : l'interruption des hostilités, le moratoire de trois mois (sans préciser s'il porte sur l'ensemble de la déclaration d'indépendance de la Slovénie ou seulement sur la poursuite du processus d'" émancipation ") et l'élection de M. Stipe Mesic à la tête de la présidence collégiale. De plus, à la demande de la Slovénie, les troupes fédérales devaient se retirer, dès lundi, dans les casernes. Reste un cinquième point de divergence concerne le problème des frontières.

Les Européens (Poos, De Michelis, Van Den Broek) obtiennent, dans la nuit du 28 au 29 juin, l’accord de Markovic et Milosevic sur trois points :

- l’acceptation d'un cessez-le-feu accompagné d'un retour des forces armées dans les casernes ;

- la suspension de la mise en œuvre des déclarations d'indépendance pour une période de trois mois ;

- la restauration de l'ordre constitutionnel par la désignation à bref délai d'un Président et d'un Vice-Président à la tête de la Présidence collégiale. (Lettre de Poos à Markovic).

voir Marie Pierre Subtil « Pour un coup d’essai, ce fut un coup de maître » « Pour la première fois, vendredi 28 juin, les Douze ont montré qu’ils pouvaient réagir vite et de manière efficace » (Le Monde 1er juillet 1991).

Dimanche 30 juin 1991 : lettre de Poos à Ante Markovic, Slobodan Milosevic, Milan Kucan et Franjo Tudjman menaçant en cas de non-respect des trois mesures prévues lors de la rencontre de la troïka le 28 juin, du « gel immédiat de l'ensemble des aides de la communauté et de ses Etats membres destinées à la Yougoslavie ».

Juillet 1991

Lundi 1er juillet 1991 : présidence néerlandaise de l’UE.

Mardi 2 juillet 1991 : reprise des combats en Slovénie entre armée fédérale yougoslave et unités de défense territoriale slovènes.

Mercredi 3 juillet 1991 : les Américains s’en remettent aux Européens pour la gestion de crise et alignent leur position sur ceux-ci. (LM 5/07/1991).

Le secrétaire d'Etat américain, M. James Baker, confirme implicitement l'évolution de l'attitude de Washington sur la question Yougoslave, en proposant que les Etats-Unis et la CEE suspendent leur aide à la Yougoslavie et adoptent un embargo sur les ventes d'armes à Belgrade si l'armée échappait au contrôle des autorités civiles. Le maintien de l'intégrité territoriale a en effet cessé d'être la première préoccupation de Washington, qui craint à présent une intervention d'envergure de l'armée yougoslave échappant au contrôle de l'autorité de Belgrade.

Les Etats-Unis semblent s'en remettre, pour l'instant, aux initiatives européennes pour tenter de trouver une solution à la crise yougoslave. Dans sa lettre adressée, mercredi 3 juillet, au président yougoslave M. Stipe Mesic, le président Bush ne faisait déjà plus mention de la nécessité de défendre l'unité du pays, mais insistait sur l'obligation de rétablir le contrôle des civils sur les militaires. Plus tard le département d'Etat indiquait que les Etats-Unis pourraient accepter l'indépendance des Républiques sécessionnistes si elle résultait d'une négociation pacifique.

Ces déclarations étaient différentes tant dans la forme que sur le fond des propos tenus à Belgrade, le 21 juin, par M. Baker, qui alors soulignait les dangers d'une désintégration de la Yougoslavie, et prenait pratiquement parti pour le gouvernement de Belgrade. Ces déclarations avaient été vigoureusement critiquées par les éléments de l'aile droite républicaine, favorables à la sécession de la Croatie et de la Slovénie. Ils accusaient le secrétaire d'Etat d'avoir encouragé Belgrade à s'engager dans une action armée.

M. Baker, entouré de MM. Van Den Broek et Andriessen, représentants de la Communauté européenne, a vigoureusement rejeté mercredi cette accusation. Son adjoint, M. Eagleburger déclarait en privé que la position américaine ne s'écartait pas de celle prise par la France et la Grande-Bretagne. Dans leur déclaration conjointe M. Baker et les représentants de la Communauté ont souligné que les Etats-Unis et les Européens doivent faire un effort pour convaincre les forces yougoslaves de rentrer dans leurs casernes. " Nous condamnons l'emploi de la force et le rejet du contrôle civil par les militaires ", indiquait le document. M. Baker a en outre précisé que les Etats-Unis et les Douze envisageaient un embargo sur les livraisons d'armes et l'arrêt de l'assistance à la Yougoslavie.

Quant à l'éventuelle initiative de l'Allemagne et de l'Autriche pour une commission nationale des Nations unies, les dirigeants américains déclarent ne pas s'y opposer. Néanmoins, ils estiment que saisir les Nations unies avant que la CSCE n'ait eu la possibilité de démontrer ce qu'elle pouvait faire dans cette crise compliquerait, sinon empêcherait, la recherche d'une solution. " Les Etats-Unis n'ont aucun rôle à jouer en Yougoslavie, sauf si les efforts des Européens échouaient ", a déclaré M. Pickering, ambassadeur américain auprès des Nations unies. (Le Monde 5 juillet Pierre Henri).

Vendredi 5 juillet 1991 : la CE, réunie à la Haye, décide d’un embargo sur le matériel militaire et la suspension de leur aide économique à l’ensemble de la Yougoslavie.

Dimanche 7 juillet 1991 ? : retrait de l’armée fédérale yougoslave de Slovénie.

Lundi 8 juillet 1991 accord de Brioni sous le patronage de la CE, prévoyant le départ de Slovénie des troupes fédérales. Déclaration commune sur le règlement pacifique de la crise yougoslave.

Il prévoit un accord de cessez-le-feu, le moratoire de trois mois sur les déclarations d’indépendance, l’élection de Stipe Mesic (croate) la présidence yougoslave et la formation d’une commission européenne chargée de surveiller le respect des engagements. Jacques Delors déclare que la CE « n’exclut pas la notion d’indépendance pour la Slovénie et la Croatie » mais souhaite avant tout l’extension de la violence dans la région. (source Le Monde).

Mercredi 10 juillet 1991 : vote d’une résolution au Parlement européen condamnant le recours à la force de l’armée yougoslave.

« les Républiques constitutives et les provinces autonomes de Yougoslavie ont le droit de déterminer leur avenir (...) mais chacune a le devoir absolu de n'user que des moyens pacifiques et démocratiques pour parvenir à des changements constitutionnels »

• 10 juillet 1991 : réunion des Ministres des affaires étrangères à La Haye arrête le mandat de la mission de surveillance du cessez-le-feu (observateurs).

La mission sera composée de trente à cinquante personnes. Ce sera une mission civile — en aucun cas une force de maintien de la paix, — même si certains de ses membres, compte tenu du travail à accomplir, auront une expérience militaire. Au départ, seuls y participeront des représentants de la CEE. ….

Les Douze entendent apparemment interpréter largement leur tâche de médiation, de manière que l'ensemble des acteurs, y compris l'armée fédérale, se sentent liés par les accords de Brioni. Parrains de la future négociation sur l'avenir du pays, ils veulent encourager son lancement puis aider son déroulement par tous les moyens disponibles.

Ils ont aussi décidé de créer un groupe permanent, une "task force " rassemblant juristes, économistes, experts des questions de sécurité, qui serait mise à la disposition des Yougoslaves. M. Jacques Delors, le président de la Commission européenne, a également indiqué son intention de créer sous sa responsabilité une cellule spécialement chargée d'assister le gouvernement yougoslave dans cette phase de la négociation. (source Le Monde 12 juillet Philippe Lemaitre).

15-17 juillet 1991 : le sommet du G7 à Londres prend acte des initiatives européennes. Et lui apporte son plein soutien. Preuve que la CE est, dans ce domaine, totalement maître des initiatives. Mais l’attention des grands est davantage tournée vers le Golfe, l’Iraq et le Moyen-Orient que la Yougoslavie. Les participants décident d'organiser une rencontre annuelle avec l'Union soviétique et définissent un plan de soutien à ce pays. Ils s'engagent aussi à ouvrir leurs marchés aux produits et aux services en provenance des pays d'Europe orientale et se déclarent résolus à faire aboutir les négociations du cycle de l'Uruguay.

18 juillet 1991 : la présidence fédérale yougoslave annonce le retrait de l’armée de Slovénie dans les trois mois. La tension s’accroît en Croatie. Les incidents se multiplient (ils feront 400 morts environ en six semaines). Exode des Serbes vivant dans des zones à majorité croate et des Croates vivant dans des zones à majorité serbe.

Lundi 22 juillet 1991 : le Conseil octroie une assistance financière en faveur d'Israël et des populations palestiniennes des Territoires occupés.

Mercredi 24 juillet 1991 à Erdut (Slavonie) et vendredi 26 juillet en Banija : incidents au cours desquels plus d'une centaine de policiers et de civils croates auraient trouvé la mort. L’armée nationale yougoslave et les forces croates se sont, pour la première fois, directement affrontées en Slavonie de l’est.

24 et … juillet ? 1991 : tournée de l’ambassadeur Henry Wynaendts dans les capitales des républiques.

Lundi 29 juillet 1991 : réunion exceptionnelle des ministres des affaires étrangères. Ils décident d’envoyer à nouveau la troïka (pour la quatrième fois). Celle-ci doit proposer, à toutes les parties en conflit, l'extension à la Croatie de l'actuelle mission de contrôle de la CEE, chargée de veiller au respect du cessez-le-feu en Slovénie. Ils précisent l’inviolabilité des frontières internes de la Fédération.

Les Britanniques insistent sur la condition d’un « cessez-le-feu effectif », prudents à cause de leurs expériences en Irlande du Nord. Ces derniers sont actuellement une cinquantaine, exerçant leur activité en Slovénie. Leur nombre serait porté à " 100, 150, 200 ou plus ", pour reprendre la formule de M. Hans van den Broek, le ministre néerlandais des affaires étrangères, qui préside les travaux des Douze. Ils seraient déployés dans les zones sensibles de Croatie, là où les Serbes sont nombreux et les accrochages fréquents (Slavonie, Krajina), leur mission consistant à superviser les interventions de patrouilles mixtes, composées de membres de l'armée fédérale et de la garde nationale croate. " La priorité numéro un, c'est la possibilité de consolider le cessez-le-feu ; si l'on ne met pas fin aux hostilités et à la violence, cela ne sert pas à grand-chose de discuter de l'avenir du pays ", a souligné M. van den Broek. Participaient à cette réunion des ministres des affaires étrangères de la CEE : MM. Ante Markovic et Budimir Loncar, premier ministre et ministre des affaires étrangères du gouvernement yougoslave, MM. Vasil Tupurkovski et Bogic Bogisevic, les membres macédonien et bosniaque de la présidence collégiale. La troïka vérifiera également si elles acceptent de donner des garanties concernant la sécurité des observateurs européens ; si elles ratifient le principe de patrouilles mixtes et le retour dans les casernes des forces armées qui n'y participeront pas. " Nous avons besoin de l'appui de tout le monde, de l'ensemble du gouvernement yougoslave, y compris du ministre de la défense, du gouvernement croate et du gouvernement serbe ", a souligné M. van den Broek (Le Monde).

Dans l'état actuel de la réflexion des Douze, les observateurs de la CEE ne seront pas armés, mais le débat sur l'opportunité de les doter d'une arme de poing (revolver) pour permettre un minimum de légitime défense sera repris. Il faudra, en outre, préciser si l'un des objectifs des patrouilles mixtes sera de désarmer les milices d'activistes en Croatie, n'appartenant ni à l'armée fédérale ni à la garde croate. Une commission fédérale du cessez-le-feu devrait être mise en place à l'initiative de la présidence collégiale yougoslave mardi ou mercredi.

La majorité des participants a estimé prématuré d'envisager à ce stade l'envoi d'une force européenne d'interposition ; la Communauté n'est guère préparée pour ce type d'intervention dont, du côté français, on n'exclut cependant pas l'éventualité.

Le corps des observateurs communautaires pourra comprendre des éléments extérieurs aux Douze, provenant d'autres pays de la CSCE ; on parle du Canada, de la Pologne, de la Suède, de la Tchécoslovaquie. Mais les quatre dirigeants yougoslaves présents à Bruxelles ont insisté pour que ce soit la Communauté, et elle seule, qui continue à piloter et coordonner l'opération.

M. van den Broek a enfin indiqué que la Communauté pourrait reprendre son aide économique, actuellement gelée, et même l'accroître si des signes tangibles de retour à la paix civile devenaient perceptibles. A première vue, la conférence sur l'avenir constitutionnel du pays, qui devrait s'ouvrir le 1 août, est ajournée. Mais les Douze restent prêts à apporter leur soutien dans ce domaine qu'ils jugent primordial, au-delà des efforts de pacification actuelle. C'est en particulier le point de vue de la France. (Le Monde 31 juillet Ph Lemaitre).

Mardi 30 juillet 1991 : la réunion prévue des présidents des six Républiques de la Fédération ainsi que les représentants du gouvernement et du Parlement fédéraux, pour poursuivre le sommet commencé lundi 22 juillet à Ohrid, est reportée sine die, le dirigeant croate Tudjman boycottant la réunion.

Le débat n'a pas été entamé, le président de la Croatie, M. Franjo Tudjman, ayant refusé d'y participer, en raison, a-t-il dit, de " l'escalade du terrorisme tchetnik soutenu par les autorités officielles serbes et une partie de l'armée fédérale ". M. Tudjman posait comme préalable à la reprise du dialogue la tenue d'une session extraordinaire de la direction collégiale pour déterminer les responsabilités et identifier les coupables dans les affrontements du mercredi 24 juillet à Erdut (Slavonie), et ceux du vendredi 26 juillet en Banija, au cours desquels plus d'une centaine de policiers et de civils croates auraient trouvé la mort. (Le Monde 1er aout Florence Hartmann).

Août 1991

Vendredi 2 - Dim 4 août 1991 : 4e visite de la troïka ministérielle, composée des ministres des affaires étrangères néerlandais, luxembourgeois et portugais, en Yougoslavie.

Commencé vendredi à Zagreb, où elle a rencontré le président croate, M. Franjo Tudjman, elle s’est poursuivie à Ljubljana, où elle s'était entretenue avec le président slovène, M. Milan Kucan. Samedi soir, elle est arrivée, toujours optimiste, à Belgrade où elle avait eu une longue discussion avec le président serbe. Slobodan Milosevic souhaitait la " bienvenue à tous les représentants de la CEE en tant qu'hommes politiques, hommes d'affaires, diplomates ou touristes, mais jamais en tant que membres d'une armée étrangère ". Le message était clair et laissait déjà entendre que la Serbie s'opposerait à l'élargissement du mandat des observateurs communautaires à la Croatie. Dimanche matin, les débats reprenaient à Belgrade avec les membres de la présidence collégiale et avec le président de la Macédoine, M. Gligorov. Fiasco total ou répétition de la réunion de Brioni _ le 7 juillet, lors de la troisième visite de la troïka, _ la Serbie était absente au moment de la session plénière qui devait aboutir à la signature du mémorandum. La Yougoslavie restait, avec un accord de cessez-le-feu précaire, déjà violé à plusieurs reprises samedi matin, libre de choisir seule entre la paix et la guerre. sans la surveillance des observateurs européens. (LM 6 août 1991 Florence Hartman).

Dim 4 août 1991 : la troïka commente son échec.

« La Yougoslavie est au bord de la tragédie et de la catastrophe. Notre mission a échoué. Nous avons pourtant tout fait pour aider le pays à aller de l'avant, pour que les tueries cessent et pour que le dialogue sur l'avenir du pays reprenne. » C'est en ces termes que le ministre néerlandais des affaires étrangères a fait le bilan, dimanche 4 août à Belgrade, de la quatrième visite de la " troïka " européenne en Yougoslavie. « Nous ne pouvons plus rien faire, si ce n'est lancer un appel à la raison », a indiqué Hans Van den Broek. Le président en exercice de la CEE a précisé que la mission européenne avait proposé un certain nombre de mesures pour que le cessez-le-feu ordonné par la présidence yougoslave dans la nuit de vendredi à samedi de la semaine dernière devienne effectif. Le mémorandum qui devait être soumis à la signature des dirigeants yougoslaves proposait que la commission de contrôle du cessez-le-feu soit mixte et composée de représentants de l'armée fédérale, des autorités croates et des Serbes de Croatie, et travaille en collaboration avec la mission d'observateurs européens dont le mandat aurait été élargi à la Croatie. " Une des parties concernées s'y est opposée et les débats ont été bloqués ", a souligné le ministre néerlandais. " Nous avons offert une assistance technique tout en ne voulant pas nous ingérer dans les affaires intérieures du pays. Nous avons voulu être des partenaires objectifs et proposer une collaboration impartiale. Mais nous ne sommes pas en mesure de prendre des décisions à leur place, ils doivent prendre leurs propres responsabilités ", a expliqué M. Van den Broek. Soulignant le manque de volonté politique dans le rétablissement de la paix, il a ajouté : " Nous plaignons le peuple qui a de tels dirigeants. Il ne reste plus qu'à attendre la suite de l'évolution de la situation actuelle. et à espérer que les parties concernées empêcheront l'escalade des conflits armés. " Le chef de l'Etat yougoslave, le Croate Stipe Mesic, accusait lui aussi la Serbie : " Elle a bloqué le dialogue avec la mission européenne. Nous voulions que la troïka engage des observateurs en Croatie. Il est clair que ceux qui s'opposent à la surveillance internationale ont d'autres ambitions. La Serbie ne se bat pas pour les droits des Serbes hors de sa République, mais pour les territoires où vivent les Serbes ", a précisé M. Mesic, ajoutant que la Croatie était prête à signer le mémorandum de la mission européenne.

Dans les milieux proches de la troïka, on admet que l'Europe est désemparée face à la crise yougoslave. Elle estime avoir fait le maximum en acceptant le rôle de médiateur et en envoyant une mission de surveillance composée d'observateurs. " Nos possibilités d'intervention sont réduites car nous ne pouvons pas risquer la paix sur tout le continent à cause d'une guerre entre villages ", explique-t-on. L'intervention d'une force d'interposition européenne est exclue, car elle reviendrait à engager toute l'Europe dans une véritable guerre. Les Soviétiques s'y opposent car ils y voient les signes d'une hégémonie européenne et la main de l'OTAN. L'armée soviétique a même fait savoir qu'elle avait des armes et qu'elle saurait s'en servir.

Si les Douze proposaient à l'URSS de participer à une telle force, Moscou refuserait, de crainte de voir l'Ukraine ou bien l'Ossétie revendiquer à leur tour une force d'interposition étrangère. D'autre part, la Serbie s'oppose à toute intervention européenne et voit dans l'uniforme blanc des observateurs celui de la Wehrmacht. Que doit faire l'Europe ? Faut-il reconnaître la Slovénie et la Croatie ? " Notre position est très délicate ", admettent les négociateurs. (Le Monde 6 août 1991 Florence Hartman).

6 août 1991 : réunion exceptionnelle du conseil des Ministres des affaires étrangères sur la situation en Yougoslavie. Les ministres se rendent compte qu’ils sont dépassés et examinent la proposition franco-allemande de saisir le Conseil de sécurité de l’Onu. Ils envisagent la tenue d’une conférence internationale (celle-ci commence à la Haye, sous la présidence de Lord Carrington, le 7 septembre).

Les ministres des affaires étrangères de la CEE ont constaté, mardi, leur impuissance et appelé toutes les instances internationales à se mobiliser. La réunion extraordinaire des ministres des affaires étrangères de la CEE, à La Haye, s'est conclue sur une déclaration finale ambiguë. Les Douze y réaffirment leur volonté de " rechercher une solution pacifique et négociée à la crise " yougoslave et demandent " à la troïka de poursuivre ses efforts ". Mais ils n'annoncent aucune nouvelle initiative, demandant au contraire le soutien de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) et envisageant que l'ONU " prenne les mesures qui lui semblerait appropriées ".

L'URSS a mis en garde les Occidentaux contre les risques d'une " ingérence " dans ce conflit. La France s'est déclarée favorable, mercredi, à une " consultation rapide des populations " en Yougoslavie, sous contrôle international.

A l'ouverture de la réunion de La Haye, les pays européens balançaient entre le volontarisme de la France et de l'Allemagne _ respectivement prêtes à saisir le Conseil de sécurité des Nations unies et à prononcer des sanctions économiques et financières contre la Serbie _ et le fatalisme des Pays-Bas, président en exercice de la CEE. Après avoir estimé que " la Communauté [était] allée à la limite de ses possibilités ", le chef de la diplomatie néerlandaise, M. Hans Van den Broek, considérait les suggestions de ses collègues français et allemand comme " prématurées " et " inapplicables ". La déclaration de La Haye se présente finalement comme un compromis entre ces deux lignes, élaboré non sans mal puisque la discussion des ministres a duré quatre heures au lieu des deux initialement prévues.

Prenant le contre-pied des propos désabusés tenus à leur retour de Belgrade, dimanche soir, par les membres luxembourgeois et néerlandais de la troïka, les pays de la Communauté se déclarent toujours prêts à jouer les médiateurs et " à poursuivre leurs efforts conformément à la déclaration de Brioni du 7 juillet " (1). Ils pressent par ailleurs la présidence fédérale yougoslave d'organiser " sur-le-champ " une conférence sur l'avenir de la Yougoslavie. Elément nouveau : les Douze s'affirment " prêts à convoquer eux-mêmes, si nécessaire, une telle conférence ".

En attendant, les Douze souhaitent avoir " le renfort d'autres instances " : c'est ainsi que M. Van den Broek a justifié l'appel qu'ils lancent à leurs partenaires de la CSCE, y compris donc les Etats-Unis et l'Union soviétique, " pour soutenir leurs dernières initiatives afin d'établir un cessez-le-feu et promouvoir un dialogue pacifique ". Le chef de la diplomatie néerlandaise a précisé que la CEE attendait de la prochaine réunion à Prague des hauts fonctionnaires des pays membres de la CSCE, jeudi, " un engagement clair ".

La volonté des Européens d'accroître la pression sur la Yougoslavie se traduit encore par l'accueil " unanime ", selon M. Dumas, qu'ils ont réservé à " l'intention de la France et du Royaume-Uni de tenir le Conseil de sécurité des Nations unies informé des actions de la Communauté afin que le Conseil de sécurité prenne les mesures qu'il estimerait appropriées ". Le ministre français a évoqué l'hypothèse d'une mission d'information menée en Yougoslavie par le secrétaire général de l'ONU.

La Communauté ne jette donc pas l'éponge, mais elle admet à mots couverts qu'elle a besoin d'aide pour étouffer l'incendie yougoslave par la voie diplomatique. Les moyens de pression économique, quant à eux, font l'objet d'une étude confiée à la Commission européenne. Celle-ci est en effet invitée à informer les Douze sur les mesures qu'ils pourraient prendre non seulement contre celles des Républiques yougoslaves refusant le cessez-le-feu, mais aussi en faveur de celles respectant le double principe du non-recours à la force et du respect du droit des minorités.

Le chef de la diplomatie allemande, M. Hans-Dietrich Genscher, s'est dit satisfait de cette décision, qui reste en deçà de sa proposition mais qui ouvre de façon implicite la question de la reconnaissance de l'indépendance de la Slovénie et de la Croatie. Ce sujet n'a, semble-t-il, pas été abordé par les Douze. Le ministre allemand a toutefois montré qu'il y tenait en déclarant qu'en cas de détérioration de la situation, l'Allemagne proposerait à ses partenaires de l'examiner.

Il n'en fallait pas plus à M. Van den Broek pour reprocher, de façon feutrée, devant les caméras de la télévision néerlandaise, à son homologue allemand de semer la confusion. Le ministre néerlandais replaçait ainsi la réunion de La Haye dans le cadre plus vaste du débat sur l'union politique européenne. La difficile question de l'intégration éventuelle de l'Union de l'Europe occidentale à la CEE a d'ailleurs plané comme une ombre sur les travaux des ministres : ils ont simplement " pris note " du fait que les neuf pays membres de l'UEO avaient décidé d'examiner quelle contribution celle-ci pourrait apporter au contrôle du respect d'un éventuel cessez-le-feu. (Le Monde 08.08.91 Christian Chartier).

7 août 1991 : Ordonné par la présidence fédérale yougoslave, un nouveau cessez-le-feu entre en vigueur en Croatie. Il semblait à peu près respecté, après les violents affrontements en Slavonie.

Le Canard Enchainé titre « Les médiateurs de la CEE : Tant qu'il y a de la Yougoslavie. il y a de l'espoir ».

8 août 1991 : réunion du comité de crise de la CSCE et demande à la Yougoslavie de réunir une conférence de paix.

$ ?? mi-août 1991, une proposition franco-allemande est avancée pour déployer une force d'interposition entre Serbes et Croates, en Croatie même, dans le cadre de l'UEO. Elle se heurte à l'opposition immédiate des Britanniques qui connaissent d'expérience, et plus que d'autres, la complexité des engagements militaires dans les Balkans mais qui, surtout, tirent des exemples irlandais et chypriote une leçon d'extrême réserve devant les opérations d'interposition, sans parler des divergences traditionnelles franco-britanniques sur le rôle de l'UEO comme embryon d'une défense européenne. (source : étude UEO 1994).

16 août 1991 : les Serbes de Slavonie (Croatie) proclament leur autonomie.

22 août 1991 : Coup d'État manqué en Union soviétique contre Michael Gorbatchev.

Mardi 27 août 1991 : Conseil des ministres des affaires étrangères. Les Douze mettent au point un plan de paix. Réunis à Bruxelles, les Douze décident d’imposer leur médiation en organisant une Conférence de paix, créant une commission d’arbitrage et en exigeant le cessez-le-feu pour le 1er septembre. La CEE accuse pour la première fois l’armée fédérale de faire cause commune avec la Serbie.

Le lendemain (28 août ?), M. François Mitterrand recevait à l'Elysée le président croate, M. Franjo Tudjman, qui lui donnait immédiatement son accord à la proposition européenne, puis le président serbe, M. Milosevic, à qui l'on avait envoyé un avion de Paris.

Jeudi 29 août 1991 : les heurts continuent. La ville frontalière de Topusko et le village d’Osijek sont attaqués par les autonomistes serbes soutenus par l’armée. Des heurts opposent les deux communautés à Vukovar et à Kostajnica, dans l’est de la Croatie. De nouvelles unités de chars se dirigent vers la Croatie. Selon la télévision croate, les combats auraient fait 50 morts.

Vendredi 30 août 1991 : le gouvernement fédéral accepte le plan de paix européen, suivi le 2 septembre par la Serbie et le Monténégro. En six semaines, les incidents en Croatie ont fait près de 400 morts.

Vuk Draskovic, président du plus important parti d’opposition serbe, le Mouvement du renouveau serbe approuve les propositions de la CEE. L’écrivain, qui s’adressait à la presse, estime qu’une conférence internationale « est susceptible de résoudre le conflit serbo-croate et de mettre fin aux conflits » en Croatie. (Le Monde 1er sept 91).

Août - novembre 1991 : la ville de Vukovar, près de la frontière avec la Serbie, est assiégée par les Serbes et bombardée. Des milices de nationalistes serbes venant de Belgrade, organisées par l'ultranationaliste Vojislav Seselj, participent à l'assaut de la ville. La plupart des habitants croates sont expulsés par les Serbes, qui ont fini par prendre le contrôle d'une ville presque entièrement détruite par les bombardements. Certains bilans font état de plus de 10 000 morts.

Septembre 1991

• Nuit du dim 1er au 2 septembre 1991 : signature du plan de paix proposé la semaine précédente par la Communauté européenne.

Ce plan prévoit un cessez-le-feu en Croatie, contrôlé par des observateurs internationaux, la mise sur pied d'une conférence internationale sur la Yougoslavie et la désignation d'une commission d'arbitrage sur le différend entre Serbes et Croates. (…) Le plus important à présent est de parvenir à un cessez-le-feu effectif en Croatie ", a déclaré M. Hans Van den Broek Le président de Serbie, M. Slobodan Milosevic, a estimé pour sa part que cet accord était " meilleur que ceux conclus auparavant ", en ajoutant toutefois : " Si les Croates continuent de nous attaquer, il n'y aura pas de paix. " Samedi soir, on annonçait que la Serbie acceptait la venue d'observateurs européens dans les régions troublées de Croatie, moyennant certaines conditions, notamment qu'il ne s'agisse pas de militaires mais de civils. M. Hans Van den Broek décidait immédiatement de se rendre dimanche à Belgrade, porteur du mémorandum qu'il entendait faire signer aux instances fédérales et aux présidents des six Républiques. Il y parvint finalement dans la nuit, après de longues heures de discussions.

Le président yougoslave, Stipe Mesic, a précisé que les entretiens avaient été sur le point d'échouer lorsque la Serbie avait demandé le retrait des forces croates des zones de combat, ce qui " était inacceptable, alors que vingt cités croates sont attaquées ". Le gouvernement serbe a finalement fait machine arrière lorsque M. Mesic a menacé d'organiser un nouveau vote " pour voir qui signera et qui ne signera pas, et laisser la CEE en tirer ses propres conclusions ".

300 observateurs seront dépêchés en Croatie. Cette proposition avait été présentée comme celle de la dernière chance par les Européens qui, la semaine dernière, avaient menacé la Serbie d'une " action internationale ". (source Le Monde 3 sept 1991, Claire Tréan).

Mardi 3 septembre 1991 : les Douze réunis à la Haye décident du début de la conférence de la paix, après acceptation par les six République du plan de paix de la CE.

Mercredi 4 septembre 1991 : date prévue d’arrivée du premier contingent de 30 observateurs à Zagreb.

• L'Allemagne menace de reconnaître « bientôt » les républiques sécessionnistes de Slovénie et de Croatie si les affrontements ne cessent pas en Yougoslavie, déclare le ministre allemand des affaires étrangères. " Nous ne pourrons pas regarder sans rien faire ", dit Hans-Dietrich Genscher devant le Parlement allemand (AFP).

Les 35 pays membres de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) approuvent, lors d'une réunion à Prague, la décision de la CEE de convoquer une conférence de paix sur la Yougoslavie, samedi 7 septembre, à La Haye. Ils réclament l'arrêt de toutes les opérations militaires.

A la demande de la Pologne, les délégués condamnent " tout usage de la force à des fins politiques " et décrété un embargo sur les livraisons d'armes et d'équipements militaires " à toutes les parties yougoslaves tant que durera la crise ". A Paris, le ministre des affaires étrangères, M. Roland Dumas, a déclaré, mercredi, que la conférence de La Haye constituait probablement " la dernière chance pour la Yougoslavie d'échapper à ce qui pourrait être véritablement une guerre civile ".

Vendredi 6 sept 1991 : nouvelle réunion des Douze à Bruxelles consacrée, normalement, à la question balte.

Les Albanais s’estiment oubliés, rapporte Le Monde. « L’Europe a, jusqu’ici, ignoré tous les appels «  en faveur d’une véritable représentation albanaise » dit Rugova.

Président du principal parti de la région, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK), M. Ibrahim Rugova,: «  Si aucune solution n’est trouvée à La Haye au problème du Kosovo, la seule issue sera pour nous la réunification avec l’Albanie. «  Bien qu’il assure garder l’espoir de voir les Albanais représentés à La Haye autrement que par le représentant du Kosovo à la présidence collégiale yougoslave _ considéré comme une «  marionnette «  des Serbes _ M. Rugova déplore qu’elle se cantonne dans une «  diplomatie secrète «.

Selon l’ex-chef du PC du Kosovo, M. Bakalli «  il n’y aura jamais d’Europe stable sans solution au problème albanais «. «  Unification «  ou «  rattachement «.

M. Rugova souligne que «  Tirana pense aussi à l’unification «  avec le Kosovo, il assure que l’Albanie «  ne fournit aucune aide matérielle «  aux Kosovars en raison «  des énormes problèmes «  politiques et économiques auxquels elle est confrontée. Quant à M. Bakalli, il admet qu’ » il y a plus de partisans de l’unification au Kosovo qu’en Albanie «. Il privilégie le maintien de sa région dans une Yougoslavie confédérale, car il reconnaît les limites de l’hypothèse d’une «  unification unilatérale par la force «. D’un autre côté, il ne peut envisager un tel maintien si le Kosovo n’obtient pas le statut de République, si la Yougoslavie se limite à «  une mini-fédération _ sans la Croatie et la Slovénie _ sous domination serbe «. Dans ce dernier cas, «  il n’est plus question de vivre avec les Serbes. (Le Monde 8 sept).

• Samedi 7 sept 1991 : la conférence de paix sur la Yougoslavie s’ouvre à La Haye. Elle est présidée par Lord Carrington. « Son expérience et son impartialité s'imposeront aux parties yougoslaves », estime le ministre néerlandais des affaires étrangères, Hans Van den Broek. Robert Badinter présidant la commission d’arbitrage.

Les Douze ont accepté de ne pas faire une condition d’un cessez-le-feu total « Ce ne serait pas la première fois qu'une conférence de paix commence alors que les combats ne sont pas encore terminés », devait noter M. Jacques Delors (Source Le Monde 6 août 1991)

L’Autriche critique la position de la CEE, rapporte un article du Monde. Le Chancelier, social-démocrate, Vranitzky, freine ses collègues de la coalition qui veulent une reconnaissance immédiate de la Croatie et Slovénie. les médias autrichiens ont vivement critiqué l’ » incompétence «  des diplomates de Bruxelles. Ils leur reprochent d’avoir voulu régler le conflit yougoslave «  avec la mentalité de juristes de droit économique fixant des normes à respecter pour la culture de concombres «  _ comme l’écrivait cyniquement l’éditorialiste du quotidien viennois Kurier. Bruxelles et la CEE se voient accusés d’agir «  sans tenir compte des réalités «  et d’avoir, par leur ignorance, laissé passer la chance de contribuer _ alors qu’il était encore temps _ à régler les problèmes de manière pacifique. «  Si l’Autriche avait été déjà membre de la CEE, la politique de Bruxelles aurait changé plus tôt «, assurent des diplomates autrichiens.

Le chancelier a eu du mal à freiner l’euphorie des principaux dirigeants du Parti conservateur (ses partenaires au sein de la coalition gouvernementale) et de l’opposition qui réclamaient une reconnaissance immédiate de la Slovénie et de la Croatie afin de faire respecter le cessez-le-feu. M. Vranitzky, le chancelier, a carrément refusé, mardi dernier, de doter son ministre des affaires étrangères des pleins pouvoirs que celui-ci avait exigés, et qui l’auraient autorisé à reconnaître la Slovénie et la Croatie quand bon lui semblerait, sans consulter au préalable le conseil des ministres. M. Mock avait notamment invoqué les «  responsabilités morales «  de Vienne à l’égard de Ljubljana et de Zagreb. (source Le Monde 7 sept Baryli Waltraud).

Dimanche 8 septembre 1991 : lors d’un référendum en Macédoine, 95,9% des électeurs se prononcent en faveur de l’indépendance de la république. Le taux de participation au scrutin a été de l’ordre de 75 %. Les dirigeants de Skopje n’excluent pas d’adhérer à un nouveau modèle yougoslave qui serait une «  alliance d’Etats souverains.

Le président, Kiro Gligorov aspire, dans la mesure du possible, à sauvegarder la Yougoslavie parce qu’il est l’auteur, avec le président de la Bosnie-Herzégovine, M. Izetbegovic, de la «  plate-forme «  prônant une alliance d’Etats souverains avec une politique monétaire, étrangère et de défense commune. En d’autres termes, un compromis entre l’union souple proposée par les Républiques du Nord-Ouest et le modèle centraliste de la Serbie.

Les résultats du référendum ont soulevé la colère des 45 000 Serbes qui vivent en Macédoine. Le président du Parlement de Serbie, M. Pavic Obradovic, a déclaré notamment lundi : «  Si la Macédoine quitte la Yougoslavie, elle devra envisager un redécoupage des frontières avec la Serbie, car la Serbie compte défendre les intérêts des Serbes de cette République, en particulier dans la région de Kumanovo. «  Cette mise en garde d’un homme très actif dans la défense des Serbes de Croatie pourrait présager l’ouverture d’un nouveau front en Yougoslavie. (LM 11 sept Harmann).

Dimanche 8 septembre 1991 : Cinq observateurs de la Communauté européenne arrivent à Osijek, dans l’ouest de la Croatie, pour superviser le cessez-le-feu, qui n’est toujours pas respecté (source Le Monde 10 sept).

Mer 11 septembre 1991 : débat au Parlement européen sur la Yougoslavie. Jacques Delors estime que trouver à brefs délais des solutions aux crises actuelles relève de «  la quadrature du cercle ». Pour lui, la Communauté dispose de deux armes essentielles : les sanctions économiques et la menace d’une reconnaissance de l’indépendance de la Croatie et de la Slovénie qui reste une carte maîtresse dans les négociations de La Haye.

Répondant à l’appel de nombre de parlementaires en faveur de la création rapide d’une force d’interposition européenne en Yougoslavie, le président de l’exécutif communautaire a précisé que les Douze travaillaient sur cette hypothèse mais qu’elle soulevait une difficulté de taille : «  Comment prendre cette décision, s’est-il interrogé, sans l’aval des Nations unies ? «  Dans la résolution votée à une forte majorité (209 voix pour, 10 contre et 70 abstentions), l’Assemblée _ qui n’hésite pas à parler «  de processus de dissolution en cours de l’Etat yougoslave «  _ ne retient pas cette éventualité mais demande que les parlements du Kosovo et de la Vojvodine (les deux provinces sous contrôle serbe) soient représentés à la conférence de paix (Le Monde 13 sept).

— Un hélicoptère Mi 8 transportant l’ambassadeur Winaents est touché par tirs (provenant sans doute de l’armée yougoslave).

— Séance inaugurale de la Commission d’arbitrage « Badinter ».

Les ministres de la Communauté avaient décidé qu’elle serait formée de cinq membres, trois nommés par la CEE et deux par les Yougoslaves. Ces derniers n’étant pas parvenus à se mettre d’accord sur deux noms, ce sont les trois membres désignés par la CEE, MM. Robert Badinter (France), Roman Herzog (Allemagne) et Aldo Corasaniti (Italie), qui ont finalement coopté leurs deux collègues manquants. Ils ont choisi Mme Irène Petry (Belgique) et M. Francisco Tomas Valiente (Espagne). Les cinq ont élu M. Badinter président.

La commission est donc au complet et prête à travailler. Le choix des deux derniers membres, dû à la nécessité, n’a pas été fait sans arrière pensées. L’Espagne et plus encore la Belgique sont des pays qui ont une certaine expérience en matière d’affrontements culturels et ethniques. Ces cinq personnalités sont à la tête, dans leurs pays respectifs, de l’autorité constitutionnelle suprême.

La commission doit fonctionner parallèlement à la conférence de paix de La Haye. Elle examine les différends qui lui sont soumis par les parties en conflit et rend ses décisions dans les deux mois. Son «  lieu principal de réunion «  a été fixé à Paris. La commission, réunie au Palais-Royal, dans les locaux du Conseil constitutionnel français. «  Il s’agit d’une démarche très originale, nous a déclaré mercredi soir M. Badinter. Si une telle juridiction avait existé dès le début de la crise yougoslave, les Croates auraient pu par exemple la saisir d’emblée de leurs griefs. Pour M. Badinter, la création d’un tel organisme de recours est nécessaire pour combler un vide juridique : «  On oublie parfois à quel point la Cour de justice européenne de Luxembourg a été utile à la construction européenne. Or, les parties en présence en Yougoslavie n’ont aucune instance à laquelle elles puissent demander de dire le droit dans les conflits qui les opposent. «  (Le Monde 13 septembre Dhombres dominique).

• Conférence de presse du président français, François Mitterand consacrée, pour l’essentiel, à la remise en perspective de la politique européenne de la France et à sa vision de l’avenir des pays de l’Est.

Saluant «  la naissance d’une nouvelle Europe «, le chef de l’Etat indique que la «  géopolitique » du continent avait désormais «  grand besoin d’une théorie des ensembles «. Il a notamment proposé une réunion des quatre puissances détentrices de charges atomiques en Europe afin d’aboutir à «  un strict contrôle «  des armes nucléaires. Il a repris à son compte, après avoir parlé de la Yougoslavie et de l’indépendance probable de la Slovénie et de la Croatie, l’idée de forces d’interposition de l’ONU «  sur les lieux contestés «. (LM 13 sept / Afp).

Jeudi 12 septembre 1991 : lord Carrington doit rencontrer les Ministres des affaires étrangères de l’ex-Yougoslavie.

— Conférence de presse de François Mitterand qui évoque dix-sept «  situations »  où des nationalités aspirent à inscrire leur identité dans le cadre d’un Etat souverain.

Vendredi 13 septembre 1991 : la Bulgarie décide de reconnaître l'Etat de Macédoine, annonce le président de la commission parlementaire de politique étrangère, M. Filip Ichpekov.

Sam 14 et Dim 15 septembre 1991 : réunis à Venise, les Ministres des affaires étrangères italien et allemand évoquent la possibilité d’une reconnaissance séparée de la Slovénie et de la Croatie.

Dimanche 15 septembre 1991 : proclamation de l’indépendance de la Macédoine.

Lundi 16 septembre 1991 : Assurant la présidence tournante de l'UEO, l'Allemagne entreprend de consulter ses huit partenaires, à la demande expresse, du ministre néerlandais des affaires étrangères, Hans Van den Broek. Celui-ci a proposé de dépêcher en Yougoslavie une force européenne d’interposition sous bannière de l’UEO.

Mardi 17 septembre 1991 : accord de cessez-le-feu, non respecté, comme les précédents. L’armée fédérale, désormais ouvertement dans le camp serbe, poursuit son offensive dans certaines régions de Croatie. Les forces croates multiplient les opérations de blocus des casernes. Les combats s’étendent et gagnent la capitale, Zagreb. La marine yougoslave annonce le blocus de plusieurs ports croates de l'Adriatique.

• Lord Carrington se rend à Igalo (côte monténégrine) pour rencontrer Tudjman, Milosevic, Kadijevic. Ils conviennent d’un nouveau cessez-le-feu : retrait de l’armée dans les casernes et démobilisation des unités de réserve de la garde nationale. L’accord d’Igalo ne sera pas plus respecté que les autres (l’ambassadeur Henry Wynaendts P.100).

• Lord Carrington informe par téléphone la présidence néerlandaise de l’accord de cessez-le-feu entre les présidents serbe, croate et le ministre fédéral yougoslave de la défense dans l’optique néerlandaise, le cessez-le-feu ne rend pas inutile l’envoi de militaires neutres ; au contraire : il en est même la «  première condition «, la seconde étant l’agrément de toutes les parties au conflit.

Le porte-parole néerlandais a toutefois admis que l’accord obtenu par lord Carrington pouvait générer une situation nouvelle, d’ici à la décision formelle des Douze et des pays membres de l’UEO : «  D’ici à jeudi, le cessez-le-feu peut s’avérer effectif et l’accalmie peut permettre aux observateurs civils de commencer leur mission. «  Les raisons qui avaient amené la présidence néerlandaise de la CEE à programmer le déploiement de contrôleurs militaires _ à savoir «  la détérioration de la situation et l’impossibilité pour les observateurs civils d’accomplir leur tâche «  _ tomberaient alors d’elles-mêmes. Mais le porte-parole a prudemment laissé l’alternative ouverte : «  La décision [des Européens] peut aller dans les deux sens. «  La Yougoslavie est morte. ».

Interrogé sur l’influence qu’a pu avoir la proposition des Pays-Bas, le ministère des affaires étrangères est resté dans l’expectative : «  C’est difficile à dire ; mais il est également impossible de prouver le contraire. Peut-être les Serbes ont-ils pris au sérieux la détermination européenne ? Peut-être les Croates ont-ils finalement réalisé que l’escalade de la violence n’entraînera pas la reconnaissance de leur indépendance ? La Yougoslavie est morte, mais il faut que les parties négocient «  pour organiser de nouvelles formes de coexistence. Dans l’esprit des Néerlandais, le déploiement d’une force d’interposition militaire «  renforcerait le processus de la conférence de paix «  en rétablissant notamment l’ordre des priorités établi par les Européens : d’abord, un cessez-le-feu effectif ; ensuite son maintien par des contrôleurs internationaux ; enfin, la conférence de paix. «  L’idée de déployer une force d’interposition dans le cadre de l’union de l’Europe occidentale n’est pas nouvelle «, a encore affirmé le porte-parole de M. Van den Broek. «  Elle a déjà été étudiée depuis le début de la crise yougoslave. «  C’est sans doute avec ces travaux préparatoires à l’esprit que le secrétaire général de l’UEO a estimé que le nombre de militaires à déployer devrait avoisiner les 40 000. Mais La Haye juge cette évaluation prématurée : «  Tout dépend de la mission de la force de paix, qui pourrait couvrir l’ensemble du territoire yougoslave mais aussi se limiter à la Croatie. «  La présidence néerlandaise de la CEE n’exclut pas que les Douze décident, jeudi prochain, d’étendre «  par précaution «  à la Bosnie-Herzégovine la mission des actuels observateurs civils. Cela signifie que l’éventuel déploiement de «  soldats de la paix «  pourrait aller de pair avec le maintien des «  casques blancs «  civils. (Le Monde 19/09/1991 Chartier Christian).

• Le Premier ministre hongrois, Jozsef Antall, demande aux Etats occidentaux d’imposer des sanctions économiques contre la Serbie. «  C’est la seule façon, dit-il, d’isoler les nationalistes serbes et les communistes, qui continuent d’ignorer les cessez-le-feu.

L’espace aérien hongrois a été violé à quatre reprises dans la seule matinée de lundi par des avions de l’armée fédérale. Pis : deux des cinq appareils ont tiré des missiles vers la Croatie durant cette opération. L’armée a aussitôt été placée en état d’alerte à la frontière.

La Hongrie ferme l’un de ses trois postes-frontières avec la Croatie, dans la nuit de dimanche à lundi. Motif : certains des affrontements les plus violents en Slavonie ce week-end se sont déroulés à une dizaine de kilomètres seulement du territoire magyar. + le pays accueille déjà 20 000 réfugiés.

Le ministre de la défense yougoslave accuse la Hongrie de fournir des armes aux Croates (Le Monde 19/09/1991Yves-Michel Riols).

Mercredi 18 septembre 1991 : violents combats entre forces croates et unités de l’armée fédérale yougoslave dans plusieurs régions de la Croatie, en dépit de la trêve acceptée la veille par les belligérants.

Jeudi 19 septembre 1991 : en visite à Berlin François Mitterand propose l’envoi d’une force européenne (ou de confier le problème à l’Onu). A Weimar, le 20 septembre, il infléchit sa position sur l’indépendance des républiques. Il avait toujours défendu le « principe d’autodétermination des peuples ». Mais il ajoute cette fois « Si la Croatie veut faire sécession, je ne vois pas pourquoi la Yougoslavie le lui interdirait » $$ retrouver le discours.

En fait, l'échec de cette proposition était déjà envisagé dans ce discours où M. Mitterrand évoquait une solution de rechange (confier le problème à l'ONU), et on peut penser que ni la France, qui n'y croyait pas, ni l'Allemagne, qui a peur de son ombre dès qu'il est question d'intervention militaire à l'étranger, n'ont plaidé avec beaucoup d'ardeur pour l'envoi d'une force européenne en Yougoslavie.

La mission commune de MM. Dumas et Genscher n'était déjà plus très claire quand ils ont quitté l'Allemagne pour rejoindre leurs homologues européens à La Haye. La " déclaration franco-allemande ", dont ils partaient armés, avait un objectif plus politique qu'opérationnel : il s'agissait de montrer que Paris et Bonn ont la volonté d'agir ensemble plutôt que de dire comment. (Le Monde 22/09/1991, Claire Tréan).

— Réunion des Ministre des affaires étrangères à la Haye + Réunion de l’UEO. A l'initiative des Pays-Bas, les neuf pays membres de l'Union de l'Europe occidentale (les Douze moins le Danemark, la Grèce et l'Irlande), se réunissent, à La Haye pour décider de l'envoi éventuel d'une force de maintien de la paix en Yougoslavie. Le chef de la diplomatie néerlandaise, Hans Van den Broek, a proposé que l’UEO déploie en Croatie une force de maintien de la paix.

Assurant la présidence tournante de l’UEO, l’Allemagne a entrepris de consulter ses huit partenaires, à la demande expresse, lundi 16 septembre, du ministre néerlandais des affaires étrangères, M. Hans Van den Broek, qui est également président en exercice de la CEE. La décision des Neuf sera préparée par les Douze, dont les ministres des affaires étrangères sont convoqués, également jeudi, à La Haye, pour évaluer la situation en Yougoslavie, à l’aide notamment du bilan que Lord Carrington dressera de ses entretiens, lundi 16 et mardi 17 septembre, avec les dirigeants croates et serbes. Les ministres européens feront ensuite le point sur le déroulement de la Conférence de paix, dont la deuxième séance de travail sera alors tout juste achevée, avant de se réunir avec leurs collègues de la défense concernés, dans le cadre de l’UEO. Dans l’esprit de M. Van den Broek, la force d’interposition de l’UEO serait calquée sur le modèle des «  casques bleus «  de l’ONU : «  Il ne s’agira pas d’une force d’intervention à des fins offensives mais d’une force de maintien de la paix, composée de militaires légèrement armés et ayant une mission strictement défensive. «  Selon le porte-parole du ministre néerlandais, les capitales européennes doivent répondre d’ici à jeudi à deux questions principales : «  Est-il possible «  de constituer une telle force et, si oui, «  comment faire en pratique «  ? Il est entendu à La Haye que le déploiement effectif de soldats de la paix ne pourra pas avoir lieu «  sans l’accord de la Yougoslavie «.(Le Monde 18 sept 1991 Ch Chartier).

La demande d’intervention tourne court : le Conseil demanda simplement à l'UEO d'élaborer des plans pour une éventuelle opération de maintien de la paix et se tourna vers les Nations unies pour gérer le conflit. (source étude UEO 1994).

• Le Canada demande la réunion d’urgence du Conseil de sécurité, estimant que la détérioration de la situation représentait un risque pour la paix et la sécurité des autres pays. L’Allemagne est favorable à cette convocation.

• ?? sommet tripartite sur la situation dans les Balkans à Athènes avec les premiers ministres bulgare et grec, MM. Mitsotakis et Popov, ainsi que le président serbe, M. Slobodan Milosevic (à l’ordre du jour la question macédonienne ?).

• Vuk Draskovic, leader du Mouvement du renouveau serbe, défend la paix, rapporte le Monde le 19 septembre

«  Mieux vaut négocier pendant deux ans que faire la guerre, ne serait-ce que deux minutes » dit-il. Ses aspirations pacifiques lui valent d’ailleurs d’être qualifié par le pouvoir serbe de «  traître et d’oustachi «.

Accusant directement le président serbe, Slobodan Milosevic, d’avoir entraîné les Serbes de Croatie dans «  une guerre absurde et sale «, Vuk Draskovic estime que la crise yougoslave peut être réglée par le dialogue. Selon lui, les présidents des six Républiques, l’opposition et l’intelligentsia, mais aussi des représentants européens et internationaux, devraient prendre part à la négociation. Il insiste pour que les puissances étrangères, qui ont participé à la création de la «  première Yougoslavie «  (le royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes) de 1918, puis de la «  seconde Yougoslavie «, après la seconde guerre mondiale, jouent un rôle particulier dans les négociations _ c’est-à-dire la France, la Grande-Bretagne, la Russie et les Etats-Unis.

Il avait commencé sa carrière politique en prônant une «  Serbie qui s’étendrait sur tous les territoires où se trouvent des cimetières serbes «. Mais dans cette folie nationaliste qui a envahi la Serbie, M. Draskovic a mûri et a opté pour la raison. «  Que faire de territoires sans Serbes ? «, demande-t-il. Il propose donc comme base de futures négociations une solution qui pourrait satisfaire les deux parties. «  Le redécoupage des frontières entre Serbes et Croates est inévitable. Mon projet n’est pas parfait, mais il a le mérite de respecter une réalité, celle de la carte ethnique de la Yougoslavie. «  Il ajoute : «  Après tout ce qui s’est passé, je ne vois pas comment la Krajina de Knin ou les villages serbes de Slavonie pourraient rester en Croatie. «  La Yougoslavie de Draskovic garde six entités : la Macédoine, le Monténégro et la Slovénie restent dans leurs frontières actuelles ; la Serbie traverse le Danube et intègre une partie de la Slavonie de l’Est. La Bosnie-Herzégovine est morcelée. Les deux Krajinas serbes _ celle de Knin (en Croatie) et celle de Bosnie sont regroupées. En échange, la Bosnie perd le sud-ouest de son territoire où les Croates sont majoritaires. La Croatie de M. Draskovic est remodelée, mais ne perd pas de sa superficie. Selon lui, la Bosnie, les deux Krajinas, le Monténégro, la Macédoine et la Serbie resteront unis dans une formule fédérale. La Slovénie et la Croatie, indépendantes, pourraient se séparer totalement du reste de la Yougoslavie ou avoir, si elles le désirent, des relations confédérales avec les quatre autres Républiques yougoslaves. (Le Monde 19 sept).

Vendredi 20 septembre 1991 : suite de la réunion de la Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe (CSCE) à Moscou - jusqu'au 4 octobre.

—  réunion spéciale des ambassadeurs de l'OTAN à Bruxellessur la question yougoslave.

— A New-York, à la demande du Canada, le Conseil de sécurité de l’ONU débat, pour la première fois, de la question yougoslave.

Selon des participants, la réunion s'est " mal déroulée ". Ces diplomates soulignent que la Chine s'est montrée pour le moins " très réticente ", et que l'Union soviétique, " évidemment inquiète ", a proposé que le secrétaire général, M. Perez de Cuellar, fasse appel à toutes les parties en Yougoslavie et se rende sur place. Les Britanniques ont demandé, avec beaucoup de circonspection, que les consultations continuent. Quant aux Etats-Unis, ils " se contentent de suivre les débats ". " Si on devait voter ce soir, l'idée française de l'envoi d'une force d'interposition ne recueillerait que deux, peut-être trois voix favorables ", observait un diplomate.

Le représentant de la Roumanie a déclaré quant à lui qu' " il est hors de question pour l'ONU d'intervenir en Yougoslavie " ; celui de l'Inde a ajouté : " On n'est pas là pour innover ". L'Inde s'est fortement " opposée à toute décision du Conseil pour des raisons de principe ", de même que la Chine, membre permanent, l'Equateur et Cuba. Ni les trois membres africains du conseil, ni le Yémen ne se sont prononcés. Les diplomates français insistent sur le fait que pour le moment les pourparlers ne sont que des " consultations préliminaires ".

C'est le Canada qui avait déposé dans la nuit de jeudi à vendredi la première demande d'une réunion formelle du Conseil. Dans une lettre adressée au Conseil de sécurité, l'ambassadeur canadien, M. Yves Fortier, observait que " la situation en Yougoslavie pourrait compromettre la paix et la sécurité internationale ".

Le représentant de l'Autriche _ également membre du Conseil de sécurité _ avait pour sa part demandé des consultations informelles, en rappelant " le principe selon lequel toute modification des frontières par la force est inacceptable et que toute solution devrait garantir les droits de toutes les parties dans toutes les Républiques ". Il y a quelques jours, le président de la fédération yougoslave, M. Stipe Mesic _ un Croate, _ avait écrit une lettre aux Nations unies demandant une intervention de l'organisation. Une réunion formelle du conseil sur la Yougoslavie est prévue pour jeudi " au plus tard ".

(Question de la base juridique) Quelle peut être la base juridique d'une action de l'ONU ? Le chapitre 8 de la Charte autorise des organismes " régionaux " à régler les affaires qui " touchent au maintien de la paix et de la sécurité internationale ". Mais ce chapitre, qui permettrait à la Communauté européenne d'envoyer une force d'interposition en Yougo- slavie, n'a aucun caractère contraignant, à la différence du chapitre 7, qui permet une application des décisions de l'ONU " par tous les moyens, y compris la force ". (Le Monde 22 sept).

Vendredi 20 septembre 1991 : Après avoir fait circuler un premier projet, la présidence néerlandaise de la CE soumet à la conférence intergouvernementale sur l'Union politique un projet révisé de Traité qui rétablit notamment l'unicité et la cohérence du projet.

— conférence de presse de François Mitterrand et Weizsacker, président de la République fédérale. F. Mitterand souhaite que l'Europe se dote de ces moyens, notamment de la possibilité de constituer des forces d'interposition, en ajoutant cependant que, selon lui, " les forces d'interposition doivent avoir surtout un rôle de prévention ".

Cette visite s’inscrit dans un voyage trois jours en Allemagne de l’est, avec visite de trois des nouveaux Lander à un programme chargé en discours, rencontres, visites d'entreprises et des hauts lieux culturels de Saxe et de Thuringe, hommage rendu aussi à la mémoire des victimes du nazisme au camp de Buchenwald, à deux pas de la ville de Goethe et de Schiller.

Il participe de la volonté « d'apurer le climat des relations franco-allemandes qui commençait à s'alourdir gravement. Il s'agissait non seulement de répéter la volonté commune de Paris et de Bonn de conclure dans trois mois, au conseil européen de Maastricht, les négociations sur l'union monétaire et l'union politique, ce qui fut fait, mais aussi pour M. Mitterrand d'effacer par cette tournée en Allemagne orientale l'idée, répandue dans les deux pays, qu'il avait assisté avec quelque répulsion à la réunification ».

Ce voyage a été l'occasion d'une série de mises au point des deux côtés. Côté allemand, ce fut essentiellement l'engagement de ne pas faire cavalier seul à propos de la Yougoslavie, de ne pas saisir l'occasion de cette crise pour rompre les amarres européennes.

Côté français, les mises au point apparaîtront sans doute à certains comme des mises à jour tardives d'une politique étrangère contestée, à laquelle il était reproché de rester trop statique dans un monde en plein bouleversement. M. Mitterrand s'est clairement déclaré favorable au principe de l'élargissement de la Communauté européenne et a invité les Douze à en examiner sans plus attendre l'ampleur, les conditions et le calendrier. Cela ne contredit pas formellement ses propos précédents sur les risques de dilution de la Communauté et " les dizaines et dizaines d'années " nécessaires pour parachever son élargissement, mais cela donne une inflexion positive à une approche qui était perçue jusque-là comme conservatrice. (LM 22 sept, Claire Tréan).

Mardi 24 septembre 1991 : visite à la Commission européenne du président de la Commission d'arbitrage pour la Yougoslavie, M. Robert Badinter.

30 septembre 1991 : la présidence néerlandaise présente un nouveau projet de traité, plus « supranational » sur certains points mais qui réduit les ambitions en matière de politique étrangère et de sécurité communes.

" Ils (les Néerlandais) sont responsables d'une belle pagaille. Le passage sur la défense apparaît comme une véritable provocation à l'égard des Français ", estimait voici quelques jours un diplomate espagnol. Le texte néerlandais stipule en effet que les actions communes en matière de sécurité devront être " complémentaires " de celles conduites dans le cadre de l'OTAN et de l'UEO, organisations qui, à l'évidence, selon les Pays-Bas, doivent jusqu'à nouvel ordre rester les piliers de toute défense européenne. Les autorités de La Haye ont oublié que l'idée d'instaurer une union politique trouvait son origine dans une initiative franco-allemande d'avril 1990 ; elles en ont en tout cas complètement négligé l'esprit.

D'autre part, l'obsession des Pays-Bas, partagée à des degrés divers par plusieurs Etats membres, en particulier la Belgique et l'Italie, et encouragée par la Commission européenne, semble être de faire ainsi barrage à une montée en puissance du " Conseil européen " rassemblant les chefs d'Etat et de gouvernement, auquel les Français et les Allemands souhaitent voir jouer un rôle central dans la définition de la future politique étrangère et de sécurité commune.

Tout en recommandant une " structure unique ", le projet néerlandais prévoit le maintien de filières différentes les unes des autres, et cloisonnées, notamment celle de la coopération politique (qui fonctionne en matière de politique étrangère, en dehors des institutions communautaires). " La PESC serait de la sorte complètement éclatée ", déplore-t-on du côté français.

Quels étaient les objectifs des Néerlandais ? Obéir à la pression exercée par le Parlement européen. Apporter au moins formellement un appui à la Commission qui craint, en matière de politique étrangère, une dérive à son préjudice et au profit du Conseil européen. Rassurer les Anglais que l'ensemble de l'opération laisse tout à fait circonspects en faisant ressortir plus clairement que jamais que les velléités européennes en matière de sécurité et de défense ne visent d'aucune manière à prendre le pas sur l'alliance américaine.

S'agissant au moins de ce troisième point, l'erreur d'appréciation est totale. Londres a bien davantage relevé dans le projet néerlandais ce qui continue de lui déplaire _ renforcement des institutions supranationales, mise en oeuvre d'actions diplomatiques communes _ plutôt que les points favorables à ses thèses.

Au reste, la mauvaise humeur manifestée par les Britanniques ne les empêche probablement pas de se réjouir du désordre suscité par la démarche hollandaise. Sans compter qu'un échec des négociations sur l'union politique pourrait compromettre la signature du traité instaurant une union économique et monétaire. L'Allemagne, on s'en souvient, a constamment fait valoir qu'elle subordonnait son feu vert au programme d'UEM à des progrès sur le plan de l'intégration politique. Voilà une perspective seconde qui peut-être ne déplaira pas aux Britanniques dont l'adhésion en cours au projet d'UEM est dépourvue d'enthousiasme. " Il faut très vite sortir de cette impasse de procédure. Si elle se transforme en impasse sur les questions de fond, la conférence intergouvernementale sera compromise ", souligne-t-on du côté français. Il reste à savoir si la présidence néerlandaise, qui conduit les débats, et détient donc de ce fait une marge de manoeuvre appréciable, se prêtera à l'exercice de sauvetage ; comme M. Wim Kok l'a fait voilà dix jours sur le terrain de l'UEM. Le fait que la Commission, présidée par M. Delors, considère avec bienveillance l'initiative néerlandaise n'est peut-être pas de nature à faciliter ce changement de cap. (LM 30 sept, Ph Lemaitre).

Entrée en scène de l’Onu

Mercredi 25 sept 1991 : convoi d'une quinzaine d'autobus "la Caravane pour la paix", a pénétré en Yougoslavie par Trieste (Italie) pour gagner Ljubjana, Zagreb, Belgrade, Sarajevo dimanche. / Le président croate Franjo Tudjman et le ministre fédéral de la Défense, le général Veljko Kadijevic, doivent se rencontrer mercredi. / L'émissaire de la CEE sur la Yougoslavie — l'ambassadeur des Pays-Bas en France, M. Henri Wijnaendts —, est parti mercredi ou jeudi en Croatie et en Slovénie, puis en Bosnie-Herzégovine et en Macédoine.

— Le Conseil de sécurité de l’ONU vote une résolution 713 qui réaffirme son plein soutien à l’action de la Communauté européenne et décrète un embargo sur les ventes d’armes à destination de la Yougoslavie et des États qui en sont issus. Mais il refuse l’envoi d’une force d’urgence proposé par la France. (première ? erreur).

fin septembre ? : référendum clandestin au Kosovo sur la « souveraineté de la République ».

30 septembre 1991, le groupe ad hoc de l’UEO, chargé d’établir un plan d’action pour arrêter le conflit dans l’ex-Yougoslavie, alors limité à la Croatie, présente quatre options d'intervention pour la mise en oeuvre de la première force de maintien de la paix des Nations unies (FORPRONU).

Ces plans seront finalement retenus par l'ONU de préférence à ceux de l'OTAN jugés inadaptés, par leur ampleur, à la spécificité politique et aux finalités de l'opération. Le Conseil ministériel de l'UEO du 18 novembre suivant décide de mettre "à la disposition de l'ONU les détails des plans de circonstance déjà mis au point par les experts de l'UEO. (source : étude UEO 1994).

Il présente une option de force de maintien de la paix de 20 000 soldats, soutenus par 10 000 autres à titre de personnel supplémentaire d’appui. Il s’agissait alors d’une projection limitée à des contingents des Etats de l’UEO (10) et de l’OTAN (14 pays européens).

Lundi 30 septembre / 1er octobre 1991 : Conseil des ministres des affaires étrangères pour tenter de relancer l’Europe politique. La conférence intergouvernementale s'interroge sur le projet néerlandais qui divise les Européens. > (la rupture ?).

Octobre 1991.

Mar 1er octobre 1991 : encerclement de Dubrovnik (côte croate) par les forces fédérales et blocus des principaux ports de Croatie.

Jeu 3 octobre 1991 : A Belgrade, réunion de la présidence collégiale yougoslave avec des responsables de l'armée. Les Serbes s’emparent du pouvoir en décrétant le « danger de guerre imminent ». Ils excluent les représentants de la Macédoine et de Bosnie-Herzégovine du présidium.

Vendredi 4 octobre 1991 : le Royaume-Uni et l'Italie rendent publique une déclaration commune sur la défense. Ils proposent que l’UEO développe le pilier européen de l’OTAN (Mais non qu’elle devienne un pilier autonome comme le défendent l’Allemagne et la France).

Lun 7 octobre 1991 : Stipe Mesic démissionne de la présidence de la Fédération yougoslave.

Lun 7 et 8 octobre 1991 : appel de Barcelone, lors d’un colloque organisé par La Fondation Bertelsmann sur le « défi méditerranéen et l’Europe », de personnalités européennes aux gouvernements de la CEE pour qu'ils : « reconnaissent l'indépendance de la Slovénie et de la Croatie ».

Texte signé notamment par Joseph Rovan, professeur émérite à la Sorbonne, Werner Maihofer, ancien ministre de l'intérieur de RFA, Luigi Vittorio Ferraris, ambassadeur d'Italie, Eduardo Fonsillas, ambassadeur d'Espagne, et Karl Heinz Narjes, ancien vice-président de la Commission de Bruxelles. (source Le monde).

Mardi 8 octobre 1991 : Déclaration d'indépendance de la Croatie et de la Slovénie (expiration du moratoire de trois mois accepté le 7 juillet)- Accord de cessez le feu, pas respecté.

• réunion des groupes de travail de la Conférence sur la Yougoslavie, à La Haye, en présence de représentants des minorités serbes en Croatie.

• Cyrus Vance émissaire de l’Onu pour favoriser le déploiement des casques bleus.

Jeu 10 octobre 1991 : Visite en Bulgarie du premier ministre croate, Franjo Greguric, visite du ministre français des Affaires étrangères Roland Dumas en Albanie (Tirana).

Ven 11 octobre 1991 : le chancelier Helmut Kohl et le président François Mitterrand présentent un projet de traité sur la politique étrangère et la sécurité commune.

Sam 12 octobre 1991 : les Douze décident de faire appel au Conseil de sécurité de l’Onu, la Croatie et la Serbie sont d’accord à l’envoi de casques bleus.

15 octobre 1991 : le Parlement bosniaque proclame la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine, son retrait éventuel de la Fédération yougoslave ; départ des députés serbes du SDS.

Le déploiement des forces européennes d'interposition à la frontière des deux républiques sera accepté avec enthousiasme par la Croatie, mais difficilement toléré par la Serbie. Placer ces forces entre les combattants signifierait reconnaître de facto l'occupation serbe d'une partie vitale pour la survie de la Croatie. L'histoire récente nous enseigne qu'on ne peut assurer la paix en cherchant le compromis avec l'agresseur et en payant des primes politiques à la violence et au non-respect des accords. Si l'on accepte l'annexion des territoires croates à la Serbie, le conflit se déplacera en Bosnie, puis en Macédoine, et se transformera en une lutte de partisans contre l'occupant.

Appliquer strictement le principe de non-ingérence, comme cela s'est fait jusqu'à présent, est une hypocrisie, car cette politique avantage le plus fort et revient ici condamner les démocraties nouvelles désarmées face à l'ancien appareil militaire communiste.

Si le monde libre veut vraiment aider les jeunes démocraties et arrêter les ambitions des dirigeants d'un national-communisme qui est le dernier avatar du stalinisme, il ne lui reste qu'un seul moyen : la reconnaissance immédiate de la souveraineté des républiques yougoslaves qui le demandent (Slovénie et Croatie) ou qui le demanderont, reconnaissance assortie, en vertu des accords d'Helsinki, de la garantie des frontières républicaines existantes.

Reconnues comme Etats souverains, la Croatie et la Slovénie seront sujets de droit international et comme tels pourront être aidés sans que soit enfreint le principe de non-ingérence. La garantie internationale de leurs frontières rendra sans objet l'actuelle guerre de conquête. La Yougoslavie actuelle n'est pas " eurocompatible " ; enchaînées par la force les unes aux autres, les républiques yougoslaves forment aujourd'hui, après le réveil des haines, un mélange tellement explosif que ses conflagrations peuvent être différées mais non évitées. La reconnaissance de la souveraineté étant inévitable, pourquoi attendre qu'elle soit payée par une prix encore plus élevé en vies humaines ?.

18 octobre au 5 novembre 1991 : les Douze proposent trois plans de paix, légèrement différents, visant à transformer la Yougoslave en une « Confédération de républiques indépendantes et souveraines » (projet assez proche de ce qu’avaient proposé les Slovènes et Croates en octobre 1990) (source H. Stark).

21 octobre 1991 : les Albanais du Kovoso se dotent d’un « chef de gouvernement de la République du Kosovo souveraine ».

21 octobre 1991 : le Conseil parvient à un accord sur la création de l'Espace économique européen (EEE).

Jeu 22 octobre 1991 : la présidence yougoslave annonce la nécessité d'intensifier la mobilisation dans les territoires qui choisiraient avec la Serbie de rester. (source LM 29 octobre).

Jeu 25 octobre 1991 : ultimatum de l’armée fédérale yougoslave aux Croates retranchés dans Dubrovnik pour qu’ils se rendent. Le gouvernement croate rejette l'ultimatum, dans la nuit du samedi au dimanche 27 octobre. (source LM 29 octobre).

• 7e session de la conférence de Paix.

Vendredi 25 octobre 1991 ? : Constitution de l'Assemblée du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine.

Vendredi 25 au Dimanche 27 octobre 1991 : référendum sur " l'entière autonomie politique et territoriale " de l'enclave musulmane du Sandjak, qui comprend six districts de Serbie et trois districts du Monténégro.

Sam 26 octobre 1991 : la Kninska-Krajina, enclave serbe de Croatie qui, après la tenue d'un référendum en août 1990, s'était proclamée région autonome serbe, décrète la mobilisation générale sur son territoire et exigé que tous les hommes aptes au combat ayant quitté la région rejoignent immédiatement leurs unités.

Par ailleurs, les autorités de la " province autonome serbe de Slavonie " (est de la Croatie), qui avaient appelé à maintes reprises tous les hommes entre seize et soixante ans à rentrer chez eux pour défendre leurs " foyers ", ont demandé vendredi aux entreprises de Serbie employant des réfugiés de Slavonie de les licencier (source Le Monde 29 octobre).

Dim 27 octobre 1991 : Invité du " Grand Jury RTL-le Monde, Bernard Kouchner dénonce l'abjection " du comportement des différentes factions dans la guerre civile yougoslave, qui empêchent le travail des équipes de secours aux blessés. Mais estime désormais " très difficile " d'envoyer une force d'interposition en Yougoslavie, " à moins de faire la guerre.

M. Kouchner a estimé que ce comportement constituait " une régression totale de l'action humanitaire ". Il a vivement critiqué le " chantage " exercé pour permettre l'accès aux blessés, et le rôle des milices, qui s'opposent selon lui à tout véritable cessez-le-feu. " Je vois des hommes qui veulent en découdre et qui me rappellent les pires images du Liban (.). Même au Liban, les Croix-Rouge n'ont jamais éclaté, elles sont toujours restées unies. La Serbie et la Croatie ont déjà fait éclater leurs Croix-Rouge, c'est infect. (LM 29 octobre).

Dim 27 octobre 1991 : A Dubrovnik, les autorités militaires entament des négociations avec le maire local et la mission d'observateurs européens dans le petit port de Cavtat, contrôlé depuis une semaine par les fédéraux. Selon l'un des membres de la Commission européenne, " toutes les questions sont restées au point mort (.) et l'armée n'a pas précisé ce qu'il adviendrait si ses conditions n'étaient pas acceptées ". (source LM 29 octobre).

28 octobre 1991 : Projet de Traité de la présidence néerlandaise sur l'Union économique et monétaire.

— Rencontre des Ministres des Affaires étrangères des Douze. Ils exigent que la Serbie lève sa réserve sur le plan Carrington.

Si elle ne le fait pas d’ici à la prochaine session, la conférence poursuivra les travaux sans elle. La Serbie devra alors s’attendre que des mesures restrictives soient prises à son encontre. Pour la première fois les ministres évoquent même la possibilité d’un embargo sur le pétrole et un gel des avoirs yougoslaves à l’étranger. « Les Douze avaient déjà rappelé maintes fois que la solution politique qu’ils envisageaient prévoyait la reconnaissance dans le cadre d’un règlement général de l’indépendance des républiques qui le désiraient ». La Grèce s’impatiente. Samaras, le Ministre des affaires étrangères prévint ses collègues que son pays n’accepterait jamais que la république de Macédoine fût reconnue sous ce nom. L’utilisation abusive par le gouvernement de Skopje du nom de « Macédoine » qui appartenait exclusivement au patrimoine hellène impliquait une revendication territoriale à l’égard de territoires grecs. Une démarche de la dernière chance de l’ambassadeur Winaendts auprès de Milosevic est décidée. « Milosevic comme c’estsvt le cas lorsqu’il se sent acculé, fut plutôt coopératif. Après le froid, il soufflait le chaud » (source Winaendts p.129).

— Rejet par les Serbes de l’ultimatum de cesser de bloquer le processus de paix.

Jeudi 30 octobre – 14 novembre 1991 : Conférence de paix sur le Proche-Orient à Madrid, en Espagne. La Communauté se voit confier un rôle de chef de file dans le cadre des négociations multilatérales devant se dérouler ultérieurement.

Novembre 1991.

Vendredi 1er novembre 1991 : l’ambassadeur Henry Wynaendts à Sarajevo « Il nous parut que la situation devenait de plus en plus tendue et dangereuse en Bosnie-Herzégovine. Le président Izetbegovic me dit combien il appréciait dans ces conditions la présence des observateurs européens.

Dim 3 novembre 1991 : Visite du ministre grec des Affaires étrangères, Antonis Samaras à Belgrade. Visite du président macédonien Kiro Gligorov en Lybie, entretien avec Khadafi.

Mardi 5 novembre 1991 : expiration de l'ultimatum que la CEE a lancé à la Serbie.

Les Serbes repoussent définitivement les plans de paix proposés par les Douze, acceptées par l’ensemble des autres républiques yougoslaves. Les Serbes insistent sur le droit de la minorité serbe en Croatie à disposer d’eux-mêmes (source : H. Stark).

- 8e session de la Conférence CEE sur la paix en Yougoslavie (La Haye).

Mer 6 novembre 1991 : la Commission décide la création d'un Office européen de l'aide humanitaire.

Jeu 7-8 novembre 1991 : Un nouveau concept stratégique de l'Alliance (Otan) est approuvé à Rome par les chefs d'Etat et de gouvernement au Conseil de l'Atlantique Nord.

• Vendredi 8 novembre 1991 : les Ministres des affaires étrangères réunis à Rome, en marge du Sommet de l’Otan, décident : 1) la dénonciation de « l’accord de coopération et de commerce », 2) des « mesures positives compensatoires » pour les républiques qui coopéreront, 3) demandent au conseil de sécurité de l’Onu la mise en place d’un embargo sur le pétrole (seul compétent.

Mais il faudra attendre plus six mois pour qu’un embargo soit décidé, le 30 mai 1992). le principe de sanctions économiques contre la Yougoslavie après le rejet par les Serbes de l’ultimatum. Le ton est alarmiste.

Le processus de négociation a « été mis en danger » par le refus serbe d’accepter les « éléments fondamentaux » du plan Carrington. La demande allemande d’une reconnaissance immédiate a été rejetée.

« La perspective d'une reconnaissance de l'indépendance des républiques qui souhaitent y accéder ne peut s'envisager que dans le contexte d'un règlement global comportant des garanties adéquates pour la sauvegarde des droits de l'homme et des droits des groupes nationaux ou ethniques ».

(Genscher à son retour en Allemagne est soumis à une forte pression, vivement critiqué notamment dans le FAZ, reprenant le lobby procroate).

En Croatie, de nombreuses installations de l’armée restent soumises au blocus. Vukovar, assiégée depuis plus de deux mois par l’armée et les irréguliers serbes est sur le point de tomber. Autour de Dubrovnik, les combats font rage. L’Allemagne menace de reconnaître sans plus tarder la Croatie. Le Saint-Siège y pousse aussi (l’ambassadeur Henry Wynaendts, p. 132).

Dim 10 novembre 1991 : Plébiscite des Serbes de Bosnie-Herzégovine sur leur maintien dans la Yougoslavie.

Mar 12-13 novembre 1991 : Conclave sur l'Union politique.

Ven 15 novembre 1991 : une des chambres du Parlement serbe décide de limoger Ante Markevic, Premier Ministre fédéral.

Dim 17 novembre – 23 novembre 1991 : mission de Vance en Yougoslavie.

« Vance est un homme de bien, croyant, membre pratiquant de l’Eglise épicopalienne. Il croit aux vertus de la négocaition et du compromis. Pour lui Milosevic est un partenaire incontournable dans toute négociation, dont il doit s’assurer le concours. Lorsque l’occasion se présente, il n’hésite pas à lui décerner marques d’estime et de reconnaissance. En janvier 1993, il le remercie publiquement pour sa « grande contribution » à la cause de la paix, pour avoir obligé les Serbes de Bosnie-Herzégovine à dire un « oui » des plus ambigus à son plan de paix. (…) Sûr de ses vérités Vance n’aime pas être contredit. Dans la discussion, il interrompt souvent ses interlocuteurs d’un ton péremptoire : « can I interrupt you … Can I a ask you a question » (…) (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 138).

Lun 18 - 19 novembre 1991 : prise de contrôle total de Vukovar (Slavonie occidentale, Croatie) par l’armée fédérale yougoslave et l’armée serbe. La ville était assiégée depuis trois mois. C’est le symbole de la résistance croate qui tombe. Selon GM Chenu.

On estime les seules victimes croates de Vukovar à 2 000 morts, 2 500 invalides et 2 700 disparus et à 50 000 personnes déplacées pour tout le district.

jeudi 21 novembre 1991 : Nomination du nouveau premier ministre yougoslave.

Ven 22 novembre 1991 : Rencontre des ministres italien et allemand des affaires étrangères, Gianni de Michelis et Hans Dietrich Genscher, à Venise.

Sam 23 novembre 1991 : fin de la mission Vance en Yougoslavie.

26 novembre 1991 : Milosevic suggère à Vance, représentaant personnel du Secrétaire général que l’ONU envoie une force maintien de la paix. Il écrit au président du Conseil de sécurité pour demander au nom du gouvernement yougoslave « l’établissement d’une opération de maintien de la paix en Yougoslavie ».

« Milosevic n’avait jamais le rôle que la Communauté européenne jouait en Yougoslavie. Avec les Nations-Unies il se sentait plus à l’aise. La Yougoslavie y avait joui, grâce au leadership du mouvement des non alignés, d’une certaine influence. De plus les Nations-Unies avaient une tradition de non ingérence et de maintien du statu quo, dont le président serbe entendait pouvoir tirer profit. (…) Milo et Kadijevic veulent que les forces des Nations-Unies soient déployées en Croatie sur la ligne de front, créant ainsi une zone tampon entre les forces qui s’opposent » (et protégant ainsi les acquis territoriaux serbes). « Vance en discute avec Van den Broek. Ils se rencontrent à l’aéroport d’Amsterdam. Il faut éviter à tout prix – lui dit le ministre néerlandais – de répéter la faute commise à Chypre, où déployées comme elles le sont, sur la « ligne verte », les forces des Nations-Unies y protègent en fait les acquis territoriaux turcs. Cela a rendu toute solution du problème chypriote encore plus ardue. » (l’ambassadeur Henry Wynaendts, p. 136).

27 novembre 1991 : le Conseil de sécurité de l’Onu adopte à l’unanimité une résolution soutenant les efforts de Cyrus Vance pour favoriser le déploiement de casques bleus.

Jeudi 28 novembre 1991 : en visite à Paris, Le ministre polonais des Affaires étrangères Krzysztof Skubiszewski est convaincu "on va finir par trouver un nombre d'Etats suffisant pour reconnaître la Croatie".

Selon lui, la Pologne "ne veut pas se singulariser" mais elle fait partie des Etats qui envisagent de reconnaître les Républiques sécessionnistes de Slovénie et de Croatie. "Nous donnons la priorité au processus de consultation des Douze dans le cadre de la conférence de la Haye. Il n'y aura pas d'initiative isolée", s'est-il toutefois empressé de préciser (source AFP).

A Bonn, consultation entre le chancelier allemand Helmut Kohl et les chefs de gouvernement britannique John Major, italien Giulio Andreotti et néerlandais Ruud Lubbers afin de préparer le sommet européen de Maastricht.

Premier avis de la Commission Badinter d’arbitrage. Il reconnaît que la république de Yougoslavie est engagée « dans un processus de dissolution ». Et il appartient aux républiques de régler « conformément aux principes et aux usages internationaux » les nombreux problèmes de succession d’Etat qui en découlent (respect des droits de l’homme et de minorités, liens entre les républiques, partage des avoirs et des dettes). (l’ambassadeur Henry Wynaendts p.150).

Décembre 1991

1-2-3 décembre 1991 : Conclave sur l'Union économique et monétaire.

2-3 décembre 1991 : Conférence intergouvernementale sur l'Union politique.

2 décembre 1991 : élections en Bosnie-Herzégovine, défaite des communistes, victoire des nationalistes.

6 décembre 1991 : les Etats-Unis imposent des sanctions à l’ensemble des républiques yougoslaves après les bombardements d’Osijek et Dubrovnik.

7 décembre 1991 : Avis de la Commission Badinter sur l’éventuelle reconnaissance des républiques issues de la fédération yougoslave.

8 décembre 1991 : Visite du président croate, Franjo Tudjman à Bonn (Allemagne).

9-10 décembre 1991 : Conseil européen de Maastricht. Approbation des nouveaux Traités (CIG coopération politique et CIG union économique et monétaire). La situation critique en matière d’approvisionnement alimentaire à Moscou et Saint-Petersbourg fait l’objet de mesures spécifiques. Plus généralement l’évolution de la situation en Union soviétique attire son attention (une déclaration est faite). Rien sur la Yougoslavie. ??.

9 décembre 1991 : lord Carrington réunit, de façon informelle, les six présidents des Républiques (les sessions plénières sont toujours ajournées).

« Tudjman et Kucan poussèrent à la reconnaissance. Alija Izetbegovic et Gligorov furent d’une extrême prudence. Il fallait qu’intervienne un règlement général de la crise yougoslave. Izetbegovic estimait que l’on courait droit au drame si l’on reconnaissait la Bosnie-Herzégovine avant que des forces des Nations-Unies n’y soient déployées. (…) Le forcing allemand pour amener les Douze à reconnaître la Slovénie et la Croatie ne se relâchait pas et le chancelier Kohl avait même déclaré que l’Allemagne le ferait avant Noël » (…) Carrington fit remarquer aux Douze que si l’on rompait le lien entre ces questions (notamment droits de l’homme et minorités, voir avis n°1 comm arbitrage) et la reconnaissance des Républiques, on mettait la conférence elle-même en péril. Les Croates, ayant obtenu ce qu’ils voulaient n’auraient plus de raison de faire des concessions sur le point épineux du statut à accorder aux Serbes de Croatie. Quant à la Serbie, quel intérêt aurait-elle de rechercher une solution dans le cadre de la conférence puisque l’affaire aurait été jugée ? Carrington rappela aux Douze que Milosevic avait été très net sur la Bosnie-Herzégovine : si son indépendance était reconnue avant qu’un accord entre les trois communautés ait été préalablement conclu, une guerre civile devenait inévitable. (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 149 et 150).

10 décembre 1991 : le Secrétaire général des Nations-Unies, Perez de Cuellar, écrit aux Douze une lettre dans lesquels il les met en garde contre une reconnaissance « prématurée de certaines républiques yougoslaves ». Un tel développement « pourrait mettre le feu aux poudres, notamment en Bosnie-Herzégovine ». (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 151).

11 décembre 1991 : le Secrétaire général des Nations-Unies soumet le plan « Vance » au Conseil de sécurité. Territoires démilitarisées, envoi de 10.000 hommes des Nations-Unies dans les « régions de Croatie, où les Serbes constituent une majorité ou une minorité substantielle ». Zones protégées et policiers pour s’assurer qu’il n’y a ni discrimination ni violation des droits de l’homme.

Il attire l’attention des membres du Conseil sur les risques qu’une reconnaissance prématurée de certaines républiques ferait encourir au processus de Paix.

15 décembre 1991 : le Conseil de sécurité de l’Onu adopte la résolution 724 qui donne l’accord au plan Vance, prévoit l’envoi en Yougoslavie d’une vingtaine d’observateurs militaires et renforce l'embargo sur les armes.

• 16 décembre 1991 : le conseil des Ministres Affaires générales à Bruxelles, présidé par le Néerlandais Hans Van Den Broek, définit une procédure de reconnaissance de l'indépendance des républiques yougoslaves. La reconnaissance est soumise à des critères (respect des « lignes directrices » + projet de Convention en examen à la Conférence de Yougoslavie), les républiques souhaitant quitter la fédération yougoslave doivent adresser une demande, avant le 23 décembre, soumise à la Commission d’arbitrage Badinter, la reconnaissance pouvant intervenir le 15 janvier 1992. Les Douze ont fixé des critères pour examiner les demandes de reconnaissance (NB : lignes précises, anticipatives, l’Europe reprendrait-elle le dessus).

Le Conseil adopte « des lignes directrices sur la reconnaissance de nouveaux Etats en Europe orientale et en Union soviétique » (résultat de la demande du Conseil européen). Attachement au « principe d’autodétermination », « tenant compte des réalités politiques dans chaque cas concret ». Critères: constitués sur une « base démocratique », ont « accepté des obligations internationales », « engagés de bonne foi dans un processus pacifique et négocié ». Respect des dispositions de la Charte des Nations unies et engagements de l’acte final d’Helsinki et de la Charte de Paris, notamment en ce qui concerne l’Etat de droit, la démocratie et les droits de l’homme ; la garantie des droits des groupes ethniques et nationaux et des minorités (engagements CSCE) ; respect de l’inviolabilité des limites territoriales qui ne peuvent être modifiées que par des moyens pacifiques et d’un commun accord; reprise de tous les engagements pertinents relatifs au désarmement et à la non-prolifération nucléaire ainsi qu’à la sécurité et à la stabilité régionale ; engagement à régler par accord, notamment le cas échéant par recours à l’arbitrage, toues les questions afférentes à la succession d’Etats et aux différents régionaux. La Communauté affirme ensuite ne pas vouloir reconnaître les « entités qui seraient le résultat d’une agression » et vouloir prendre « en considération les effets de la reconnaissance sur les Etats voisins ».

« L’atmosphère est tendue. Les discussions durent jusqu’aux petites heures du matin. Le traité de Maastricht vient d’être conclu cinq jours plus tôt. Cela pèsera lourd dans les débats. Il est en effet impensable que les Douze n’arrivent pas à une position commune. L’Allemagne est déterminée à ce que la Slovénie et la Croatie soient reconnues. La Serbie doit savoir, expliquer Genscher, qu’elle ne peut agir impunément. Qu’a-t-elle fait depuis la dernière réunion des Douze du 8 novembre à Rome. Elle a fini de réduire Vukovar en cendres et continue de s’en prendre même au centre historique de Dubrovnik. L’argument porte. En fin de compte, les Douze décident de reconnaître l’indépendance de « toutes » les républiques qui le désiraient (sans distinction). (…) Les ministres avaient presque terminé le 16 décembre avec leurs délibérations lorsque Antonis Samaras, l’élégant et fougueux ministre grec, souleva le problème de la Macédoine. Tout le monde était épuisé et l’on ne voulait pas rouvrir le débat sur la reconnaissance. Samaras n’eut donc pas grand mal à faire ajouter à la déclaration ministérielle « un pays devait s’engager à s’abstenir de tout acte de propagande hstile envers un pays voisin appartenant à la Communauté européenne, y compris l’utilisation d’un nom qui impliquerait une revendication territoriale ». (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 151).

18 ou 19 décembre 1991 : Signature au 13e étage du batiment Charlemagne des "accords européens" avec la Pologne, la Hongrie et la Tchécoslovaquie.

18 ou 19 décembre 1991 : Carrington se rend en Yougoslavie pour expliquer aux présidents des six républiques la décision européenne.

Tudjman est particulièrement loquace. Milosevoc fulmine : la Communauté européenne n’avait nullement reçu mandat pour abolir la Yougoslavie. Bulatovic redit en termes plus aimables ce que Milosevic avait déjà expliqué. Izetbegovic est très inquiet. (…) Carrington repartir pessimiste. Sa visite avait confirmé ses pires appréhensions. La décision des Douze de reconnaître les Républiques, avant la conclusion d’un accord global, avait « sapé » les bases même de la conférence de la paix. Il n’avait plus de moyens de pression et serait désormais tributaire du bon vouloir des parties. La décision de demander à la Bosnie-Herzégovine si elle voulait être indépendante était une « erreur tragique ». Un tel scénario était inacceptable pour les Serbes et il ne pouvait, à moins d’un déploiement rapide « d’une importante présence des Nations-Unies en Bosnie-Herzégovine » que déboucher sur une guerre civile. Or Vance ne voulait pas envisager l’envoi de casques bleus dans cette République. (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 154).

19 décembre 1991 : l’Allemagne décide de reconnaitre, sans attendre l’avis de la Commission d’arbitrage la Slovénie et la Croatie (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 154).

— le Parlement de Krajina (serbes de Croatie) proclame la « République de Krajina Serbe », dont Milan Babic devient président.

20 décembre 1991 : la Bosnie-Herzégovine présente sa demande de reconnaissance à la Communauté européenne. Alija Izetbegovic est élu président de la république après les élections du 2 décembre.

21 décembre 1991 : les présidents des républiques de l'Union soviétique, à l'exception de la Géorgie, signent, à Alma-Ata, au Kazakhstan, un accord créant la Communauté des États indépendants (CEI).

23 décembre 1991 : le conseil des Ministres des Affaires générales (CEE) décide de l’extension de l’aide économique (Phare) à l’Albanie et aux Etats Baltes, ainsi que d’une aide alimentaire d’urgence. Rien sur Yougoslavie.

23 décembre 1991 : l’Allemagne reconnaît officiellement la Croatie et la Slovénie.

25 décembre 1991 : M. Gorbatchev démissionne de ses fonctions de président de l'Union soviétique.

31 décembre 1991 : le présidium serbe-monténégrin (ex-Yougoslavie) donne son aval au plan de paix de l’Onu, de Cyrus Vance.

Bilan 1991 : Au cours de la seule année 1991, quelque 20.000 personnes sont tuées, plus de 200.000 personnes s'enfuient du pays, et 350 000 deviennent des déplacés internes. (source : Documentation française). De source croate : en six mois, plus de 10 000 morts, et exode de 500.000 personnes.

1992

Janvier 1992

Le Portugal prend la présidence de la CE. C’est la première fois.

1992 ? : mise en place d'institutions parallèles au Kovoso. Ibrahim Rugova est élu à la «présidence». Le scrutin est jugé illégal par les Serbes.

? 1992 : création d’ECHO, l’Office d’aide humanitaire de la CE.

1992 : pourparlers à Lisbonne, sous direction de la communauté internationale, entre Bosniaques, Croates et Serbes qui aboutirent au traité de partage de la Bosnie-Herzégovine en trois cantons.

Ce traité voit deux jours plus tard le retrait de la signature du président de la république de Bosnie-Herzégovine, le Bosniaque (musulman) Alija Izetbegovic.

1er janvier 1992 : l’émissaire de l’Onu, Cyrus Vance obtient l’accord de Belgrade et Zagreb pour un cessez-le-feu (le quinzième depuis le début de la guerre civile) et le déploiement de casques bleus en Croatie. Il parvient à un accord sur le plan des opérations de paix en Yougoslavie, avec les présidents croate, serbe et le ministre yougoslave de la défense : Franjo Tudjman, Slobodan Milosevic et Veljko Kadijevic.

3 janvier 1992 : Entrée en vigueur du quinzième cessez-le-feu en Croatie.

Lun 6 Janvier 1992 : en visite à Sarajevo, Lord Carrington propose l’ouverture dans le cadre de la conférence de la paix, des négociations sur l’avenir de la Bosnie-Herzégovine. Ces négociations sont confiées à Cutileiro, diplomate portugais. Boutros Boutros-Ghali, doit présenter au Conseil de sécurité à New-York, un rapport sur la situation en Yougoslavie. Une nouvelle réunion de la conférence de paix est programmée pour le 9 janvier.

Mar 7 janvier 1992 : la destruction en vol, d'un hélicoptère de la CEE par l'armée de l'air yougoslave, provoque la mort de cinq observateurs, due à des « erreurs » de l'armée yougoslave, des observateurs européens et « un malheureux concours de circonstances » lié à la "situation extrêmement difficile régnant dans l'espace aérien", selon le Ministère yougoslave de la Défense.

l'incident condamné par le Conseil de sécurité, après une réunion informelle sous la forme d'une déclaration de son président, l'ambassadeur de Grande-Bretagne, Sir David Hannay. Le Conseil demande des assurances aux autorités yougoslaves pour que de tels incidents ne se reproduisent plus et prend note du fait que ces dernières s'engagent à prendre " toutes les mesures nécessaires " après cette " violation flagrante " du cessez-le-feu.Sir David Hannay précise que cet épisode n’aura pas de conséquences négatives sur la décision d'envoyer 56 observateurs onusiens en Yougoslavie, figurant dans une résolution qui doit être adoptée mercredi après-midi.

Mer 8 janvier 1992 : Une nouvelle résolution du Conseil de sécurité (721), approuvée à l'unanimité, demande à toutes les parties du conflit yougoslave d'honorer les engagements pris à Genève et à Sarajevo " et " réaffirme la décision d'embargo sur les armes déjà en place depuis septembre dernier ".

Jeu 9 janvier 1992 : réunion plénière de la conférence de la paix. « rien de nouveau » (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 155).

Ven 10 janvier 1992 : démission du représentant de la Macédoine, Vasil Tupurkovski, au gouvernement fédéral.

Sam 11 janvier 1992 : la Commission Badinter rend ses conclusions sur la reconnaissance des républiques de l'ex-Fédération (avis numéro 2). Elle rejette le droit à l’autodétermination des Serbes de Bosnie-Herzégovine et de Croatie, ils ne peuvent faire sécession et doivent se contenter de bénéficier à l’intérieur des républiques, de tous « les droits reconnus aux minorités ». Sur les frontières, elle estime que « les lignes de démarcation internes acquièrent le caractère de frontières protégées par le droit international ».

Sur les républiques, la Slovénie et la Macédoine satisfont à toutes les conditions. Pour la Macédoine, elle constate qu’elle a renoncé à toute revendication territoriale et, dès lors que l’utilisation du nom « Macédoine » ne saurait impliquer aucune revendication territoriale à l’égard d’un autre Etat ».

Sur la Croatie, elle estime que la loi constitutionnelle du 4 décembre 1991 « ne recouvre pas intégralement toutes les dispositions » du projet Carrington. La République doit compléter la loi. « Sous cette réserve, la Croatie satisfait aux conditions requises ».

Sur la Bosnie, elle estime que si les Serbes ne peuvent y faire sécession, « l’expression de la volonté des populations de Bosnie-Herzégovine de constituer cette république en Etat souverain et indépendant ne peut être considérée comme pleinement établie ». Elle suggère « la tenue d’un référendum auquel seraient appelés à participer tous les citoyens, sans distinction aucune et sous contrôle international ». (l’ambassadeur Henry Wynaendts p. 156).

La Communauté européenne, suivie bientôt par les Etats-Unis et l'ONU elle-même, ne suit pas ses avis : elle reconnaît la Slovénie et la Croatie, mais pas la Macédoine.

Sam 11 et 12 janvier 1992 : référendum sur l'autonomie politique et territoriale, prévu par les Albanais de souche de Macédoine.

Mar 14 janvier 1992 : le premier détachement de Casques bleus arrive en Croatie. Mais les dirigeants serbes de cette République s’opposent à leur déploiement.

Mer 15 janvier 1992 : la Communauté européenne demande à la Bosnie- Herzégovine d’organiser un référendum d’autodétermination. (erreur ?) Les Douze reconnaissent l’indépendance de la Slovénie et de la Croatie (et de la Macédoine $VERIFIER). L’acte entérinant la fin de la Fédération est signé à Zagreb.

Février 1992

2 février 1992 : Mate Boban remplace Stjepan Kljujic à la tête du HDZ (Communauté démocratique croate) de Bosnie.

• 3 février 1992 : rétablissement des relations économiques (sauf avec la Serbie). le Conseil des Ministres des Affaires générales décide de mesures « positives » pour les produits originaires de Croatie, la Slovénie, la Bosnie, la Macédoine et le Monténégro (NB : il y a là une différenciation déjà entre la Serbie et les autres républiques yougoslaves).

Ces « règlements ont pour objet de restaurer en faveur des ces Républiques qui coopèrent au processus de paix la totalité des concessions commerciales dont bénéficiait antérieurement la Yougoslavie et qui avaient été partiellement rétablies en leur faveur le 15 novembre 1991 ». Le Conseil prend bien soin de préciser que les dénominations utilisées est de « nature uniquement géographique et ne préjuge pas les futurs statut politique et dénominations de ces entités ».

5-6 février 1992 : Peter Carrington se rend en Yougoslavie pour tenter de désamorcer la crise qui s’annonce en Bosnie-Herzégovine. « J’ai le sombre pressentiment que tout est en place pour le drame qui s’annonce et que, telle une tragédie grecque, il ira inexorablement à son terme ».

7 février 1992 : signature du traité de Maastricht.

• 21 février 1992 : décision unanime du Conseil de sécurité de l’ONU pour l’envoi d’une force de protection (Forpronu) dotée de 14 000 hommes, civils et militaires (résolution 743).

(Nicolas Gros-Verheyde)

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Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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