Analyse BlogMissions Opérations

Les missions et opérations de maintien de la paix de l’UE (PESD) en cours – 2008

(BRUXELLES2) A ce jour, une vingtaine d’opérations ont été déployées ou sont en passe de l’être, en Europe, Afrique, Asie et Moyen-Orient, militaires ou civiles, de différentes sortes: observation-surveillance (Balkans, Indonésie, Géorgie), postes frontières (Rafah-Palestine, Moldavie-Ukraine), formation et renforcement de la police (Afghanistan, Bosnie, Congo, Palestine), réforme des forces de sécurité (Congo, Guinée), Etat de droit (Irak et Kosovo). Ces missions sont d’importance variable, en volume d’hommes, durée et intensité d’action. Si l’UE s’est reposée au départ davantage sur les moyens de l’Otan ou d’autres organisations, elle devient aujourd’hui plus autonome et, surtout, déploie des effectifs plus importants sur des durées plus longues. Lire aussi : Les missions et opérations (terminées)

Missions civiles

Mission de police « MPUE » Bosnie-Herzégovine (janvier 2003 – décembre 2009). Relevant la mission de police des Nations-Unies (IPTF) dans le pays, elle vise à la création d’une police bosnienne, « unifiée, indépendante et dépolitisée, ainsi qu’au renforcement des compétences professionnelles des policiers (hauts responsables, formation et recrutement), notamment en matière de lutte contre la criminalité organisée et la corruption, grâce à la création d’une agence gouvernementale spécialisée sur ces questions. Elle compte 400 personnes (dont 180 experts européens) et est dirigée par le policier allemand Stefan Feller qui a pris la relève le 1er novembre de son collègue italien Vincenzo Coppola (Lire : Stefan Feller, nouveau chef de la mission Eupol Bosnie).

Mission réforme de la sécurité « Eusec » RD Congo (juin 2005 – juin 2009). Venant en appui de la réforme de l’armée congolaise, et du processus de réconciliation nationale, elle mène plusieurs projets: réforme de la chaîne de paiement des militaires – pour assurer plus efficacement le versement de salaires, un élément clé dans la lutte contre la corruption -, recensement biométrique des troupes (avec carte d’identité infalsifiable à la clé et vérification des grades),  organisation d’une force de réaction rapide. La reprise des hostilités dans la province du Nord Kivu (près du Rwanda) complique la mission. Elle compte une quarantaine de personnes et est dirigée par le général français, Jean-Paul Michel.

Mission Etat de droit EUJUST Lex Irak (juillet 2005 – juin 2009). Créée dans le cadre du programme de l’UE pour l’Iraq présenté en novembre 2004, la mission a pour objectif de former les personnels irakiens de police, judiciaire et pénitentiaire, soit dans le pays, soit dans des États membres de l’UE. Elle a jusqu’ici formé environ 1750 personnes. Comptant une trentaine d’experts, à Bruxelles et Bagdad, elle est dirigée par le Britannique Stephen White.

Mission de surveillance aux frontières « EUBAM Moldavie Ukraine  (novembre 2005 – novembre 2009). Même si elle n’est pas formellement une mission de la PESD, cette mission de formation et de restructuration des gardes frontières y ressemble fortement. De par son mandat – former et restructurer les
douanes et gardes-frontières de ces deux pays, marquées par leur histoire commune au sein de l’ex-Urss -. et également de par le contexte. La mission est notamment déployée le long de la frontière entre l’Ukraine et la Transnistrie, la partie Est de la Moldavie, qui a fait sécession en 1992 et s’est proclamée indépendante, sans être reconnue par aucun Etat au monde, même par la Ruisse qui y maintient un contingent de « forces de paix ». Le risque d’un « trou noir » où s’engouffrent mafias et trafics en tous genres était donc réel. « Eubam » compte 200 personnes (dont 130 experts de l’UE) et est dirigée par le major-général hongrois Ferenc Banfi. Lire : Ferenc Banfi: “Eubam, un rôle dans la stabilisation de la région”

Mission de surveillance aux frontières « EUBAM Rafah » (novembre 2005 – novembre 2008). Mise en place à la suite des accords entre Israël et l’Autorité palestinienne, cette mission de surveillance du point de passage de Rafah a subi très vite le changement politique après la victoire du Hamas aux élections en janvier 2006 et le boycott de Gaza par Israël. Entre juin 2006 et juin 2007, le point de passage – fermé en temps normal – a pu être ouvert à plusieurs reprises de façon exceptionnelle. Ce qui avait permis à 165 000 de transiter. Depuis juin 2007, la mission est suspendue jusqu’à nouvel ordre. L’UE est « prête à redéployer son personnel au point de passage de Rafah, dès que les conditions le permettront ». Dotée de 27 personnes, effectif réduit à 15 personnes, elle était dirigée par le général italien Pietro Pistolese, remplacé à compter du 25 novembre par le colonel français Faugeras (gendarmerie). Lire : Le Col. Alain Faugeras (Fr) nommé à la tête de l’EUBAM Rafah

Mission de police « EUPOL Copps » Palestine (janvier 2006 -). Mis en place dans le cadre des efforts de l’UE pour aider la Palestine à se structurer comme Etat, elle était au départ destinée à renforcer la police palestinienne, dans l’organisation au niveau local comme central, pour le maintien de l’ordre public, avec formations et équipements à la clé. Depuis mai 2008, a mission est peu à peu étendue à la « justice pénale » (juridictions, parquets et système pénitentiaire). Elle compte une trentaine de personnes (policiers et experts civils), sous la direction du Britannique Colin Smith.

Mission de police « Eupol » RD Congo (juillet 2007 – juin 2009). Prenant le relais de la mission « Eupol Kinshasa », elle vise à développer une unité « Grande criminalité » et la mise en place d’un centre de commandement dans la capitale pour faciliter l’interaction entre la police et la justice. Eupol compte une quarantaine d’experts de la justice pénale – de neuf Etats membres, Suisse et Angola – et est dirigée par le Portugais Adilio Custodio.

Mission de police « Eupol » Afghanistan (juin 2007 – juin 2010). Inscrite dans l’effort de la communauté internationale pour stabiliser l’Afghanistan, la mission vise à renforcer la police afghane dans le cadre de l’Etat de droit (enquêtes pénales, formation, gestion des frontières). Elle poursuit le travail entamé par l’Office allemand pour le projet de police (GPPO) et compte 230 personnes, chiffre qui devrait être augmenté à 400 selon la décision des ministres de la défense en mai 2008. Elle est dirigée par le policier danois Kai Vittrup qui a pris le relais, en octobre 2008, du général allemand Jürgen Scholz. Lire : Kai Vittrup nommé à la tête d’Eupol Afghanistan

Mission Etat de droit EULEX Kosovo (février 2008 – février 2010). La mission doit prendre le relais de la Mission des Nations-Unies (Minuk) dans les différentes tâches de l’Etat de droit (justice, police, douanes) à un moment délicat : l’indépendance de l’ancienne province serbe. L’hostilité de la Serbie et de la Russie ont retardé le déploiement. Mais celui-ci a repris durant l’été 2008 et devait être terminé à la fin de l’année. A terme, Eulex devrait compter environ 3000 personnes (1900 de l’UE et 1100 personnels locaux) : des policiers (1400 environ, dont 4 à 500 chargés du maintien de l’ordre), des magistrats (200 à 300), une petite unité de douanes (environ 20 personnes). C’est donc la plus grosse mission civile de l’UE. 26 Etats membres y participent ainsi que 4 pays tiers (Suisse, Norvège, Turquie, Etats-Unis). Elle est dirigée par l’ancien général français Yves de Kermabon. Lire : Yves de Kermabon: mon idée maitresse, rétablir la confiance

Mission réforme de la sécurité EUSSR Guinée-Bissau (juin 2008 – juin 2009). La mission vise à aider au processus de réforme du secteur de sécurité (police, justice, armée), entamé parle gouvernement avec le soutien des organisations internationales. Composée d’une quarantaine de personnes (21 spécialistes internationaux + 18-19 locaux), elle est dirigée par le général espagnol, Juan Esteban-Verastegui. Lire : Guinée-Bissau: “rebâtir de zéro” (Gén. Verástegui)

Mission d’observation EUMM Georgia (octobre 2008 – octobre 2009). Mise en place dans l’urgence, après les accords de cessez-le-feu signés entre la Russie et la Géorgie, sous l’égide de l’Union européenne – le plan en six points Medvedev-Sarkozy -, la mission s’est déployée en un temps record, fin septembre,
afin de remplacer les troupes russes dans la « zone de sécurité », sur territoire géorgien, aux limites de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie (provinces de Géorgie autonomes de fait depuis 1992, proclamées indépendantes durant le conflit, mais pas reconnues sauf par la Russie et quelques pays). La mission a une durée d’un an. Elle compte 240 personnes et est dirigée par le diplomate allemand Hansjörg Haber. Lire : Un Allemand à la tête d’EUMM Georgie, secondé par un général français

Opérations militaires

Opération de stabilisation Althéa Bosnie-Herzégovine (décembre 2004 – ). L’UE a pris le relais de la force de l’Otan Sfor, présente dans le pays depuis décembre 1996, à la suite des accords de Dayton. Prévue pour rester « sur place aussi longtemps que nécessaire », elle a progressivement diminué ses effectifs – de 7000 à 2500 aujourd’hui – et la clôture de la mission est débattue au niveau des Etats membres. Mettant en oeuvre l’accord « Berlin Plus », le quartier-général d’opération est assuré par l’Otan (Shape) à Mons. La force est dirigée par le général espagnol Ignacio Martin Villalain (qui a succédé au contre-amiral allemand Hans-Jochen Witthauer).

Opération de protection EuforTchad – République centrafricaine (15 mars 2008 – 15 mars 2009). Mise en place pour protéger les camps de réfugiés et déplacés dans l’est du Tchad et le nord de la République centrafricaine, en prélude au déploiement de Casques Bleus de l’Onu, la force européenne compte 3500
personnes. Dirigée par le général irlandais Pat Nash (commandant d’opération basé au Mont-Valérien) et le général français Jean-Philippe Ganascia (commandant de force), elle a dû surmonter plusieurs difficultés politiques, logistiques ou de sécurité. Lire : Gén. Ganascia: “Maintenir la force en état opérationnel”

Opération de lutte contre la piraterie EuNavFor Atalanta Somalie (décembre 2008 – décembre 2009). Face à l’augmentation des cas de pirateries touchant les navires marchands ou de pêche, l’Union européenne a décidé de mettre en place ce qui constitue sa première opération navale. Devant les difficultés
juridiques et politiques, il a été décidé de d’abord mettre en place une cellule de coordination, « Eu Navco », de petite dimension (quelques officiers), au sein de l’Etat-Major de l’UE à Bruxelles, afin d’assurer la liaison avec toutes les parties intéressées (armateurs et organisations de marins, programme alimentaire mondial et Ongs, coalition militaire CTF 150 dirigée par les Américains…). Décidée en novembre, l’opération militaire devrait démarrer officiellement en décembre, pour une durée d’un an. Elle est dirigée par le contre-amiral britannique Philip Jones, basé au QG britannique de Northwood. Lire :  Philip Jones (Uk), chef de l’opération “EuNav” antipirates (Somalie)

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).