Analyse BlogMissions OpérationsRussie Caucase Ukraine

Qui participera à la présence avancée de l’OTAN à l’Est ? (maj1)

(crédit : US Gov)
(crédit : US Gov)

(BRUXELLES2 à Varsovie) L'OTAN vient d'annoncer officiellement, ce qui était préparé depuis plusieurs mois : le renforcement de sa présence à l'Est, sous la forme de quatre bataillons prépositionnés dans les quatre pays, jugés les plus fragiles : les pays baltes et la Pologne. Le sommet de Varsovie, qui a commencé hier (8 juillet) et se poursuit ce samedi (9 juillet), a été l'occasion pour les différents pays de l'Alliance d'annoncer leur participation. Qui va participer ? Dans quel pays ? Sous quel commandement ?

Quatre bataillons avec 4 pays leaders

La « présence avancée » (Enhanced Forward Presence ) sera composée de quatre bataillons « robustes », dotés d'une « certaine autonomie », déployés, dans les trois pays baltes et la Pologne. Ils devraient être opérationnels dès l'année prochaine, en 2017. La composition de chaque bataillon sera multinationale et assurée par rotation de six mois. Mais un pays assurera le rôle de nation-cadre, assurant le commandement et fournissant l'essentiel de l'effectif : l'Allemagne en Lituanie, le Canada en Lettonie, le Royaume-Uni en Estonie et les Etats-Unis en Pologne pour la première période. Chaque bataillon comprendra environ 1000 hommes (combattants, commandement et soutien), l'effectif pouvant varier selon les saisons et les pays. En tout, 4000 hommes. Une quasi-présence permanente qui ne remet pas en cause les accords OTAN-Russie, jure-t-on à l'Alliance. Mais cette présence « n'a pas de durée limitée. Elle durera autant que nécessaire » a précisé vendredi soir lors de sa conférence de presse, Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l'Alliance.

La Pologne choyée avec une brigade blindée US

Ce renforcement est accentué par le positionnement, « dès l'année prochaine », d'une brigade blindée américaine en Pologne. Cette brigade comportera environ 3200 hommes. Elle ne sera pas basée en Pologne mais ses effectifs assurés par rotation (1). Elle disposera en revanche, d'équipements prépositionnés : 1200 véhicules (dont 25% de tanks) (2). Une force qui s'ajoutera au détachement d'aviation présent sur la base aérienne de Łask, où les Américains maintiennent « en continu, par rotation, du personnel et des avions ». « Quand je suis arrivé ici il y a cinq ans, j'avais promis d'accroître notre engagement envers la sécurité de la Pologne. C'est exactement ce que nous avons fait » a déclaré le président américain lors d'une rencontre avec son homologue polonais A. Duda. La Pologne « va voir une augmentation (dans le cadre) de l'OTAN de personnel américain et de l'équipement le plus moderne. Nous respecterons notre obligation de défense commune de l'article 5 » (3).

Qui va fournir les effectifs

Bataillon basé en Lituanie : nation-cadre = Allemagne

+ Les Pays-Bas devraient envoyer environ 150 militaires en Lituanie, aux côtés des Allemands. La Défense néerlandaise a une coopération étroite avec la Bundeswehr allemande surtout en matière de l'armée de terre.

+ La Belgique devrait envoyer également une compagnie, soit au maximum 200 militaires, a précisé le ministre de la défense, Steven Vandeput. Reste maintenant « à étudier les détails pratiques avec nos partenaires et avec l'état-major de la Défense » a-t-il ajouté, selon Belga. Cette participation fera partie du « dossier des opérations militaires belges en 2017 ».

+ La France devrait envoyer à la rotation suivante (en 2018) une compagnie (environ 150 hommes) appartenant à la Brigade franco-allemande, selon nos informations.

Bataillon basé en Lettonie : nation-cadre = Canada. Environ 450 hommes, selon le chef d'Etat-major canadien, le général Jonathan Vance.

Bataillon basé en Estonie : nation-cadre = Royaume-Uni. Environ 500 hommes a annoncé le ministre de la Défense, Michael Fallon, à son arrivée à Varsovie.

+ France : une compagnie (env. 150 hommes) en 2017

+ Danemark : un maximum 200 hommes, une contribution qui doit être encore approuvée à Copenhague. « Il ne doit y avoir aucun doute que la sécurité des alliés de l'Est, préoccupe le Danemark » a expliqué Peter Christensen, le ministre de la Défense. « Nous avons la plus grande solidarité avec nos amis baltes, et il est très important que nous montrions la cohésion et la solidarité de l'OTAN ».

Bataillon basé en Pologne : nation-cadre = Etats-Unis. Environ 1000 hommes a annoncé le président américain.

+ Royaume-Uni : 150 hommes

Autres contributions

L'Italie a promis une compagnie de 150 hommes

La Norvège a décidé une contribution d'une compagnie mécanisée d'environ 200 militaires — « ou d'une unité d'une autre arme de taille similaire » pour une période de six mois en 2017, a annoncé le gouvernement.

Certains pays n'ont pas encore confirmé leur participation ou le feront plus tard

La Turquie devrait participer lors de la seconde rotation, selon un confrère turc, mais les conditions de cette participation ne sont pas précisées.

L'Espagne attend que le gouvernement définitif soit constitué pour annoncer sa participation. Le président en fonction, Mariano Rajoy, s'est montré optimiste. « J'espère pouvoir annoncer une contribution espagnole rapidement. »

Le Portugal ne prévoit pas de s'engager sur le flanc Est mais plutôt vers la Méditerranée. L'opération européenne EUNAVFOR Med et celle de l'Alliance « vont évoluer ». Le Portugal « sera alors prêt à participer pour combler les besoins » souligne le ministre portugais de la Défense, Azeredo Lopes.

(Nicolas Gros-Verheyde à Varsovie, avec Leonor Hubaut et Lucas Millet à Bruxelles)

(1) Les Etats-Unis disposent de deux unités "permanentes" en Europe : l'une basée en Italie (173rd Airborne Brigade), l'autre en Allemagne (2nd Cavalry Regiment) selon Stars & Stripes.

(2) Ces équipements seront prépositionnés dans plusieurs bases en Pologne. Un mémorandum d'accord a été signé en 2015 entre Polonais et Américains : Ciechanów, Choszczno, Drawsko Pomorskie, Łask, Skwierzyna.

(3) La Pologne va attribuer son contrat de défense anti-missiles à l'Américain Raytheon avec des Patriot. Mais cela n'a rien à voir sans doute...

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

s2Member®