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Une “Review” baclée, selon Chatham House

La révision de la politique de sécurité et de défense menée par le Gouvernement britannique n’est pas encore publiée (c’est normalement mercredi) que déjà les critiques se font entendre outre Manche. Et non des moindres. La vénérable ‘Chatham House’ vient, à son tour, de jeter son poids vénérable dans la balance, sous la plume de Paul Cornish, son directeur du Programme de sécurité internationale, ancien officier de réserve (des blindés) et enseignant à la chaire Carrington qui est sans doute parmi les meilleurs connaisseurs des questions de sécurité et de défense britanniques.

La révision de la stratégie de la défense a été « menée à un rythme très rapide. Avec un tel calendrier rapide, il y avait peu de temps pour la réflexion stratégique et des idées. Le risque est d’avoir une révision qui ne soit donc le résultat ni d’idées stratégiques, ni de décisions financières. » En clair “Un échec” que Paul Cornish n’hésite pas à qualifier de “Fox Review” (du nom du ministre de la Défense).

Le “casse-tête stratégique” : un Royaume qui n’a plus les moyens de ses ambitions

« Il y a très peu de chance qu’un changement radical puisse, d’un seul coup résoudre le casse-tête actuel stratégique du Royaume-Uni » prédit il. Il est en effet « peu probable qu’une réduction substantielle de l’engagement en Afghanistan puisse être faite, sans risque, à court terme, tout comme il est peu probable que la situation économique nationale puisse récupérer si rapidement que les réductions dans le budget de la défense et d’équipement seront inversées dans un ou deux ans. (De plus) « Le gouvernement de coalition semble peu enclin à annoncer une réorientation fondamentale de la politique étrangère qui présenterait le Royaume-Uni comme un pouvoir de 2e classe sans intérêt sur des questions comme le terrorisme international, la prolifération nucléaire, l’aide humanitaire, la sécurisation du commerce maritime, etc. » Bref… on est dans l’impasse. Et le Royaume n’a plus les moyens de ses ambitions, conclut Paul Cornish. Le Royaume-Uni veut toujours être un « participant actif dans les affaires mondiales, avec les engagements stratégiques et opérationnels qui en découlent, mais sans le poids économique, le budget et les ressources appropriées. »

… et oublie de distinguer les défis et de voir ce qu’il peut faire avec les autres

Paul Cornish détaille longuement ce qu’aurait pu etre une vraie “Review”. Une « stratégie nationale efficace exige une approche systématique pour détecter et analyser les défis et les menaces – l’attendu et l’inattendu – le plus tôt possible ». Des bouleversements économiques, des différends commerciaux, la rivalité et des conflits inter-étatiques, les États défaillants, le terrorisme et la prolifération des armes non conventionnelles (sans compter) la piraterie, la cyber-guerre, la sécurité des frontières et la criminalité organisée… les défis ne manquent pas selon l’auteur. Ce n’est qu’ensuite que l’on peut déterminer la réponse adéquate. « La réponse à ces défis peut se trouver dans les ressources nationales, tandis que dans d’autres, la meilleure réponse peut venir, en termes d’efficacité et de coût, de l’appartenance à une coalition ou une alliance politico-militaire comme l’OTAN. » (On peut remarquer que l’auteur ne cite pas vraiment l’Union européenne).

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Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).